« Nous avons entendu des tirs toute la nuit, et ce matin, on nous demandait de faire demi-tour alors que nous voulions aller au travail à Mamoudzou », nous informe un habitant de Majikavo Koropa. De nombreux barrages enflammés sont érigés sur la route, que les gendarmes et les services techniques de la mairie de Koungou dégagent un à un sur le côté. Des rumeurs d’incendie de la mairie annexe à Dubaï bruissent, il n’en est rien, mais la montée vers la mosquée est noyée dans la fumée.
Autour du quartier Talus 2, tout est calme par contre. Et pour cause, la décision de justice est tombée la veille, ordonnant au préfet de « cesser toute opération d’évacuation et de démolition des habitats visés dans le périmètre de l’arrêté du 2 décembre 2022 ». Nous y reviendrons, mais la raison principale invoquée est la proximité des 20 cases qui ne devaient pas être démolies car en attente d’une décision judiciaire, avec les autres. Le préfet indique faire appel de la décision.
La routine
Sur place, les habitants concernés se réjouissent, avec réserve toutefois : « Bien sûr nous sommes contents que nos maisons ne soient pas démolies, mais si aujourd’hui je suis soulagé, c’est jusqu’à quand ? », témoigne Mohamed. Quant aux dégradations sur Majikavo, il dit ne pas en connaître les auteurs, « nous aimerions tous que ces délinquants soient interpellés pour vivre tranquilles ».
Autant d’habitants, autant de cas différents. Quelques uns ont démoli leurs cases pour les reconstruire plus loin vers Longoni, d’autres ont accepté les relogements qu’ils ont investi à Bandrajou ou à Hamachaka, d’autres encore considèrent qu’il ne correspondent pas à leur configuration familiale, et font partie de la vingtaine d’habitants à avoir eu recours à la justice.
Malgré le déploiement d’une opération spéciale, rien de nouveau : alors que cette première démolition était parmi les mieux préparées de l’île pour avoir été présenté notamment à un ministre de la Ville et à la présidente de l’ANRU, les usagers de la route ont encore une fois été pris à partie par des barreurs de route, repoussés à coup de grenades lacrymogène par la gendarmerie. Prêts à recommencer.
A 8h du matin, l’hélicoptère de la gendarmerie tournait toujours au-dessus des hauteurs de Majikavo où les jeunes se seraient réfugiés.
A.P-L.