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RAID à Mayotte : panser l’urgence à défaut de penser la stratégie sécuritaire ?

Pendant les quinze prochains jours, la dizaine d’hommes du RAID déployés à Mayotte vont s’efforcer de remplir leur mission : rétablir l’ordre. L’occasion de faire le point avec le secrétaire départemental du syndicat Alliance Police 976, Bacar Attoumani.

Une fois n’est pas coutume cette année, une dizaine d’hommes de l’unité d’élite du RAID (Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion) ont été dépêchés à Mayotte afin d’assurer une désescalade de la violence. « L’objectif premier, c’est de rétablir l’ordre, c’est tout ce qu’on leur demande », informe Bacar Attoumani, secrétaire départemental du syndicat Alliance Police 976.

Le RAID dispose de moyen de surveillance et de renseignement permettant de cibler les meneurs, capture d’écran GoogleEarth, Mamoudzou

Neutraliser les meneurs

Ayant débuté leur mission mercredi, cette dernière s’étale sur quinze jours. « Il y aura un travail de renseignement à l’aide de drones, de surveillance des endroits où ils devront potentiellement intervenir », détaille le policier. Des opérations menées dans la zone de Mamoudzou dans des secteurs fréquentés par des « délinquants chevronnés » ne sont pas à exclure, selon lui, afin de procéder à la recherche d’individus préalablement identifiés. En effet, pour briser le cercle de violence qui embrase actuellement le chef-lieu, la stratégie à appliquer est aussi vieille que le monde : « l’objectif premier quand il y a des troubles à l’ordre public c’est de neutraliser les meneurs », note Bacar Attoumani. Ainsi, la bande se retrouve désorganisée, amputée de son élément central.

Néanmoins, la nature ayant horreur du vide, les places vacantes peuvent aiguiser les ambitions, doivent-elles être celles de la rue, jusqu’au prochain remplaçant. Une situation qui pose la question de la pérennité d’une unité du RAID à Mayotte. « On pense que si on avait une unité de cet acabit ou si elle pouvait être en mesure de venir tous les trois mois, voire même tous les quinze jours, cela permettrait de conforter notre action sur le terrain », souligne Bacar Attoumani. Selon lui, « l’unité peut agir directement avec de la surveillance ». Un moyen non négligeable pour maintenir sous pression les potentiellement meneurs et ainsi décourager toutes velléités.

La question de la pérennisation du RAID à Mayotte

Pour le secrétaire départemental du syndicat, la question de la création d’une antenne locale du RAID à l’instar des mesures prises pour la Guyane, se pose. Ainsi, fin septembre, lors des Assises de la sécurité à Cayenne, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, avait notamment annoncé la création d’une antenne du RAID dans ce département ultra-marin. Pourtant, Mayotte n’est pas dépourvue de ce type d’unité d’élite avec la présence du Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). Si Bacar Attoumani récuse toute critique de sa part, il ne manque pas de s’interroger quant à l’action de cette unité sur l’île : « On se demande quelle est l’utilité de l’antenne GIGN car elle ne participe jamais à ce type d’action. On ne comprend pas et se pose la question de son utilité ». Les questions de notre interlocuteur se multiplient : « Pourquoi faisons-nous venir une antenne RAID alors que nous avons une antenne GIGN ici. Pourquoi ces gendarmes ne sont pas systématiquement engagés alors que l’on fait appel aux gendarmes mobiles ? ».

Cédric Boyer, à gauche, accompagné de Bacar Attoumani,

« Ce que l’on veut, c’est la paix »,

D’ailleurs, les maires du 101e département avaient fait part de leur souhait, dans le cadre du comité du suivi des Assises de la sécurité en septembre dernier, de la mise en place d’une formation de policier à l’utilisation des armes du RAID, qu’en est-il actuellement ? Les réactions dans l’urgence semblent anesthésier toute planification à long terme de la stratégie sécuritaire à déployer à Mayotte. Lors de sa venue sur l’île en octobre dernier, le délégué national DROM-COM du syndicat Alliance Police Nationale, Cédric Boyer, avait porté la lumière sur cette zone d’ombre rappelant qu’il ne s’agit pas uniquement de porter la réflexion sur la sécurité de l’île à l’instant présent mais aussi de l’envisager à des horizons temporels à « dix, vingt voire trente ans ». Y compris en anticipant ses évolutions. L’envoi du RAID ne peut être qu’une réaction à l’urgence de la situation comme sa venue en début d’année. Mais la problématique sécuritaire sur le long terme reste, pour sa part, entière. « Ce que l’on veut, c’est la paix », conclut Bacar Attoumani.

Pierre Mouysset

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