Plusieurs automobilistes qui empruntaient l’axe Hajangua-Mamoudzou ce samedi soir, ont été caillassés par une foule de jeunes à hauteur de Passamainty. Des véhicules ont été incendiés, « il faut faire demi-tour ! », se lançaient-ils les uns aux autres. Impossible de rallier Mamoudzou en venant du Sud. La circulation était alors perturbée pendant environ 3 heures, au cours desquelles les forces de l’ordre tentaient de juguler cette violence qui se déplaçait sur différentes portions de la route. Pendant ce temps, les usagers de la route attendaient que la voie se libère.
Contacté dimanche par nos soins, Laurent Simonin, Directeur Territorial de la Police Nationale (DTPN), évoquait une soixantaine de jeunes impliqués : « Les incidents ont duré de 20h à 23h en trois phases entrecoupées d’accalmies. Il n’y a pas eu de blessés, mais des dégâts sur une douzaine de voitures ».
Dans la journée de dimanche, deux jeunes étaient interpellés et placés en garde à vue, « l’un pour avoir vraisemblablement lancé des pierres, et l’autre, suspecté d’avoir initié un incendie ».
A ses côtés, le maire Ambdilwahedou Soumaila et le capitaine Chamassi, pour se rendre ce même dimanche dans le village de Passamainty. Rompant avec la fâcheuse tendance qui sévissait chez les élus auparavant de ne pas se déplacer auprès des populations en souffrance. Or, c’est au contact qu’on se saisit des problématiques. C’est en tout cas ce qui transparait lorsqu’on interroge le maire : « Lors de notre arrivée, nous avons convaincu les victimes qui ont eu affaire à ces délinquants, de déposer plainte. Or, les habitants ont souvent peur des représailles. Cette fois, ils ont eu le courage de dénoncer ce qui a permis à la police de mener les premières interpellations. Ensuite, nous avons convenu de créer un comité de village ».
Démonstration civile et civique d’autorité
Montrer que les adultes sont là, c’est un des challenges du territoire, « lorsque les barrages enflammés ont été érigés, six personnes sont intervenues pour enlever les poubelles à Passamainty », salue le maire.
Le village est le théâtre d’affrontements entre deux quartiers, « les deux rives de Passamainty, Nyambotiti et Nyambobole. Nous revenons donc dimanche prochain pour comprendre l’origine de ces violences ». Idem, l’équipe municipale et la police se rendront à Vahibe et à Tsoundzou, « puis nous rassemblerons tous les jeunes pour avoir une discussion concertée, et en même temps, accompagner les personnes qui ont vu leurs biens saccagés ».
Parmi les interpellations, un jeune suspecté d’avoir incendié des véhicules. « En nous rendant sur place, nous nous sommes aperçus que c’était avec du pétrole lampant, ils s’en servent comme une arme par destination ». Une constatation qui va en entrainer une autre, celle de mener une réflexion sur les modalités de vente de cet hydrocarbure : « Nous allons voir comment interdire la vente du pétrole lampant aux jeunes qui s’en fournissent dans des bouteilles de 5 litres auprès de ceux qui l’achètent en station par bidons entiers, et les revendent ensuite au détail. » Ambdilwahedou rappelle que ce ne serait pas une première, « la vente de pétrole lampant est déjà interdite dans plusieurs stations Total de l’île, seules Pamandzi, Kawéni et Tsoundzou en délivrent. Il faut mettre en place un système qui limite l’accès aux seuls professionnels comme les pêcheurs par exemple, qui en ont besoin pour leurs lampes ».
L’information que le maire veut faire passer auprès de la population, c’est de reprendre le dessus, « nous allons suggérer plusieurs systèmes pour que les habitants s’informent mutuellement, pourquoi pas à l’aide de sifflets qui pourraient permettre de communiquer rapidement, mettre les agresseurs en fuite et montrer aux jeunes que la population n’a plus peur. »
Les réunions qui se tiennent à ce sujet sont une sorte de préambule de ce qui avait été annoncé par le maire lors de sa présentation du plan « Mamoudzou 2030 ». Plusieurs réunions publique sont en effet à l’affiche, qui commencent les 7 et 8 septembre par Tsoundzou I et II, et se poursuivent les jours suivants à Passamainty, Vahibé, M’tsapéré, Kawéni, les Hauts Vallons, Cavani, pour se clore le 21 septembre par Mamoudzou. « Le projet de territoire qui y sera exposé fixe les orientations stratégiques pour les 10 prochaines années, ainsi qu’un plan d’actions pour le développement du territoire dans un diagnostic partagé avec la population », rapporte encore le maire. Les habitants sont priés de venir se rendre en nombre à ces rencontres.
Anne Perzo-Lafond