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Laiterie de Mayotte : 30 ans et quelques gouttes !

Cela fait déjà plus de 3 décennies que l’entité initialement artisanale, quasi historique dans le paysage économique mahorais, s’est implantée dans la zone industrielle de Kawéni. Une implantation qui a poussé les murs d’année en année à proportion égale de son efficiente montée en puissance, tant sur le plan de sa modernisation que sur celui de ses ressources humaines. Trente ans, l’occasion d’enfiler sa charlotte, sa blouse et ses chaussons jetables — dispositions d’hygiène oblige — afin de pénétrer dans l’antre sécurisée de notre géant des douceurs laitières…

Oula, Caresse, Yopaï, Ounono ou encore Frizou. Les présentations ne sont plus à faire pour cet exploitant également franchisé, depuis 1995, de la fameuse marque française à la petite fleur qu’est Yoplait. La laiterie de Mayotte, c’est une entreprise industrielle qui a su conserver tout le qualitatif d’une approche artisanale et ce, malgré une incroyable modernisation, aussi dirigée vers la transition numérique.

Intégralement élaboré sur zone, les yaourts Oula, après fermentation et ajout des arômes sont ensuite conditionnés pour leur phase suivante qui se veut l’étuvage

Elle a tout d’une grande…

Qui pourrait penser que derrière ces murs s’articule tout un labyrinthique chaînage qui n’a strictement rien à envier aux usines laitières de Métropole. Un chainage de process relatifs à l’entière élaboration, sur zone, des produits commercialisés que nous connaissons, au moyen d’une gestion intégralement informatisée et d’une vision globale à 360°. Dit comme ça, ça en jette, n’est-il pas ? Et bien en toute et saine neutralité journalistique, nous devons bien reconnaitre qu’il est une certaine fierté de découvrir telle technologie de travail sur notre territoire où la complémentarité intergénérationnelle est noblement de mise.

Chaque maillage de la chaine de pasteurisation se veut informatisé, avec option de suivi et réglage en temps réel. Les jeunes techniciens polyvalents sont souvent préposés à cet atelier. Le numérique étant un outil bien plus instinctif pour eux en comparaison de leurs ainés

En effet, là où les anciens de la boite seront experts sur l’aspect qualitatif même du produit, leurs homologues benjamins seront plus à même d’évoluer sur les outils numérisés visant à réduire avant tout la pénibilité de certaines tâches, en lien avec la chaîne de montage. Et si comme nous, vous vous inquiétez de savoir si les machines ont pour vocation de remplacer l’humaine main d’œuvre; rassurez-vous, que nenni ! Bien au contraire même, et ce, chiffres à l’appui. Avec une moyenne de 1 à 2 recrutements annuels, sans compter les employés présents depuis 15 à 20 ans, embarqués dans cette aventure, la Laiterie de Mayotte en 2023, c’est 53 salariés et elle ne compte pas en rester là.

Dans cet homogénéisateur à haute pression, la poudre de lait, l’eau et la matière grasse sont pressées à hauteur de 150 bars

Les presque 50 nuances de lait et petit topo chiffré 

Étalée sur une superficie de 4 200 mètres carrés, la LDM, dans les grandes lignes, c’est 6 familles de produits, elles même sous-ramifiées par 5 à 6 sections, soit au bas mot une trentaine de références actives, représentant 16 millions de yaourts sortis de l’usine mahoraise en 2022, pour un poids de production de 2 200 tonnes (soit actuellement 42 tonnes de yaourt produits par jour contre 24 tonnes encore en 2021*). Une production bien entendu basée sur du lait en poudre, intégralement importé de l’Hexagone et d’autres ingrédients provenant du marché européen mais également international, telles que les matières grasses laitières, venant de Nouvelle-Zélande ou encore le sucre, d’Afrique du Sud (mais aussi de la Réunion comme il est actuellement cas). Malheureusement, faute de qualité stable, de traçabilité et de filière suffisamment carrée en l’industrielle matière, aucun produit ou arôme du marché local n’est exploité, notamment la vanille, comme le souhaiterait Emmanuel Clerc, directeur de la maison concernée, arrivé en 2020 et issu d’un long parcours dans le domaine de l’Agro-alimentaire :

Emmanuel Clerc devant ce nouveau système de production de chaud et de froid acquis notamment grâce aux aides du Feder

« Dans notre domaine professionnel, il est demandé aussi une qualité agréée, chose qu’il est encore complexe de trouver sur notre territoire. Nos produits ont pour vocation à être consommés et nous nous devons de respecter des normes précises. Pour le moment, il est compliqué ici de sourcer, comme on dit vulgairement dans le jargon, de trouver des fournisseurs locaux mais ça viendra, je le souhaite. Nous nous heurtons toujours à une histoire de taille de marché. Pour un industriel, débloquer les filières, cela sous-entend avoir accès à des volumes suffisants. Encore une fois, ça viendra ».

La société certifiée norme ISO 9001, abrite 2 labos autour desquels gravitent 6 personnes, dont 2 laborantines
Régulièrement et plusieurs fois par jours, des prélèvements d’échantillons sont faits, pour études dans la foulée, afin de garantir le plein respect et des normes d’hygiènes et de la qualité du produit.

