C’est avec un air et une attitude un brin nonchalants que le prévenu s’est présenté devant la barre du tribunal. L’homme de nationalité française s’est déclaré sans profession et vivant dans un banga du côté de Chiconi. Ce que lui reprochait le parquet c’est une reconnaissance de paternité « douteuse » à la mi-décembre 2023 alors qu’il se rendait en mairie pour déclarer un nouveau-né.
Un habitué des déclarations de paternité
Ce qui l’a conduit devant le tribunal c’est le signalement fait par un agent d’état civil de la mairie de Ouangani. Lors de son audition devant les enquêteurs, ce dernier leur a déclaré que le prévenu était déjà venu plusieurs fois pour faire reconnaître sa paternité d’enfants. « Il me semblait que ses réponses n’étaient pas claires. Il n’apportait pas de réponses à mes questions. Il ne connaissait pas le prénom de son nouveau-né et a dû appeler sa compagne pour savoir. Dans le doute je n’ai pas donné suite à sa demande mais il a quand même insisté… Pour moi, il n’est pas le père c’est sûr ! », a affirmé l’agent d’état civil aux enquêteurs. Les membres de la famille de l’intéressé ont également été auditionnés… ils n’étaient pas au courant qu’il était en couple avec une femme de nationalité malgache et qu’ils avaient eu un enfant ensemble. « Je ne connais pas sa femme » aurait déclaré, entre autres, la tante du prévenu.

l’éloignement ou pour l’acquisition de la nationalité française »
Auditionné par les gendarmes, le prévenu aurait indiqué être célibataire, père de deux enfants, dont un vivant en métropole, et juste connaitre le nom de sa compagne malgache mais pas sa date de naissance. « On est ensemble mais on n’est pas mariés, elle vient de Mada et nous vivons à Sohoa. Nous nous sommes rencontrés sur la plage et nous vivons ensemble depuis 2 ans », tout en affirmant qu’il était bel et bien le père du nouveau-né.
Un échange de bons procédés…
Dans son village les gens le dépeignent comme quelqu’un qui boit beaucoup et qui a besoin d’argent pour acheter son alcool. C’est en échange d’argent qu’il aurait accepté de reconnaître la paternité de l’enfant. Devant le tribunal l’homme a déclaré « être ici pour savoir. – L’enfant va bien ? Interroge la présidente du tribunal – Oui, je m’en occupe ».
Durant l’audience, la procureure n’a pas manqué de l’interroger sur le fait qu’aucun membre de sa famille ne connaissait sa relation et la naissance de cet enfant. N’ayant pas de bonnes relations avec sa famille il comptait leur présenter « une fois qu’il commencerait à marcher ». La procureure lui a alors demandé pourquoi ne pas faire un test ADN afin d’être fixé sur sa paternité ou non ! Ce à quoi il a répondu : « Je ne sais pas si elle (sa compagne) est allée voir ailleurs, à droite et à gauche… ».

Dans son réquisitoire la représentante du ministère public a considéré qu’il y avait probablement tromperie auprès de l’État et de la nationalité afin de pouvoir faire bénéficier de droits pour l’enfant et sa mère, alors que l’accès à la nationalité française pour un nouveau-né vient de voir ses conditions se durcir avec la publication de la loi. « Il y a fraude, on sait que des hommes viennent en mairie pour faire de fausses reconnaissances de paternité. Les différents éléments vont dans ce sens. Tout est flou dans ses déclarations… sa rencontre et sa relation avec sa compagne, ils n’ont pas de vie commune, sa famille ne connait ni cette femme ni l’enfant. Il n’y a pas de clarté concernant sa paternité, ce sont des éléments à charge. Il a tenté de frauder auprès de l’État en échange d’argent ». Elle a ainsi requis 5.000 euros d’amende dont 3.000 avec sursis et a suggéré, au titre de complément d’information, qu’une expertise ADN soit faite afin que « le tribunal soit fixé ».
Le prévenu – déjà condamné par le passé pour des faits de violence avec arme, vol, recel de biens, infractions sur les stupéfiants, destruction et détérioration – a été relaxé par le tribunal. Ce dernier arguant qu’ « il n’y avait pas assez d’éléments dans ce dossier pour caractériser les faits reprochés ». Le parquet dispose de 10 jours pour faire éventuellement appel de cette décision.
B.J.