La municipalité de Chirongui n’en finit pas de défrayer les chroniques judiciaires. Après la condamnation, le 3 mai dernier, de l’ancien maire Saïd Andhanouni à une peine d’inéligibilité de 10 années avec exécution provisoire, et 5 ans d’interdiction d’exercer toute fonction publique, c’est au tour du nouvel édile, Bihaki Daouda, d’être aux prises avec la Justice.
En 6 mois, la majorité s’est peu à peu effritée
Élu par le conseil municipal le 17 mai 2022, le maire a rappelé lors de sa conférence de presse de la semaine dernière qu’il souhaitait que la commune redémarre « sur des bases saines » ; une manière de tourner la page de son prédécesseur et des gabegies financières. Pour y parvenir, un audit a été lancé, dès son arrivée à la tête de la mairie, révélant de nombreuses irrégularités qu’il s’agisse de malversations ou encore d’embauches pléthoriques. Si les 4,5 millions d’euros de factures impayés laissés par l’ancienne équipe municipale « sont quasiment soldés », d’autres chantiers attendent le premier édile de la mairie, notamment ceux en suspens tels que les projets de marché couvert de Chirongui ou du plateau sportif de Tsimkoura. Néanmoins, la majorité acquise à l’ancien maire s’est peu à peu effritée au fil des six premiers mois de mandat Bihaki Daouda.
A tel point que 16 des 29 conseillers municipaux ont saisi le tribunal administratif afin que ce dernier suspende la décision du maire, du 28 septembre dernier, relative au « refus de réunir l’assemblée délibérante sur un ordre du jour précis ». Cet ordre du jour mentionnait l’annulation d’une délibération en date du 17 mai 2022 « portant sur la délégation des compétences générales du maire » ainsi que sur « l’annulation de la délibération portant sur la création du poste de collaborateur du maire ». Par courrier en date du 28 septembre, Bihaki Daouda avait motivé sa décision au motif que la demande présentait un caractère manifestement abusif de nature à porter atteinte aux intérêts de la commune et ce, sans plus de motivation.
« Il reproche à l’ancien maire de ne pas respecter la loi »
Lors de l’audience de mercredi Me Idriss, représentant les 16 conseillers municipaux, n’a pas hésité à qualifier de « dictatorial » l’agissement de Bihaki Daouda. « Il reproche à l’ancien maire de ne pas respecter la loi, il fait de même voire pire », s’est-il exprimé. Pour sa part, Me Chakrina, représentant la commune de Chirongui, a soutenu que l’urgence de la demande n’était pas caractérisée, tout en rappelant que Bihaki Daouda, le 5 octobre dernier, a réunit le Conseil municipal pour aborder des « questions relevant de l’intérêt communal et non d’intérêts partisans ». « C’est uniquement dans un but d’intérêt de la commune que le maire souhaitait ne pas inscrire à l’ordre du jour les demandes des conseillers municipaux », a défendu Me Chakrina. Une demande que le maire avait qualifiée « d’abusive ».
La décision du maire suspendue
Néanmoins, le tribunal administratif dans sa décision a tranché en faveur des requérants. En effet, si « la convocation d’un conseil municipal afin qu’il délibère sans plus attendre de la question soumise par les conseillers municipaux, qui était motivée, présente un intérêt communal et n’est pas abusive », la décision du tribunal administratif précise également que dans les communes de 3500 habitants, et plus, le maire est tenu « de convoquer le conseil municipal dans un délai maximum de trente jours pour délibérer » lorsque « la demande motivée lui en est faite par le tiers des membres du conseil municipal ». Ainsi, le tribunal administratif a notamment suspendu la décision du maire du 28 septembre 2022 tout en l’enjoignant « de réunir le conseil municipal dans un délai maximum de 30 jours » afin de traiter les points spécifiques demandés par les 16 conseillers municipaux. Si les tensions politiques semblaient déjà bien installées, ces dernières risquent encore de s’accentuer au sein du Conseil municipal de Chirongui.
Pierre Mouysset