La suite des événements 

Depuis sa prise de fonction, le nouveau directeur de la Laiterie de Mayotte a été partie prenante dans la textuelle élaboration de la dernière phase d’une feuille de route, relative au déploiement d’un plan de développement industriel, tablé sur la période 2022-2025. Un plan qui, à l’image de la solidité et de la forme économique de cette société, s’est établi, comme toujours, « en bonne intelligence » selon les propres termes d’Emmanuel Clerc et qui a déjà trouvé concret par 2 volets sur un total de 4.

Cette même centrale qui assure la production de chaud et de froid a ici une capacité de stockage de 30 000 litres d’eau glacée, utilisée dans le process de refroidissement de certains produits

Ainsi, en 2022, comme précédemment indiqué*, la capacité de production a donc pu doubler grâce à l’achat de 3 cuves supplémentaires (passant de 6 à 9). En 2023, grâce à l’obtention, pour la toute première fois, d’un Fonds européen de développement régional (Feder) de 1,1 millions d’euros — soit 70% du coût global de l’investissement — la production de chaud et de froid de la laiterie a été optimisée, aussi dans une approche moins énergivore, offrant ainsi, d’une part, un remplacement des anciens montages et, d’autres part, un gain de place maximisé, notamment au niveau du département d’étuvage**, offrant dorénavant une capacité d’accueil de 29 emplacements palettes, contre 12 auparavant.

Concernant les étapes restantes, il sera donc question, en 2024, du remplacement des 2 lignes de conditionnement de pots de yaourts (après remplissage) existantes — d’un rendement de 2×2000 pots par heure — au profit d’une seule ligne cadencée à 16 000 pots/h. Une ligne bien entendue intégralement automatisée visant à réduire « la pénibilité du travail ». Et pour 2025, dernière étape de cette feuille de route, il sera question du complet remodelage de la chaine de production des bouteilles de type Yop, incluant la mise en place d’un système de bouchon solidaire, afin de faire un pas de plus vers la préservation environnementale.

Par cette machine, le plastique est gonflé pour produire une bouteille creuse produite toutes les 12 secondes
Ces billes de plastique importées vont servir à la confection des bouteilles de yaourt à boire Yop

 

 

 

 

 

 

 

Résultat final de ce plastique soufflé et de mise en bouteille du produit. Cette édition, spéciale trentième anniversaire a été élaborée par les étudiants en Art graphique du Lycée de Lumières de Kawéni
D’ici peu, le remplacement de ces 2 lignes de pots, comprenant des parties manuelles, notamment en fin de chaine, seront remplacées par une seule plus performante et entièrement automatisée

Et c’est pas fini ! 

Dans sa volonté, à la fois de satisfaire la légitime appétence de ses actionnaires, et d’amortir les frais actuels déjà sortis, Emmanuel Clerc avance en prudente intelligence, graduellement parlant, avec toutefois un objectif noble bien précis, dans les proches années à venir, qui est celui d’amorcer le processus d’une baisse drastique du coût de production de ses yaourts et, par conséquent, celui de vente, en faveur des portefeuilles les plus modestes. En somme, je modernise ma chaine de production pour un meilleur rendement global et c’est par ce rendement que je pourrai fluidifier ma distribution et donc réduire mes coûts. Et pour des performances aussi liées au stockage et à la fluidité de circulation, il n’est pas exclu, dans la tête du dit directeur, d’envisager des alternatives telles que des entrepôts frigos en divers lieux de notre territoire ainsi que l’implantation d’une seconde laiterie délocalisée.

Après pasteurisation (chauffé à 72°C pendant 15 secondes) et ensemencement (refroidissement et maintient à une température comprise entre 42,5 et 43°C et introduction des ferments lactiques), le lait mis en pot fermé sera maintenu au chaud pendant près de 3h à cette même température pour laisser les ferments agir et transformer le contenu en yaourt

 

C’est donc dans une perspective déjà entre-dessinée à horizon 2030 que nous laissons Emmanuel Clerc et ses équipes s’affairer autour de ces grands chantiers en cours et à venir, avec tout de même une légère inquiétude quant au volet hydrique et la crise que nous connaissons actuellement… Une crise pour laquelle le discours du directeur se veut on ne peut plus clair : « Quand il n’y aura plus d’eau, il n’y aura plus de yaourts ! « … D’ici là, niveau danse de la pluie, n’y allons pas, ni par 4 chemins, ni avec le dos de la cuillère ! Soyons conscients, économes et (naïvement) confiants et croisons les doigts pour les prochains mois.

Joyeux anniversaire la Laiterie et rendez-vous dans les 30 prochaines années…

MLG

 

Pour arrêter la fermentation du yaourt, ce dernier est saisi à 4°C après étuvage pendnat près de 3/4 d’heure
Pour le moment, la phase assemblage est encore manuelle en partie, ce qui devrait évoluer d’ici peu pour soulager les employés

 

 

 

 

 

 

 

 

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