Comme le rappelle le commandant du Service départemental d’incendie et de secours (Sdis) 976, le colonel Olivier Neis, la vocation première de ses hommes est de « porter secours aux personnes, de préserver les biens et l’environnement ». Pour cela il peut compter sur 241 pompiers professionnels, 120 pompiers volontaires et 45 personnels administratifs. C’est à la fois beaucoup mais peu à l’échelle du territoire mahorais. Aussi, comme l’indique le commandant Neis, « Quatre-vingts pourcents de l’activité des sapeurs-pompiers de l’île concerne le secours aux personnes ».
Même si cela n’a l’air de rien, ces interventions nécessitent une forte mobilisation en termes d’hommes, de matériel et de technicité. « L’accidentologie à Mayotte est importante malgré les efforts faits concernant les contrôles routiers. L’année 2022 n’est pas pire ou meilleure que les autres, mais il est vrai que le pourcentage d’accidents très grave est en hausse, avec notamment des blessures et des séquelles profondes auxquelles nous sommes obligés de nous adapter », poursuit-il.
L’écobuage, un problème pour l’environnement du territoire mahorais
Une autre activité qui occupe aussi les pompiers de l’île est la préservation des biens et de l’environnement avec notamment les feux d’habitation, les feux industriels et les feux de brousse. « Cela représente environ 12% des interventions des pompiers de l’île. Il y a la nécessité de s’adapter à l’environnement naturel mais aussi de mettre une stratégie en place pour lutter contre les feux de brousse. Car on ne peut pas parler de feu de forêt à Mayotte. Le problème ici c’est l’écobuage non contrôlé qui est différent de celui pratiqué en métropole par des professionnels formés ».
Selon lui, 99% des mises à feu dans l’île sont d’origine humaine que ce soit volontaire ou involontaire, comme un mégot par exemple. « En dépit d’un climat tropical les sols sont secs. Il y a nécessité de traiter les strates herbacés et arbustives pour limiter les incendies. Un feu a besoin de matière pour s’alimenter, plus vous avez des herbes hautes plus le feu aura un pouvoir calorifique et cela touche après les autres végétaux. C’est ce qu’on appelle le triangle du feu : de la matière pour alimenter, de l’air et une source de chaleur. L’écobuage à Mayotte dégrade les sols, c’est la politique de la terre brûlée.
Malgré l’arrêté préfectoral qui interdit d’utiliser le feu sans autorisation, beaucoup de gens passent outre et ceux qui allument ces feux n’ont pas conscience des dégâts écologiques qu’ils provoquent sur la faune et la flore. Certaines plantes endémiques risquent ainsi de disparaître définitivement », explique-t-il. Le projet de DFCI (Défense de la Forêt contre les Incendies) pour mettre en place des pistes d’accès pour les pompiers au cœur de la forêt entre 2006 et 2012 afin d’éviter la dégradation des massifs forestiers a été refusé durant ces mêmes années. « C’est aujourd’hui un énorme problème quand nous devons intervenir pour éteindre des feux. On a privilégié l’état naturel », déplore le chef des pompiers.
De nouvelles casernes et de nouveaux équipements
Le colonel en a profité pour rappeler également les projets en cours ou à venir, comme la caserne située en Petite-Terre dont l’inauguration devrait avoir lieu en février ou mars prochain. « Nous sommes déjà bien équipés et cette caserne avec ses engins modernes et ses nouveaux matériels viendront compléter notre équipement. De plus, la caserne de Kahani, dont les travaux ont débuté récemment, sera la plus grosse caserne du département avec une école de pompiers en son sein. Le plateau technique situé à côté du site de Kinga à Kawéni dont les travaux devraient commencer au mois de juillet pour être livré en 2025 fait également parti des projets à venir. Le Sdis de Mayotte étant le plus jeune de France (2014), il est en train de combler son retard. Enfin, les 8 % restants sont ce qu’on appelle « les opérations diverses » comme le découpage de tronc d’arbres sur la route suite à une tempête ou le sauvetage d’animaux.
Le commandant Neis souligne ainsi que les pompiers ont un rôle de prévision et de prévention et surtout la nécessité « d’être prêt au moment où l’on a besoin de nous ».
Benoît Jaëglé