C’est certainement grâce au massif soutien de la population que monsieur X, policier rattaché à l’unité spécialisée de la Police aux frontières, a été remis en liberté ce lundi, sous contrôle judiciaire, après avoir été placé en garde à vue et déféré au tribunal de grande instance de Mamoudzou « en vue de l’ouverture d’une information judiciaire sous les qualifications juridiques délictuelles » relevant de l’utilisation de son arme de service à plusieurs reprises, ayant entraîné l’hospitalisation et l’intervention chirurgicale de 2 mineurs avec respectives ITT de 6 jours pour l’un et 21 jours pour l’autre. Selon nos informations, à ce jour, aucune atteinte ni détresse vitale n’a été signalée pour ces jeunes gens.
Rapide rétrospective officiellement enregistrée
C’est au sortir d’une dominicale rencontre footballistique entre les équipes de Kawéni et de Passamainty — qui, soit dit en passant, s’est bien déroulée, — sur les coups de 18 heures, au stade de Cavani, qu’un certain nombre de jeunes ont décidé de s’adonner manifestement gratuitement, comme à l’accoutumée, à des actes d’incivilité, de vol et de violence. Le policier concerné, hors service, qui réintégrait son domicile dans ladite zone a été la cible de ces actes et s’est rendu en son lieu de vie afin de récupérer rapidement son arme chargée et d’en ressortir pour en faire usage à l’encontre du groupe d’individus ciblés. Toujours selon le rapport officiel de la Vice-procureur, Véronique Compan, les circonstances pour lesquelles plusieurs coups ont été tirés, blessant 2 mineurs « restent à compléter ». De son côté, le policier « blessé légèrement » a également « déposé plainte pour les blessures qu’il a lui-même subies ».
Une vague de soutienS
C’est aux abords du tribunal judiciaire de Mamoudzou qu’une foule s’est amassée, ce mardi matin, afin de manifester son plein soutien à l’égard de ce policier considéré comme « un héros, un sauveur, une sorte de Deus Ex Machina » comme l’indique, Chakila Yssouf, secrétaire du Collectif des habitants de Cavani, dans son courrier adressé au Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice et Garde des Sceaux. En effet, dans ces écrits, il est mentionné un contexte plus global de la situation qui soulignerait le fait, en plus des biens qui ont été volontairement détériorés ou dérobé, que des concitoyens aient été agressés et qu’au regard du caractère déterminé et armé (chambos, barres de fer…) des délinquants concernés, grâce à « l’intervention courageuse » de ce policier, « des vies ont été sauvées et un bain de sang évité ». Un courrier gratifiant qui en appelle à la clémence face à une situation qui suscite à la fois la sidération et la révolte de la population.
Des tristes faits pourtant prévisibles
Du côté des forces de l’ordre que nous avons contactées, notamment auprès du département de la PAF, il est fait état d’une situation prévisible qui, paradoxalement et sans mauvais jeu de mot, désarme.
En effet, malgré les alertes récurrentes de profils récidivistes identifiés (ndlr – délinquants connus des services) et de dossiers remontés en haute instance depuis déjà un certain temps, aucune mesure ferme ne semble être prise : « Soyons lucides, cette triste situation est vouée à se répéter. Regardez notre pauvre collègue qui s’est pris un caillou il y a peu, personne n’en a réellement parlé; aucune mesure concrète n’a été prise. Ça aurait l’inverse, c’était le KO diplomatique. C’est un fait, la violence est grandissante, nous faisons fasse à des jeunes qui n’éprouvent absolument aucune crainte et même, qui recherchent la confrontation directe. C’est à coup de lacrymogènes quasi systématiques que l’on doit s’extirper. Si des injustes sanctions doivent être prises à l’encontre de notre collègue, nous monterons au créneau » nous confie un des policiers.
Du côté de la commune de Mamoudzou et du 1er adjoint au maire, Dhinouraine M’Colo Mainty, le discours politique se veut légitimement plus nuancé : « Notre position fait que nous demeurons impartiaux; une enquête est en cours, nous le respectons. Manifestement, ce policier n’a pas eu autre choix que de faire usage de son arme, nous ne sommes pas là pour prendre parti mais force est de constater que ce genre d’actes de violence se répète, s’intensifie et on ne peut pas rester inactifs. Il faut impérativement instaurer de façon récurrente des actions de terrain et de dialogue, auprès de ces jeunes. Il faut prévenir ce genre de soulèvements.
Notre politique se veut volontariste mais réaliste. On nous parle de jeunes isolés, ça n’est pas le cas et il va aussi falloir mettre en place des mesures pour responsabiliser et impacter les parents et familles de ces jeunes. Il ne faut pas tomber dans une période irrémédiablement sombre de justice populaire comme certains semblent le prédire. Dans une autre approche conjointe, nous allons momentanément éloigner l’équipe de football de Kawéni des stades. C’est désolant mais dès qu’il est question de cette équipe, les actes de violences pendant ou post match sont à noter ».
Un énième fait-divers en lien direct avec cette violence sociétale qui fait partie intégrante du paysage mahorais. Un fait engendrant des dommages collatéraux discutables mais que seule la Justice peut ou non condamner dans un contexte même national qui dénonce justement les limites d’action et légitimités des forces de l’ordre, face à un degré de violence affligeant. Notre rédaction vous tiendra informés au regard de la suite de cette affaire.
MLG