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Mamoudzou

Fête de la Science – « Réveil climatique » : « Il va faire plus chaud, et après ?! »

C’est dans un village des Sciences peu peuplé de la place de la République qu’était donné le lancement de la 31ème édition de la fête de la Science. Il devrait se garnir dès ce lundi avec en parallèle un programme scolaire musclé. Il se tiendra pendant une semaine et jusqu’au 17 novembre.

Cette fête sent décidément la bonne humeur, on ne voit des scientifiques que le côté ludique du quotidien, et les apprentis chercheurs font part au grand public de leurs petites trouvailles, comme c’était le cas l’année dernière avec la création par un groupe de lycéens de sachet en fibres de bananier.

Cette année, peu de stands lors du lancement, mais ceux qui avaient répondu présent avaient de quoi donner du grain à moudre. Le thème « Réveil climatique », sonne comme un écho à la COP27, avec une belle affiche réaliste sur un compte à rebours de la fonte glaciaire, et moins de deux heures pour réagir.

Pour illustrer l’urgence, le représentant du rectorat, Thierry Denoyelle, Directeur académique adjoint des services de l’éducation nationale, ébranlait les consciences : « Je suis un assassin, nous sommes tous des assassins de notre planète en laissant notamment des mégots ou des canettes par terre. Nos petits enfants nous le reprocherons ». En poste à Mayotte de 2006 à 2010, il le dit, « de ce côté, Mayotte ne s’est pas améliorée ».

Pour Hadidja Mbae, il faut être meilleurs pour que les enfants répercutent à leurs parents

Sortir des poncifs

Pour Hadidja Mbae, Inspectrice Pédagogique régionale de Science, l’analyse doit s’affiner à Mayotte : « Ici, ce sont les élèves qui expliquent le changement de climat aux parents, donc le message doit être à la fois clair et en poussant le raisonnement jusqu’au bout. Quand on dit aux enfants que les plastiques qu’on jette peuvent être mangé par les tortues ou les poissons ils répondent, ‘oui, et alors ?!’. Quand on explique l’élévation des températures aux parents, ils répondent, ‘il va faire un peu plus chaud, et après ?!’ » Une interpellation qui incite à aller jusqu’au bout du raisonnement, « il faut expliquer que le poisson en mangeant du plastique a un impact sur toute la chaine alimentaire, jusque dans son assiette. » Idem pour la hausse des températures en reliant la montée des eaux qu’elle induit avec certaines routes de l’île qui commencent à être bloquées lors des grandes marées.

« Quand je vois que les actions d’éducation au développement durable se traduisent toujours par des ramassages de déchets, je dis ‘stop !’ Il faut faire un effort de pédagogie et faire passer des messages. C’est pourquoi nous préférons faire intervenir des associations comme Ulalusa qui valorise les canettes par fusion. » Un changement de méthode dont elle voit les bénéfices, « deux ans après qu’on l’ait initiée, je vois que les élèves arrivent à expliquer avec leurs mots, le message peut donc être passé auprès des parents. » Et parce qu’il faut commencer dès le plus jeune âge, les tout petits vont être éduqués, « l’inspecteur des sciences va travailler avec le premier degré. »

Le laboratoire de Phytochimie propose des exercices olphactifs

On nous promettait des évènements gratuits, inventifs et ludiques, ce fut le cas. Notamment avec la fontaine de Heron (du nom de l’ingénieur et mathématicien grec Héron d’Alexandrie du 1er siècle après J-C) de l’association Yes We Can Nette, construite en matériaux de récupération, qui reprend les principes des vases communicants, ainsi que celui des notions de pression ou de la statique des fluides. A côté, sur une table, des récipients en plastique légers trouvent une deuxième vie sous forme de voitures autopropulsées par un élastique. « On veut montrer aux enfants qu’il est possible de fabriquer des jouets à partir de déchets », explique Nadia Bernier, directrice de l’association.

Des professeurs Plumbago

Sous les pancartes du Pôle d’Excellence rural de Coconi, ils sont deux à avoir le regard qui pétille à la Jamy (« C’est pas sorcier »), parrain national de la Fête de la Sciences, comme s’ils venaient de faire une bonne blague. Autour des deux chercheurs du Laboratoire de Phytochimie, des récipients aux liquides colorés, « nous menons des expériences didactiques sur les essences des plantes. » On préfère ne pas imaginer leur profil de leurs cuisines… « On a fait macérer depuis quelques jours des plantes différentes dans de l’huile », enfermé dans des pipettes, les essences s’offrent aux nez des curieux, charge à eux de reconnaître qui du citron, qui de l’ylang, a libéré son parfum. Un plumbago a donné sa couleur bleue à une préparation, « et vous allez voir, dès que je vais faire varier le Ph, par exemple avec du vinaigre blanc, ça va modifier la couleur, donc la structure des molécules », nous démontre-t-il, schéma en nid d’abeilles à l’appui. Sur parole.

Des jouets à faire soi-même

Les démonstrations n’ont pas toujours de liens direct avec le thème de l’année, quoique, « nous sommes un laboratoire de chimie, mais notre objectif est de nous affranchir de tous les solvants, de faire de l’extraction verte, il faut apprendre à fonctionner autrement ».

Laissez guider vos pas vers ce village place du comité du Tourisme à Mamoudzou, où les scientifiques sauront vous captiver par l’émotion, pour 6 jours d’évènements, et les établissements scolaires ont un programme fourni, qui va de maquettes de démonstration sur les énergies renouvelables (éoliennes, géothermie, hydraulique et solaire) au lycée Bamana, des effets de la perte d’habitats et du changement climatique sur les chauves-souris de Mayotte au lycée de Kahani, à l’érosion naturelle, déforestation et érosion, dérèglement climatique, au lycée du Nord de Mtsangadoua.

Anne Perzo-Lafond

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