Après que le texte a été remanié au Sénat, puis en commission des lois de l’Assemblée nationale et en séance, il va falloir prévoir un tableau à double entrée pour cocher les cases lorsque le projet de loi sera passé par la Commission Mixte paritaire (CMP). Rappelons que celle-ci est composée de 7 députés et 7 sénateurs et examine l’évolution d’un texte lorsque chacune des deux assemblées a légiféré de son côté, et c’est le cas pour le Projet de Loi de Programmation pour la Refondation de Mayotte (PLPRM).
Le Sénat a permis de réviser les investissements nécessaires à la (re)construction de Mayotte à la hausse de 3,2 à 4 milliards d’euros, ce qui reste insuffisant lorsqu’on prend en compte à la fois les réparations post-Chido et les investissements structurels déficients du Département. La Haute assemblée a notamment également renforcé les pouvoirs du préfet sur les services de l’Etat jusqu’en 2030, supprimé l’inconditionnalité du relogement d’urgence pour les habitants des cases informelles construites récemment, ou revu les modalités de scrutin du Projet de loi organique en portant la découpe électorale à 13 circonscriptions au lieu de 5.
A l’Assemblée nationale, les deux bouleversements majeurs du texte portent sur la suppression des titres de séjour territorialisés au 1er janvier 2030, ce qui ne conditionnerait donc plus pour leur titulaire la sortie de Mayotte à l’obtention d’un visa. Une mesure arrachée de haute lutte en commission des lois, et dont la date lointaine s’explique par la volonté des Réunionnais de « vouloir s’organiser », ainsi que l’ont rapporté les députés en séance. Les Mahorais doivent donc faire avec.
Autre évolution, la suppression de l’article 19 portant sur les expropriations pour cause de projet d’intérêt général que sont le port et l’aéroport, a été supprimé.
Deux titulaires mahorais

Les députés ont également validé l’évolution de Longoni vers un Grand Port maritime, et ont obtenu que soit mis en place un comité de suivi de la loi, ou l’augmentation du montant du SMIC net vers les 87,5% du national au 1er janvier 2026. Une évolution qui est loin d’être une victoire, puisque le SMIC net était déjà quasiment au niveau du national il y a quelques années. L’alignement du SMIC brut lui, devra attendre la convergence des droits sociaux en 2031. En réponse à la demande du MEDEF Mayotte – et qui entre dans la négociation pour la convergence des droits – le Crédit d’impôt Compétitivité Emploi (CICE) est encore prolongé jusqu’au 31 décembre 2027. La protection universelle maladie (PUMA) sera également applicable à Mayotte.
Les quatre parlementaires mahorais sont tous mobilisés en faveur de l’abolition du titre de séjour territorialisé qui reste une atteinte à l’indivisibilité de la République, Mayotte étant le seul territoire où ce système sévit. Mais la CMP est à majorité LR, dont les parlementaires sont opposés à cette suppression. Basé sur la crainte d’un raz-de-marée en provenance des Comores, à notre sens non fondée car le phénomène n’est pas observé sur les migrations touchant la Guyane où la territorialisation des titres de séjour n’est pas effective.
On connait la composition de la CMP* qui se réunira le 8 juillet 2025 à 9h. Seuls Anchya Bamana et Saïd Omar Oili sont titulaires, Estelle Youssouffa et Salama Ramia sont suppléantes. Pour rapporter les propos de la sénatrice mahoraise, « ce n’est pas encore gagné mais nous travaillons toujours à les convaincre ».
Anne Perzo-Lafond