Sous-valorisation des déchets : le Conseil de la Culture et de l’Environnement s’en mêle

Quatre porteurs de projets affinent leurs financements pour se lancer dans le recyclage chacun dans leur domaine : alu, déchets verts, BTP ou gros équipements électroménagers. Avec pour tous une difficulté principale : s’approvisionner en déchets ! Un comble à Mayotte.

Fatiguée de voir les déchets joncher les bas côtés, les plages et les lits des rivières, la Commission environnement du Conseil de la Culture, de l’Education et de l’Environnement (CCEE), l’autre instance consultative du Département avec le CESEM, a décidé de s’autosaisir sur les initiatives de valorisation des déchets. « Le recyclage est défectueux du côté des déchets ménagers, et inexistant sur les déchets du BTP et les déchets verts », constate Michel Charpentier, président de la commission en plus de l’être pour l’association des Naturalistes.

Le SIDEVAM 976 a annoncé la mise en place de déchetteries mobiles sur l’île, qui concernent notamment les déchets verts, « ça commence à venir, mais il y a un vaste chantier à mener », commente-t-il.

Le CCEE se pose alors en lanceur d’alerte, « il faut arrêter de jeter dans la nature, et il faut recycler beaucoup plus si on ne veut pas saturer l’ISDND de Dzoumogne ». Le centre d’enfouissement des déchets ultimes et non dangereux se remplit en effet à une allure inquiétante, nous avait signalé le SIDEVAM. Pour recycler, il faut des recycleurs. Ils existent, quatre d’entre eux ont été auditionnés par le CCEE.

Banc en alu confectionné par Pedro Garcia

La fonderie Ulalusa, « Fondre », en shimaore, de Pedro Garcia, auquel nous avions consacré un article, attend toujours pour passer d’un stade expérimental à industriel de pouvoir collecter un volume suffisant de canettes. Les 5 tonnes récupérés de ‘Yes We Canette’, or il faut 180 tonnes pour se professionnaliser, nous avait expliqué le porteur de projet, « après fusion des 180 tonnes de canettes, nous obtenons 150 tonnes net de métal. Au prix moyen de 2 euros le kilo d’aluminium, nous pourrions l’exporter et dégager un chiffre d’affaires de 300.000 euros. » Il faut pour cela contractualiser avec Citeo qui exporte les canettes compressées.

Une économie circulaire en attente de boucler la boucle

Sur le segment des déchets du BTP, tout reste à faire, « ils sont stockés mais pas retraités, alors que c’est obligatoire, rappelle Michel Charpentier, le porteur de projet est en cours d’achat d’une machine pour concasser et réutiliser ensuite, par exemple pour faire des routes. »

Le troisième entrepreneur, Abdallah Ibrahim, est plus avancé. C’est l’air assuré que ce pépiniériste, Pot Concept, nous explique avoir acheté un broyeur de végétaux, « l’objectif est d’arriver à 7.000 tonnes de déchets composables. Il manque encore le process ». C’est à dire la dalle en béton avec système d’aération forcée, « et l’investissement dans la logistique, les camions de ramassage et de manutention ». Le financement est bouclé, à 70% Ademe, de la défiscalisation et un accompagnement bancaire. Reste pour lui aussi l’essentiel : comment s’approvisionner en déchets. « Le SIDEVAM a accordé une DSP à la STAR sur ce secteur des déchets verts, mais contrairement à eux, nos déchets seront normés, prêts à être utilisés. » C’est son entreprise qui s’est chargée des déchets verts du stade de Tsoundzou, « ils sont prêts à être réutilisés ».

Ibrahim Oili Ali et Naimoudine Ibrahim (CCEE)

Le 4ème intervenant s’attaque aux volumineux D3E avec son entreprise Soa en cours de création à Bandraboua. Suivi par la BGE, Ibrahim Oili Ali est en pleine démarche d’ouverture de compte professionnel, « dès octobre-novembre, je devrais pouvoir commencer à reconditionner des appareils. » Idem, il est en quête de matière première, « je suis en train de négocier avec le SIDEVAM et Ecosytsème pour avoir l’autorisation de récupérer des déchets ». On le souhaite fort, alors que frigos et gazinières sont éparpillés dans la nature et attendent que ces organismes fortement subventionnés fassent le job. En attendant, histoire de se faire de la trésorerie, il commence le dépannage* à domicile d’appareils électroménagers et climatiseurs, fort de son Bac Pro en électronique et de son expérience de 5 ans chez Boulanger Bordeaux dans ce domaine.

Il doit encore acheter son véhicule, en apport personnel et micro-crédit Adie, alors que le reconditionnement va demander un gros investissement de 50.000 euros, pour lesquels il ira chercher un prêt bancaire.

Le CCE avait réuni les médias pour que ces initiatives soient connues de l’opinion publique et des élus du CD. Et puissent commencer à engranger dans leurs machines des déchets qui n’ont rien à faire à Dzoumogne.

Anne Perzo-Lafond

* SOA : 0639 25 16 94

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