29.8 C
Mamoudzou

Caillassages incessants : jusqu’à quand ?

Nous sommes bien loin du 9 janvier, où les transports avaient effectués une rentrée idéale, sans aucun incident. 1 mois plus tard, le bilan est catastrophique, avec plusieurs caillassages recensés depuis. En gardant en tête les 7 bus caillassés au nord, ou encore, le conducteur de bus gravement touché sur Petite-Terre, nous faisons le point sur ces 30 derniers jours.

« C’est inadmissible de te dire que tu joues potentiellement ta vie »

Un jeune chauffeur de bus, qui a voulu garder l’anonymat, exprimait son désarroi le plus total face à leurs conditions de travail. Il s’est notamment appuyé sur un fait grave qui s’est déroulé récemment en Petite-Terre. Voici ses propos : « Au début de l’année on se disait qu’on était sur une bonne lancée, surtout avec la présence des forces de l’ordre, le climat avait un peu changé. Que de désillusions. J’ai une pensée particulière pour mon collègue chauffeur touché gravement à la tête suite à un caillassage en Petite-Terre la semaine dernière et qui a dû être évasané*. C’est inadmissible de te dire que tu joues potentiellement ta vie en effectuant ton travail. Les solutions manquent… » avait-il conclu, dépassé par les événements.

Un bilan peu glorieux

Transdev, Mayotte, bus
39 caillassages ont été recensés sur les 30 derniers jours (image d’illustration)

Frédéric Delouye, directeur de Transdev Mayotte, recommandait la prudence le 9 janvier dernier. Il ne s’était pas emballé malgré son souhait de voir les choses s’améliorer, l’actualité a fini par donner place à ses craintes. Il nous en dit davantage sur le bilan de ces 30 derniers jours : « Le bilan de ces quatre dernières semaines est catastrophique. 39 caillassages ont été recensés sur cette période, jusqu’à l’heure où je vous parle, car ça peut arriver à tout moment. On en est à plus d’un par jour en moyenne, c’est énorme. Si certains jours sont plus calmes, d’autres sont très compliqués, comme lundi, la semaine dernière, où 8 caillassages ont été recensés. Les zones principales d’incidents sont le nord de l’île, notamment vers Koungou. Mais attention, aucune région n’est épargnée. Tsoundou, Vahibé ou même Petite-Terre, qui n’avaient jusque-là pas de problème de caillassages, ont eu des incidents. Tout cela malgré une forte présence de la gendarmerie et de l’ensemble des forces de l’ordre. »

Pour Siaka Djoumoi, secrétaire général du syndicat FO transport, ce n’est pas un problème de présence policière. Il nous développe son point de vue : « Les contrôles sont toujours effectués par Transdev, la présence des gendarmes est toujours forte, ce n’est pas le souci. Les voyous changent juste leurs stratégies. Ils ne se postent plus aux mêmes zones et ne procèdent plus de la même manière, mais ils sont toujours là. Il faudrait peut-être des sanctions un peu plus significatives. »

Plus facile à dire qu’à faire

Pour répondre à nos interrogations, nous nous sommes adressés au Colonel Olivier Casties de la gendarmerie. Il a répondu à nos sollicitations et nous a fait part de son point de vue sur la situation : « Aujourd’hui il faut dire les choses, même si les caillassages sont présents, ce n’est pas la même situation qu’il y a quelques mois. Ce n’est plus des cas où des jeunes pouvaient s’introduire dans les bus à l’arrêt et agresser les passagers. Les actions conjointes des forces de l’ordre et des contrôles de Transdev, ainsi que d’autres acteurs, ont permis de stabiliser la situation. Maintenant il faut savoir qu’une fois sur deux, un caillassage de bus va arriver lors d’un règlement de comptes entre jeunes et un bus peut être touché accidentellement, comme une autre voiture lambda d’ailleurs. Ensuite, oui, il existe bien des cas où les jeunes visent intentionnellement les bus. Pour ce qui est des sanctions ‘plus fortes’, c’est plus facile à dire qu’à faire. Les peines sont individuelles et plusieurs éléments rentrent en compte comme l’âge, les raisons du caillassages, le degré, savoir s’il y a récidive, s’il y a un casier judiciaire. Ça peut aller de simples amendes à de la prison ferme. »

Longoni, Gendarmes, Mayotte
Les forces de l’ordre, notamment de la gendarmerie, restent mobilisées (photo d’illustration gendarmerie de Mayotte)

Quelles solutions ?

Les solutions manquent mais le Colonel Casties en a une, qui a le mérite d’être claire, comme il nous l’explique : « Les fauteurs de trouble sont souvent les mêmes. La plupart du temps c’est des jeunes qui sont interpellés, mais que font leurs parents ? Ces jeunes ‘caïds’ n’ont aucun suivi et se retrouvent dans les rues. Chacun doit assumer sa part de responsabilité pour espérer un meilleur avenir. Les interpellations continuent d’être effectuées, les magistrats font leur boulot… malgré que la prison ait largement dépassé l’effectif qu’elle pouvait accueillir. »

Travailler tous ensemble pour faire cesser les caillassages et l’insécurité en général, c’est le message à retenir. Le conducteur de bus gravement touché à la tête vendredi dernier, a été opéré dans la nuit de mardi à mercredi, et ses jours ne sont pas en danger, d’après le directeur de Transdev Mayotte. Pour limiter ce genre d’incidents dans le futur, un projet est actuellement en études pour équiper les bus de vitres en Polycarbonate, toujours d’après Frédéric Delouye. Le financement reste un obstacle et les discussions (actuellement en cours) avec le conseil départemental, seront décisives.

Houmadi Abdallah

*evasan = évacuation sanitaire. Lorsqu’un problème de santé devient trop grave, le patient est evasané vers un territoire plus à même de répondre à l’urgence sanitaire. En l’occurrence notre interlocuteur a été evasané pour la Réunion.

Partagez l'article:

Les plus lus

Articles similaires
Similaire

Caribus : annulation du marché de transport collectif octroyé à OPTIMOM

Le tribunal administratif donne raison aux trois sociétés plaignantes,...

Les enseignants contractuels désormais recrutés en juin

Afin que les enseignants contractuels puissent s’installer et travailler...

Mariage homosexuel : civil, mais pas religieux, rappelle le Grand Cadi de Mayotte

C’est une parole d’apaisement au milieu d’un torrents de critiques envers le mariage de deux femmes sur le département, dont l’une est comorienne. Pas de problème sur le plan civil, mais au niveau religieux, l’islam l’interdit, rappelle Mahamoudou Hamada Saanda qui invite au dialogue. Rappelons que la position de la religion catholique est à peine plus souple

Le CMR de Kahani caillassé mardi soir [Actualisé]

Mardi soir, vers 20h, l'agent de sécurité du Centre...
WP Twitter Auto Publish Powered By : XYZScripts.com