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Wuambushu : condamnation a minima de la présidence comorienne

C’est un pas de deux qu’ont entamé les présidents français et comorien, et qui rythme la valse des réactions à l’opération Wuambushu. Mais a-t-on réfléchi à l’après ? Tout le monde marche sur des œufs, au milieu des tirs à vue des détracteurs. A ces derniers, Mansour Kamardine en profite pour rappeler la réalité de Mayotte.

Le président Azali Assoumani avait annoncé attendre une communication officielle de la France avant de réagir à l’annonce de l’opération Wuambushu. Pressé par sa majorité, il a publié ce week-end un communiqué de désapprobation. Sans surprise, on lira que « Mayotte est une île comorienne sous administration française depuis l’indépendance du pays en 1975 », et que toute expulsion de Comoriens venant des trois autres îles depuis Mayotte, « constitue une violation grave des droits internationales ». Opérations qui se déroulent quotidiennement depuis Mayotte, rappelons-le, avec un total de 25.380 expulsions en 2022.

La positon du président Azali est complexe, entre le marteau financier français, et l’enclume de son électorat alors que s’approche l’élection présidentielle de 2024. Il a manié le premier lors d’une rencontre à l’Elysée pas plus tard que le mois dernier. A cette occasion rapportent nos confrères du JDD, Emmanuel Macron et Azali Assoumani ont « convenu de renforcer leur coopération pour contenir l’immigration clandestine qui afflue vers Mayotte ». Difficile d’imaginer que l’opération Wuambushu qui allait se tenir un mois après, n’ait pas été évoquée. Sur ce sujet, le président comorien affirme dans le même communiqué avoir « a exprimé clairement et nettement aux autorités françaises sa désapprobation. »

Pour autant, pas de mention d’une condamnation ferme dans ce communiqué de Beit Salam, où l’on peut lire que « une action spectaculaire de destruction de bidonvilles et d’expulsion de leurs habitants jugés en situation irrégulière ne doivent pas aller dans le sens de la déstabilisation de toute une région », et plus loin, « le gouvernement comorien interpelle sur le danger d’une telle opération ». Le vocabulaire employé relève d’un langage diplomatique soft, lisible d’un côté comme de l’autre.

Azali Assoumani, une condamnation de principe

Les droit-de-l’hommistes dans le viseur de Kamardine

Car faute d’avoir son approbation, le président Macron a du obtenir des garanties, sans doute contre un chèque et un appui à la présidence de son homologue à l’Union africaine, contre la non activation de la carte maitresse du président : le refus d’accueillir sur son sol les 300 expulsions par jour que promet l’opération, ce qui s’est passé à plusieurs reprises par le passé, notamment sous prétexte Covid. C’est pourquoi, il faut marcher sur des œufs, et le report de la visite ce week-end à Moroni de Sébastien Lecornu, ministre des Armées en est sans doute une preuve. Un signe aussi d’un possible remaniement ministériel en France, mais c’est un autre sujet.

Les condamnations les plus virulentes viennent tout d’abord d’une partie de l’opposition à Azali, notamment le comité mahorais qui prône le rattachement de Mayotte aux Comores. Dans un communiqué le terme de Wuambushu était dénoncé pour une de ses traductions, « tue-le », en swahili. L’initiateur du terme aurait été bien inspiré de se pencher sur l’éventail des significations, qui semble relever du « chercher » dans le sens « tu me cherches » en shimaorais, ou « reconquête », mais chacun voit actuellement wuambushu à sa porte.

Les critiques viennent ensuite de différents représentants de la société française, comme le mentionne le député LR Mansour Kamardine dans un communiqué, « Le droit-de-l’hommisme n’est pas de l’humanisme ».

Un plan Marshall pour Mayotte et les Comores

Impossible de conserver ces ensembles de cases en tôle dans une telle insalubrité (ici à Kawéni)

Il vise les différentes réactions qui essaiment les médias depuis quelques semaines, « Qui un syndicat de magistrats, qui un collectif de soignants, qui une association d’avocats, qui une organisation non gouvernementale d’aide aux migrants, qui un groupe d’enseignants, tous, de concert, protestent contre l’érection de l’Etat de droit à Mayotte ! » L’élu met les auteurs devant leurs incohérences, soulignant d’un côté des logements insalubres « représentant 54% de l’habitat » dans des zones à forts risques naturels, « avec une insécurité galopante et barbare ayant transformée, en quelques années, la paisible Mayotte en la région au plus fort taux d’homicide d’Europe », et de l’autre, la multiplication des « recours au droit de retrait et de grève pour dénoncer, à juste titre, les violences qui frappent indistinctement et partout dans les villages, dans les quartiers et dans les services publics ». Et le député s’interroge, « comment peuvent-ils trahir, aujourd’hui, la volonté du retour de l’Etat de droit à Mayotte ?! » Lire le Communiqué de Mansour Kamardine.

Reste à savoir ce qu’Emmanuel Macron a négocié avec son homologue comorien. Car bien que non dévoilée, nous réitérons, l’opération tape à côté. S’il s’agit de mener une opération visant les chefs de bandes et à cibler les parents des auteurs mineurs de violence en les tapant au portefeuille comme le fait Transdev, on peut en attendre un résultat. Mais s’il s’agit, comme l’a dévoilé le Canard enchaîné, de reconduites massives, il fallait l’accompagner d’un plan Marshall de construction des Comores. Le Plan de développement France-Comores de 150 millions d’euros sur trois ans semble ridicule en face des enjeux, par ailleurs étalés par un récent rapport interministériel.

Mansour Kamardine, Mayotte
Mansour Kamardine dénonce l’incohérence de raisonnement des contestataires

Car après avoir bénéficié de la scolarisation et des soins gratuits ici à Mayotte, les natifs des îles comoriennes vont retrouver là-bas une politique publique déficiente au moins dans ces deux domaines, il est donc certain qu’ils n’auront qu’une envie, revenir.

Anne Perzo-Lafond

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