Sous le préau de la piscine Koropa, vendredi 14 mars au matin, les chants et les danses traditionnels de debaa, accueillent les invités à la première édition de « Watru waché wa kiblane », une journée organisée par la CAGNM pour sensibiliser aux droits des femmes et à l’égalité et pour mettre en avant plusieurs femmes qui œuvrent au quotidien dans la vie des communes. Cette année, après le cyclone, se sont les « héroïnes de Chido » qui ont été honorées. La CAGNM a également gratifié les dirigeantes des chamas de debaa, pour leurs rôles de gardiennes de la culture mahoraise.
« C’est notre foundi, sans elle on aurait rien pu faire »
« Lors du passage de Chido nous avons été témoin d’un élan de solidarité de nombreuses femmes qui se sont mobilisées avec courage pour protéger leurs familles, leurs voisins et leurs communautés. Nous leur disons merci pour votre engagement, pour votre force et votre dévouement », a annoncé dans son discours d’introduction, Yassir Issouf Bacar, vice-présidente en charge des solidarités action et insertion sociale à la CAGNM.

C’est le cas de Mariame Saïd Ali, à la tête de l’association culturelle Madrassati Youraniya de Trévani, qui a performé en introduction de la journée. Récompensée d’une plaque à son nom en tant que doyenne des chamas de debaa et de son rôle dans la préservation des traditions mahoraises, elle a aussi été très importante dans sa communauté et auprès des filles de l’association après le passage du cyclone Chido. « C’est notre foundi, sans elle on aurait rien pu faire. Elle a accueilli les gens chez elle qui ont tout perdu. Et c’est aussi grâce à elle que nos répétitions de debaa ont repris », insiste, Raïssa Boinaidi, secrétaire de l’association Madrassati Youraniya, vêtue d’une salouva violette sur laquelle sont brodées des fleurs de vanille.
Ce vendredi, c’est la deuxième fois depuis Chido, que l’association joue en public, un bol d’air et une échappatoire précieuse pour la vingtaine de jeunes femmes du groupe. « La majorité des filles ont tout perdu suite au cyclone et certaines sont parties de Mayotte. Ça fait du bien de reprendre, de ne pas rester à la maison et d’être dans un état d’esprit positif », continue Raïssa Boinaidi.
« Les jeunes femmes doivent être fortes. Si on n’est pas forte en tant que femme ça devient compliqué, car au quotidien il faut savoir tout gérer », explique Mariame Saïd Ali, qui avoue devoir rappeler sans cesse ce message aux nouvelles générations.

Les femmes récompensées du titre d’héroïne de Chido sont des agentes des quatre principales communes du nord : Nadhoimati Rafion à Mtsamboro, Fatima Soula à Bandraboua, Mouhaidoiti Saïd à Koungou, mais aussi Ankimati Ousseni adjointe au maire à Acoua.
« Aujourd’hui on a toutes les générations mélangées, nos mamies, nos mamans, nos adolescentes et c’est important que les jeunes voient les récompenses données aux adultes. On oubliera pas Chido et on doit chercher du positif dans la catastrophe et en honorant ces femmes pour leurs rôles c’est ce qu’on a réussi à faire », remarque Echati Issa, conseillère départementale de Koungou.
L’égalité pas un principe mais une nécessité
« Cette journée est aussi un moment de sensibilisation, l’égalité entre femmes et hommes est un combat de chaque instant. Nous devons poursuivre nos efforts pour garantir les droits et la sécurité des femmes et leur pleine participation à la vie économique, sociale et culturelle de notre île. L’égalité n’est pas un principe mais une nécessité pour construire un avenir plus juste et plus harmonieux. Je souhaite que cette première édition soit le début d’une belle tradition », poursuit l’élue.

« La femme aujourd’hui à le droit de prendre des décisions sur son propre corps, sur sa maternité, elle à le droit à la contraception, à l’IGV, le droit de vote et le droit d’être élue. Pour cela il a fallu des années et des années de combats et c’est précieux à Mayotte qu’on protège ces droits », a ajouté Manarssana Boina, directrice régionale aux droits des femmes et à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Un discours écouté par un public nombreux, principalement composé de jeunes femmes, comme Houssounati, 17 ans, membre de l’association culturelle Madrassati Youraniya de Trévani. « C’est un honneur de participer à un tel événement dans lequel on met la femme en avant et c’est aussi un événement culturel qui n’arrive pas souvent, donc je suis contente », note-t-elle après avoir participé au debaa. « Pour moi, mon exemple c’est ma grand-mère, pendant Chido c’était la personne la plus calme », se souvient-elle, « elle est restée forte même dans un moment difficile ».
Victor Diwisch