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Comores/Crash Ab Aviation : la justice ordonne la réparation du préjudice subi par les victimes

Le Tribunal de première instance de Moroni déclare Ab Aviation « responsable du crash » et ordonne à la compagnie de « réparer le préjudice subi » par les familles des victimes. Celui-ci est évalué, pour l’instant, à « 600 mille euros » qui doivent être versés aux ayants droits en fonction de leur nombre et comprenant le père, la mère, le conjoint ou la conjointe, l’enfant, le frère et la sœur de chaque victime. Ab Aviation dit être « surprise » et compte faire appel de cette décision.

La justice comorienne, après deux ans d’instruction, s’est enfin prononcée dans l’affaire du crash du Cessna 508 (l’appareil 5H-MZA du vol Y61103) de la compagnie Ab Aviation, disparu en mer, le 26 février 2022, à quelques kilomètres de l’aérodrome de l’île de Mwali (Mohéli) avec 14 personnes à bord, dont deux membres d’équipage d’origine tanzanienne.

Il s’agit du volet civil de l’affaire qui consiste à verser des dédommagements aux ayants droits des victimes. En novembre 2022, à l’issue d’une procédure de référé, les ayants droits étaient estimés à « 101 personnes ». Le juge de référé avait demandé, à l’époque, « 505 millions de francs comoriens » (environ 1 million d’euros) au titre de provisions, demandant au propriétaire de l’avion (Fly Zanzibar) et surtout à son assureur (Phoenix Assurance) de verser lesdites provisions.

La police d’assurance au cœur du débat

Statuant au fond ce samedi 28 septembre, le Tribunal a d’abord pointé du doigt la compagnie, l’estimant être « responsable » de l’accident et la sommant ensuite à « réparer le préjudice subi » par les familles des victimes. Le Tribunal dit avoir constaté que la compagnie Ab Aviation « n’avait pas assuré les passagers et l’a condamnée seule à la réparation du préjudice subi par les familles des victimes à hauteur de 25 millions de francs (50 mille euros) pour chaque parent, chaque enfant et chaque conjoint et 15 millions (30 mille euros) pour chaque frère et chaque sœur », d’après l’avocat des familles des victimes, Me Saïd Mohamed Saïd Hassane qui n’a souhaité faire « aucun commentaire sans une discussion préalable avec les familles des victimes ».

De son côté, la direction d’Ab Aviation, après avoir réitéré sa « compassion avec les familles des victimes », dit être « surprise » de cette décision du tribunal, estimant que la justice devrait plutôt condamner l’assureur et non la compagnie. Celle-ci pointe du doigt « une décision qui met hors de cause la société d’assurance Phoenix of Tanzania Assurance, Fly Zanzibar et l’Anacm alors que Fly Zanzibar, propriétaire de l’appareil, avait souscrit une police d’assurance Numéro 16220/20/HO qui couvre les passagers comme stipulé clairement dans l’instrumentum ». La compagnie annonce « interjeter appel de cette décision dans le respect du droit et pour la manifestation de la vérité ».

Le rapport d’enquête non communiqué à la presse

Le Tribunal demande le paiement des provisions, Ab Aviation conteste la décision

L’évaluation du préjudice avec la détermination du nombre des ayants droits et l’existence ou non d’une police d’assurance ont été au cœur de l’instruction. Pour le premier cas, le juge de référé avait limité les ayants droits aux seuls proches directs, à savoir les parents, les conjoints et les enfants. Pour le second cas, la compagnie Ab Aviation clamait l’existence d’une police d’assurance, estimant que c’est bien son assureur, Phoenix Assurance, qui devrait être sommé de payer les provisions réclamées par la justice comorienne.

Et que seul le volet pénal pourrait faire l’objet d’une éventuelle responsabilité d’Ab Aviation en cas de manquements avérés ou de négligence manifeste de la compagnie, révélés par la commission d’enquête dirigée par l’ancien directeur général de l’Anacm, Jean Marc Heintz. Le rapport d’enquête, à notre connaissance, n’a toujours pas été rendu public pour se faire une idée du niveau des responsabilités des uns et des autres. Les conclusions finales de l’enquête n’ont pas été communiquées à la presse tout comme l’expertise judiciaire dont le Tribunal s’est servi en grande partie pour fonder sa décision.

Le crash du Cessna avait endeuillé tout un pays. Le vol avait quitté l’aéroport principal en fin de matinée du 26 février 2022 vers la plus petite île des Comores. L’appareil avait entamé le processus d’atterrissage avant de disparaître mystérieusement dans le brouillard. Les recherches effectuées à l’époque n’avaient pas permis de retrouver l’épave. Des débris avaient été récupérés à quelques kilomètres de la zone d’amorce en vue de l’atterrissage. Un corps a été repêché mais son état de décomposition avancé n’a pas permis aux enquêteurs de l’identifier formellement. On ignore les mesures prises jusqu’ici pour prévenir un tel drame.

A.S.Kemba, Moroni  

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