Quelles conséquences du mouvement social au CHM ?

Depuis plus d’un mois des personnels hospitaliers manifestent contre les agressions dont ils font l’objet. Un mouvement qui se doublait du blocage de Jacaranda, plongeant le monde médical dans une nouvelle tension au moment d’une épidémie de gastro mortelle pour les nourrissons.

Cela fait maintenant plus d’un mois qu’une partie du personnel du CHM s’est mise en droit de retrait, décision prise en Formation Spécialisée en matière de Santé, de Sécurité et de Conditions de Travail (F3SCT, émanation du Comité Social Territorial (CST)). Les branches Santé sociale de la CFE CGC, CFTC, CGT, Sud, FO et CFDT de Mayotte revendiquent de meilleures conditions sécuritaires sur leur trajet et lieu de travail. L’élément déclencheur avait été l’agression d’une navette CHM par des caillassages au cours de laquelle une élève infirmière avait été blessée à l’œil.

Un mouvement qui a fortement perturbé le fonctionnement de l’hôpital puisque si l’accès aux Urgences par le SMUR ou les pompiers était garanti par les manifestants, ainsi que la chirurgie ambulatoire, certains services ne fonctionnaient plus du tout, comme les consultations, d’autres au ralenti. Surtout, facteur aggravant, le blocage du dispensaire de Jacaranda par un des Collectifs de citoyens durant plusieurs semaines, a déporté toute demande de soins vers les Urgences qui se sont trouvées totalement embolisées.

Des décès par déshydratation

Réserve sanitaire, Covid, Mayotte, variant 501
L’hôpital sous pression depuis plusieurs mois avec un enchainement des plans blancs

Une période compliquée où la gestion des malades, particulièrement des nourrissons, fut très tendue, en pleine épidémie de gastroentérite. Des rumeurs tenaces de décès se sont propagées, nous incitant à contacter Olivier Brahic, Directeur général de l’ARS Mayotte. « Nous avons eu quelques cas de décès de nourrissons pour déshydratation avancée, mais à domicile. C’est pourquoi nous avons diffusé des messages d’alerte par radio pour que les familles consultent immédiatement en cas de déclenchement de gastroentérite surtout pour les enfants de moins de 2 ans. Et nous avons eu à déplorer le décès d’un nourrisson de 4 mois en réanimation, pour cause de déshydratation avancée ». Selon le directeur de l’ARS, « il n’y a pas eu de décès faute de prise en charge », mais en raison « d’arrivées tardives » aux Urgences. La frontière est mince, et les difficultés d’accès au dispensaire pour des soins ont pu en entraver plus d’un.

En ce qui concerne le personnel soignant, Zakoini Hamada, délégué CFTC Santé sociaux, confirme un mouvement « qui ne bloque pas les soins urgents », et cite d’autres raisons susceptibles d’aggraver la situation actuelle, « la fermeture de la salle de naissance et de suites de couche de Mramadoudou peut aussi affecter la prise en charge de soins ».

Le personnel doit à nouveau être reçu en préfecture

Alors que le mouvement avait la compréhension de la direction à son démarrage, le syndicaliste juge que « le soutien moral n’est plus là ». Une tentative de requalification du mouvement en grève, donc sans rémunération des jours non travaillés, n’a pas abouti, il s’agit donc toujours d’un droit de retrait, rémunéré donc. Ils évoquent pour cela de nouveaux faits : « Un bus de soignants a encore été attaqué un soir de cette semaine, et, même si ce n’est pas dans le cadre de leurs fonctions, deux collègues se sont fait attaquer à Tsoundzou, comme beaucoup d’autres citoyens. Nous voulons que des décisions définitives et pérennes soient prises. » Une cause qu’il estime commune à tous, « c’est la tranquillité de la population mahoraise dans son ensemble que nous défendons. »

De son côté, la Première ministre Élisabeth Borne a volé au secours de la direction du CHM en ordonnant l’envoi à Mayotte de 30 personnels soignants pour renforcer les effectifs du centre hospitalier de Mamoudzou, et du personnel pour la logistique.

Les représentants syndicaux doivent être une nouvelle fois reçus en préfecture « la semaine du 30 octobre ».

Anne Perzo-Lafond

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