Aider et accompagner les parents dans l’exercice de leur parentalité. Voilà le défi que se sont fixés les réseaux locaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents mahorais (REAAP), initiés en novembre 2022 pour répondre aux besoins des familles définis dans le cadre du Schéma Départemental des Services aux Familles 2020-2022.
« Auparavant, l’éducation des enfants était principalement réservée aux mamans »
Au fil de temps, les rôles des parents ont évolué au sein des familles, explique Mohamed Saidi, coordinateur du REAAP de Mayotte. « Auparavant, l’éducation des enfants étaient principalement réservée aux mamans et les pères allaient travailler pour ramener de l’argent et à manger au foyer. Aujourd’hui, les mères travaillent comme les pères. Et ces derniers revendiquent un peu plus de place dans l’éducation des enfants. Nous trouvons des papas qui déposent les enfants à la crèche, il y a de plus en plus de mamans qui sont adhérentes au club de sport de leurs enfants et elles les accompagnent à leurs tournois. »
L’indépendance financière des femmes contribue à une meilleure réparation des tâches au sein du foyer
« Il reste du travail à faire pour se répartir des tâches au domicile lorsque les deux parents travaillent pour que chacun assume son rôle de parent et non se dire qu’on aide la maman, par exemple, lorsque l’on donne le bain au petit, ou bien au papa, lorsqu’on dépose le petit au sport », détaille avec honnêteté, Mohamed Saidi.
En qualité de coordinateur du réseau REAAP, Mohamed Saidi pointe du doigt un problème souvent tabou dans la société mahoraise, où faute d’accompagnement des parents dans l’éducation de leur enfant et face aux nouvelles méthodes d’éducation contemporaines, les parents peuvent parfois sembler démissionnaires.
« Certains parents expriment leur incapacité à transmettre dans leur éducation, l’amour qu’ils n’ont jamais connu »
« La plupart des parents se trouvent dépassés dans leur rôle de premier éducateur entre ce que la loi leur autorise et leur interdit de faire. Par exemple, la loi interdit de taper un enfant mais elle n’accompagne pas forcément les parents en leur montrant d’autres manières d’éducation. Beaucoup de parents estiment aujourd’hui que la loi est venue les désavouer face à leur enfant. Certains parents disent que la mesure éducative a tué leur enfant, lorsqu’ils parlent d’une mesure de placement. Pour d’autres, ils estiment qu’on parle seulement de droits et devoirs des parents et jamais, voire, pas assez de droits et devoirs des enfants. Certains parents remontent le besoin de les accompagner dans leur rôle éducatif. Ils sont démunis face à leur autorité parentale. Certains expriment leur incapacité à transmettre dans leur éducation, l’amour qu’ils n’ont jamais connu. »
« Les pères se mobilisent plus qu’avant »
Pour remplir ce vide et faire face à ce désarroi, les Matinées de la parentalité se sont imposées avec succès dans le paysage mahorais. Grâce à des exemples concrets exploités lors des ateliers intergénérationnels et des sessions d’activités, ces temps de partage animés par des acteurs de terrain ont pour but de maintenir un lien « parents-enfants » fort, basé sur une communication non violente entre les adultes et les enfants. Depuis la mise en place de ce dispositif, Mohamed Saidi estime que des évolutions sont déjà notables. « Les pères se mobilisent plus qu’avant car, la société d’avant et celle d’aujourd’hui sont deux sociétés diamétralement opposées. Avant, l’enfant était élevé par tout le monde dans le village et aujourd’hui, l’enfant appartient à sa famille limitée (père, mère). Les papas se mobilisent un peu plus du fait que la maman et les grands-parents travaillent. » Souvent dans l’ombre, de nombreux pères élèvent seuls leurs enfants. Lors d’ateliers « parents-enfants » déployés par les acteurs sociaux et éducatifs du territoire, ces familles monoparentales revendiquent davantage leur rôle et leur place. « Il y a même des pères qui veulent avoir plus de poids dans l’éducation de leurs enfants, en demandant aux mamans de leur laisser de la place pour s’occuper aussi de leurs enfants. Ils veulent qu’elles leur fassent confiance. »
Cette année, cinq « matinées-sessions » auront lieu au sein des cinq intercommunalités de l’île : samedi 26 octobre 2024 de 7h à 12h à la MJC de Combani, samedi 2 novembre 2024 de 7h à 12h, Place du congrès à Pamandzi (annulée-prochaine date à venir), samedi 16 novembre 2024 de 7h à 12h, à la MJC de Miréréni, samedi 23 novembre 2024 de 7h à 12h, à l’école primaire de Vahibé 2, et enfin samedi 30 novembre 2024 de 7h à 12h, au CCAS de Bandraboua.
Mathilde Hangard