Une conférence pour repenser les enjeux de l’économie bleue dans l’archipel des Comores

Le séminaire d’anthropologie ISLAND, financé par la commission de recherche du CUFR et coordonné par la maître de conférence Georgeta Stoica, a accueilli lundi 13 novembre dernier Raffaele Maddaluno. Ce doctorant de l’université italienne Roma La Sapienza a partagé avec le public les résultats de ses recherches sur la dichotomie existant entre les principes de l’économie bleue mis en place dans l’archipel des Comores et la matérialité de la mer vécue par les pêcheurs et autres travailleurs de la mer.

Le séminaire d’anthropologie ISLAND a débuté son cycle de conférences au CUFR fin septembre. Ses différentes thématiques portent sur l’histoire de Mayotte et des Comores, l’économie bleue au sein de l’archipel géographique et son patrimoine. Ces conférences ont pour but de lancer des pistes de réflexions pour monter à l’issue un projet ANR (Agence Nationale de la Recherche) portant sur la singularité de l’insularité. Ce lundi 13 novembre, la conférence du doctorant Raffaele Maddaluno avait pour titre : « Archipel-logiques comoriennes : la matérialité de la mer pour repenser les enjeux de l’économie bleue dans l’océan Indien ». Sa réflexion est le fruit de 7 mois de recherches ethnographiques réalisées dans les 3 îles des Comores et à Mayotte.

Georgeta Stoica, maître de conférence en anthropologie au CUFR de Mayotte, coordonne le séminaire ISLAND.

Depuis plusieurs années, les principes conservationnistes des aires marines sont mises en place à Mayotte et aux Comores. Mais le chercheur a pu constater sur le terrain que celles-ci sont souvent là pour servir d’appui au mythe de l’économie bleue qui a toujours pour logique la croissance dans une optique capitaliste. Ainsi, elle s’oppose souvent, malgré ses prétentions, à une véritable protection de la mer et de ses ressources, mais aussi aux logiques écologiques des travailleurs de la mer comoriens. « Au cours de mon séjour aux Comores, j’ai pu constater que les pêcheurs et autres travailleurs de la mer avaient une forte conscience écologique, mais que celle-ci n’avait pas la même logique que celle de l’économie bleue que les politiques mettent en place », a déclaré Raffaele Maddaluno. « Parfois, les principes conservationnistes se heurtent aux contraintes matérielles des travailleurs de la mer qui ont une autre façon de voir la protection de l’environnement », ajoute-il.

Des « archipel-logiques » comoriennes

Le chercheur a pu constater au cours de son étude ethnographique que les pêcheurs et autres travailleurs de la mer obéissaient davantage à des logiques inter-île prenant en compte l’intégralité de l’archipel géographique. « Souvent les acteurs de la mer ne sont pas vraiment pris en compte dans les politiques de conservation. Or ils ont leur propre logique qui n’est pas centralisée mais se déploie entre les îles, d’où mon appellation de « archipel-logiques » », explique le chercheur qui précise que sa réflexion n’a pas pour objet de fustiger les politiques, mais de tenter de « déplacer le regard » et de « mettre en évidence l’imbrication profonde entre l’histoire de l’archipel et son économie ».

Cadres d'avenir, Mayotte
Le CUFR de Mayotte propose régulièrement des conférences données par des chercheurs dans divers domaines de la culture.

Par ailleurs, le doctorant a évoqué la manière dont les principes de l’économie bleue et du développement durable affectaient l’imaginaire des populations. « Le développement durable est un mythe qui se heurte parfois aux exigences matérielle », a-t-il souligné en donnant plusieurs exemples de cas concrets qu’il a rencontré aux Comores. Mayotte est, bien évidemment intégrée dans cette étude de par sa connexion historique et culturelle avec les autres îles des Comores. Ces pistes de réflexion aboutiront à la rédaction d’une thèse d’ici 2025 qui viendra ajouter de la matière à l’anthropologie des Comores qui n’a été jusque-là que peu étudiée.

Nora Godeau

Encadré : les prochaines conférences du séminaire ISLAND :

  • Vendredi 24 novembre : « Le pain : un objet surchargé de sens »

Intervenante : Cristina Papa, anthropologue à l’université de Perugia

Salle polyvalente du CUFR de 9h à 11h

  • Samedi 25 novembre : « Des mensonges pour dire la vérité : l’esclavage à travers les contes de l’archipel des Comores »

Salle polyvalente du CUFR de 11h à 13h

Intervenant : Abdereman Wadjih, anthropologue

Partagez l'article :

Subscribe

spot_imgspot_img

Les plus lus

More like this
Related

Le tribunal administratif prononce la résiliation de la DSP du port de Longoni au 1er septembre 2026

Depuis 2013, une partie des usagers du port dénonçaient les manquements aux exigences de service public d’Ida Nel, présidente de MCG, dans sa gestion du port de Longoni. En indiquant qu’elle est « manifestement contraire à l'intérêt général », le tribunal donne raison à l’Union maritime et au conseil départemental qui en demandaient la résiliation

Zawadi Festival 2025 : un rendez-vous artistique pour la jeunesse à Mayotte

Le Zawadi Festival revient pour cinq jours de spectacles et d’ateliers dédiés aux jeunes et aux familles.

Amani et la guerre des deux villages : un souffle de féérie à Mayotte

Une comédie musicale originale, mêlant culture mahoraise et univers Disney, sera présentée ce mercredi au collège de Labattoir.

La Fédération des Centres Sociaux de Mayotte organise son premier séminaire fédéral

La Fédération des Centres Sociaux de Mayotte organise le 17 juin son premier séminaire fédéral à Kani-Kéli.