C’est l’un des gros problèmes de Mayotte depuis maintenant plusieurs années : la gestion des déchets. Chido et Dikeledi n’ont malheureusement fait qu’accentuer les choses puisque c’est 6.000 tonnes de déchets supplémentaires qu’il a fallu, et qu’il faut encore, traiter plus de 3 mois après leur passage.
85.000 tonnes de déchets enfouies chaque année à l’ISDND

Mis en service en 2014, l’ISDND de Dzoumogné, seul centre d’enfouissement et de valorisation des déchets de l’île, a été conçu pour une durée de 30 ans, avec la capacité de stocker près de 2 millions de tonnes de déchets. Aussi, force est de constater que 10 ans après son inauguration, le casier N°1 sera au maximum de sa capacité d’absorption « d’ici quelques semaines », nous a-t-on indiqué. En effet, ce sont près de 700 tonnes de déchets qui arrivent chaque jour sur site.
« Avant Chido on était à 350 tonnes par jour. En ce moment on est à 700 tonnes en moyenne et parfois même 900 tonnes. Ce sont ainsi environ 85.000 tonnes de déchets qui sont enfouies chaque année. En 10 ans, ce sont un peu moins de 900.000 tonnes de déchets qui ont été enfouies », nous précise Ambroise Permalnaick, directeur de Star Mayotte, prestataire du Sidevam pour la gestion et le stockage des déchets dans le cadre d’une DSP (délégation de service publique).
Une inauguration du casier 2 repoussée

L’inauguration officielle du 2nd casier aurait dû avoir lieu fin décembre, début janvier. Mais Chido étant passé par là, de nombreux dégâts ont été occasionnés. « Nous avions terminé les travaux le 13 décembre, la veille du passage de Chido… Nous avons dû faire des réparations ces derniers mois », raconte le directeur de Star Mayotte. Aussi, ce casier 2 a été conçu pour stocker environ 1,3 million de tonnes de déchets sur une vingtaine d’années. « Nous inaugurons aujourd’hui la première alvéole du casier 2 de l’ISDND, mais 3 autres alvéoles sont à venir. A Mayotte la gestion des déchets est un réel problème, le centre de stockage se remplit trop rapidement. Le 2e casier était prévu pour une durée de 20 ans mais vu l’augmentation croissante du volume des déchets, nous serons plus sur une quinzaine d’années… », avoue Houssamoudine Abdallah, le président du Sidevam.
En effet, la croissance démographique de Mayotte est galopante, si bien que la production de déchets atteint le rythme impressionnant de 7% de croissance par an, selon Houssamoudine Abdallah. Ainsi, comme l’a indiqué le président du Sidevam sur les 3 premiers mois de l’année ce sont 16.000 tonnes de déchets supplémentaires qu’il faut absorber et stocker, « ce qui représente un coût de 1,5 million d’euros. Chido et Dikeledi ont accéléré le remplissage du casier 1 et ont par la même occasion augmenté les coûts… ».
Mayotte va devoir innover et redoubler d’efforts pour devenir propre

Pour que Mayotte continue à s’appeler l’île aux parfums et non pas l’île aux odeurs… il va falloir mettre en place des projets ambitieux. Et cela passera forcément par l’installation de nouvelles déchetteries un peu partout dans l’île afin de mieux trier et recycler nos déchets. « Les deux prochaines déchetteries seront construites à Tsararano et Longoni. Des études sont actuellement en cours pour commencer les travaux le plus tôt possible », a fait savoir le président du Sidevam.
Il faudra également structurer davantage les filières de recyclage en collaborant avec des éco-organismes pour la mise en place d’une plateforme afin d’exporter nos déchets « mais uniquement dans les pays de l’OCDE », insiste Ambroise Permalnaick. En outre, Mayotte manquant cruellement de foncier il ne pourra pas y avoir un second ISDND sur l’île prévient Houssamoudine Abdallah, « car cela nécessite 23 ha d’aménagement… or cela n’est pas possible ». Une meilleure gestion des déchets passe aussi par éduquer la population au tri. « Il faut une mobilisation collective afin de rendre Mayotte propre… ».
Enfin, il va falloir innover et le président du Sidevam souhaite investir dans une unité de valorisation énergétique des déchets. « C’est un budget de 300 millions d’euros… A terme cela devrait permettre de produire 20% de l’énergie électrique de l’île à partir de déchets. Le Sidevam est amené à être un producteur d’électricité à l’avenir ».
Des déchets permettant de produire du bio gaz pour alimenter les communes en énergie ?

La production d’électricité au sein de l’ISDND devrait redémarrer en juin prochain grâce au bio gaz, a expliqué Ambroise Permalnaick. Les incendies qui se sont déroulés en 2023 sur le site de l’ISDND ont sérieusement endommagé les installations et ont arrêté les activités liées à la production de bio gaz. Toutefois, « cela reste d’actualité, c’est un de mes objectifs cette année, probablement au mois de juin quand nous aurons fini les deux premières alvéoles du casier 2, nous procéderons alors à des forages pour refaire le réseau afin que les installations en bio gaz soient opérationnelles ». A terme, ce serait une production continue en énergie équivalent aux besoins d’une commune de 10.000 habitants…
B.J.