En 2019, Gildas faisait partie du Comité de médiation des sages et de prévention de la délinquance, plus connu sous le nom de « gilets jaunes ». Créée par le capitaine Chamassi en 2017, cette initiative avait disparu durant quelques temps avant de renaître en 2021, ses membres baptisés cette fois « parents-relais ». Le dispositif a été présenté le mois dernier au préfet, nous avons cette fois donné la parole à ces parents qui donnent de leur temps pour leurs enfants et ceux des autres.
De son côté, Gildas s’investissait au sein de l’association qu’il avait créé en 2017, «Bouge-toi pour ta santé ». À Kaweni, celle-ci rassemble encore aujourd’hui les jeunes du quartier autour d’activités comme le fitness ou la randonnée. « Je cherchais un moyen de protéger les enfants », se souvient Gildas. C’est donc tout naturellement qu’il devient parent-relais.
Peu à peu, Gildas fédère autour de lui plusieurs autres parents. « J’avais les contacts car les enfants font partie de l’association, précise-t-il. Et les parents acceptent car il s’agit de leurs enfants ». Depuis, plus d’une dizaine d’associations a reproduit ce concept.
À Kawéni, ce sont 11.000 élèves qui sont scolarisés. Plusieurs centaines de parents-relais assurent bénévolement, par leur présence, leur sécurité sur le chemin de l’école. Naibati en fait partie. « Avant d’être parent-relais, j’amenais moi-même mes enfants à l’école », confie-t-elle. À présent, elle s’occupe également de ceux des autres. « Dès qu’ils me voient quelque part, ils savent qu’ils sont en sécurité, même s’ils ne me connaissent pas ».
Trois jours par semaine, dès 6 heures du matin, Naibati est présente aux abords de l’école. Elle y reste toute la matinée, parfois jusqu’à 15 heures. « Pour les enfants, il y a une grande différence, constate-t-elle. Quand il n’y avait pas les parents-relais, tout le monde traversait sans faire attention aux voitures pour aller à l’école. C’était la pagaille ! Et quand certains conducteurs rentrent dans un village, ils ne font pas du tout attention ».
Mais il ne s’agit pas uniquement d’assurer la sécurité des enfants vis-à-vis des voitures. « On règle les conflits entre les jeunes, poursuit Naibati. Quand ils sortent, ils se chamaillent parfois, se bagarrent même ».
Lorsque certains jeunes posent problème, les parents-relais sont généralement capables de les reconnaître. Ils appellent Gildas, qui contacte les forces de l’ordre pour venir au domicile du jeune en question. « Vous n’êtes ni des policiers, ni des vigiles, ni des milices. Votre rôle consiste simplement à faire de la prévention et à aider à la solidarité à l’ancienne », avait affirmé à ce sujet Chaharoumani Chamassi aux volontaires rassemblés en mai dernier.
« Avant d’être parent-relais, je suis parent, témoigne Naibati. Si je vois les forces de l’ordre arriver chez moi, je me sens mal. Mais il faut bien qu’on règle le problème ensemble. Parfois on trouve des jeunes qui ne comprennent rien. On essaye de leur parler, certains parents s’énervent… Quand tu parles, tu dois être bien conscient de ce que tu vas dire ».
Malgré le temps très important qu’elle donne bénévolement, cette maman ne semble pas regretter son engagement. « J’apprends aussi, je fais connaissance. Je travaille en groupe, avec l’établissement, les profs, les enfants. Je ne perds pas mon temps », constate-t-elle.
Pour le moment, Gildas se trouve encore en recherche de nouveaux parents-relais, pour former des binômes. S’il se dit reconnaissant envers la commune qui les a aidés, il signale avoir toujours besoin de matériel de sécurité. De son côté, Naibati ne refuserait pas de quoi boire et se protéger du soleil, car les heures passées dehors restent parfois éprouvantes.
Quoiqu’il en soit, le dispositif semble ne plus avoir à prouver son efficacité « Les enfants se sentent en sécurité aujourd’hui, résume Gildas. Ils peuvent tranquillement sortir acheter un goûter par exemple, ce qui n’était pas le cas avant ».
Marine Wolf