« Au niveau de la Chambre d’Appel, normalement il faudrait quatre greffiers, on est aujourd’hui à deux. Concernant le tribunal judiciaire, il faudrait également un renfort pour pouvoir tourner à plein régime ». Selon les chiffres avancés par le directeur de Greffe de la Chambre d’Appel, Guillaume Hery, si dans le second cas le sous-effectif est de l’ordre de 20 à 30 %, dans le premier, la barre des 50 % est atteinte.
Un sous-effectif susceptible de nuire à la procédure judiciaire
En cause ? « Depuis un an, on a eu des départs en mutation non remplacés », explique le directeur de Greffe ». Mais surtout, détaille-t-il, « depuis à peu près deux ans, au regard des événements qui ont pu se passer à Mayotte, on a une nouvelle politique au niveau de Paris. Le dernier du classement à sa sortie de l’Ecole nationale des greffes, s’il n’a pas d’autre choix que Mayotte, on ne le force plus à y venir ». Résultat, les affectations sont rares et le travail en sous-effectif semble s’institutionnaliser. Or, rappelle Guillaume Hery, « le rôle du greffier est capital dans la procédure judiciaire, il est son garant ». Il s’agit, en outre, d’un métier à responsabilité indispensable à la société dans la mesure où tout acte juridictionnel accompli en leur absence peut être frappé de nullité.
Une solution inédite pour tenter de résorber le manque de greffier
Pour pallier le sous-effectif chronique de greffier de la juridiction de Mayotte, et afin de ne pas gripper les rouages de la procédure judiciaire, le ministère de la Justice par arrêté du garde des Sceaux, en date du 28 octobre dernier, organise à titre expérimental pour l’année 2023 un concours national externe et interne à affectation locale dans le 101e département. Le même dispositif est également déployé pour la Guyane. « On ne sait pas encore si ce dispositif sera renouvelé mais pour le moment une petite dizaine de postes sont susceptibles d’être ouverts à Mayotte », note Guillaume Hery, également responsable du centre des concours et des examens de la direction des services judiciaires.
Concrètement, quelles sont les modalités du concours national à affectation locale à Mayotte ? « Le concours est ouvert à tous aussi bien en métropole que sur l’île mais avec l’obligation de le passer à Mayotte », explique le directeur de greffe. Les inscriptions sont ouvertes depuis le 10 novembre jusqu’au 9 janvier prochain, et elles se font par voie électronique sur le site du ministère de la Justice. Par ailleurs note Guillaume Hery, « il s’agit des mêmes épreuves que le concours national pour intégrer l’Ecole nationale des greffes à Dijon, elles auront lieu les mêmes jours les 14 et 15 mars prochains ». Les épreuves orales, quant à elles, se dérouleront dans le courant du mois de juin pour une admission au sein de l’Ecole nationale des greffes prévue en septembre 2023.
Le premier vivier de greffier attendu à l’horizon 2025
Seule différence avec le concours national « classique », à la fin de la formation rémunérée de 18 mois, le futur greffier admis au titre de l’affectation locale à Mayotte est certain d’avoir un poste dans la juridiction de l’île. « C’est la certitude d’être affecté soit à la Chambre d’Appel soit au tribunal judiciaire de Mamoudzou», précise Guillaume Hery. Néanmoins, l’affection à Mayotte à la sortie d’école n’est pas synonyme de faire toute sa carrière dans le département. Sachant que le concours est d’envergure nationale, le futur greffier, s’il souhaite être muté par la suite peut faire une demande de mobilité, mais aussi prétendre à des évolutions afin de devenir, par exemple, greffier principal – par la voie de l’examen professionnel – directeur de greffe ou encore magistrat.
Au regard de l’entrée en fonction à l’horizon mars 2025, le directeur de greffe précise qu’il s’agit d’un dispositif « sur lequel on vise le moyen terme » car au bout de deux ans, « il y aura un bon vivier ». Quid de la situation à court terme pour compenser les sous-effectifs actuels ? « Le ministère de la Justice a mis en place un dispositif de brigade de fonctionnaires pour nous aider. Ce sera un renfort de magistrats et de greffiers », informe Guillaume Hery, avec au total, quatre magistrats attendus courant janvier et une dizaine de greffiers en février. Ces renforts permettront de faire la transition en attendant que la greffe prenne pour la première promotion du concours à affectation à Mayotte.
Pierre Mouysset
*La Chambre d’appel met à dispositif, pour toute information complémentaire concernant les modalités du concours, l’adresse mail suivante Chg.cha-mamoudzou@justice.fr