La découverte du milieu marin et de la biodiversité est l’une des sept missions du Parc naturel marin de Mayotte. Avec près de 69 000 km² de superficie, la protection de l’écosystème qui s’y développe ne peut faire l’économie de la compréhension des cycles de vie des espèces évoluant dans ses eaux. Comprendre, c’est avant tout prendre conscience.
Parmi les 2 300 espèces animales connues évoluant dans le lagon, « il y a des mammifères marins dont les grandes caractéristiques sont, entre autres, des poumons pour respirer et les femelles ont des mamelles pour allaiter les petits », renseigne Annabelle Djeribi, directrice déléguée adjointe et cheffe du service opérations. Les estimations portent à 24 le nombre d’espèces de mammifères marins, lesquelles sont réparties en deux grandes familles « les cétacés avec les dauphins et les baleines et les siréniens avec les dugongs », précise la directrice déléguée adjointe.
Les saison des baleines à Mayotte
Si certaines de ces espèces sont résidentes ou semi-résidentes dans le lagon, comme le grand dauphin indopacifique, il y en a d’autres, telles que la baleine à bosse, qui ne sont présentes qu’une certaine partie de l’année. Ces espèces sont alors dites migratoires. « Le site de Mayotte est particulièrement intéressant car il y a beaucoup de baleines avec leurs baleineaux », fait savoir Naomi Scholten, chargée de mission Ecosystèmes marins. Elle poursuit avec les raisons pouvant expliquer leur présence dans les eaux de Mayotte en cette période de l’année : « durant l’été austral, les baleines à bosse évoluent dans les eaux froides de l’Antarctique pour se nourrir de krill. Lorsque ses eaux se refroidissent trop, elles se déplacent vers des endroits plus chauds dans l’océan Indien. Un voyage de plus de 2 mois avec près de 5000 km à parcourir, sans manger ».
Une prouesse d’autant plus prodigieuse que le voyage inverse se réalise lui aussi sans s’alimenter, ou trèspeu », s’émerveille Annabelle Djeribi. « A Mayotte, les individus observés vont essayer de se reproduire, les femelles vont mettre bas. Pour les baleineaux, des eaux plus chaudes leur évitent de perdre trop de graisses », abonde Naomi Scholten. Mais d’autres hypothèses peuvent expliquer cette migration telle que « la présence de prédateurs plus importants dans les eaux froides », poursuit-elle.
Des techniques d’approches réglementées
Au regard des activités énergivores réalisées par les baleines, sachant que les individus ne s’alimentent pas durant cette période, le Parc marin veille scrupuleusement aux respects de la réglementation en lien avec les techniques d’approche. « Si on arrive trop brusquement, on peut stresser l’animal et changer son comportement en arrêtant son activité du moment », explique Annabelle, avant d’ajouter « cette perturbation va créer une dépense d’énergie pour l’animal qui, à la longue, s’affaiblit ». Puis abonde Naomi « si on s’approche trop près de la baleine, il y a plus de risque pour qu’elle s’échappe ».
Une situation préjudiciable qui peut être évitée en respectant certaines consignes dont le non-respect entraîne inévitablement une sanction. « Pour tous les mammifères marin, la distance d’observation c’est entre 300 et 100 mètres minimum avec une vitesse réduite à 5 nœuds et pas plus de deux navires dans la zone mais cela s’applique aussi aux jets skis, aux plongeurs etc. », informe Donatien Pelourdeau, agent de médiation en mer. « L’objectif est vraiment d’avoir une approche progressive. On se cale par rapport au rythme de l’animal, ce n’est pas l’inverse. S’il y a un changement brutal de comportement, on ne le course pas. En d’autres termes, s’il ne veut pas de nous, il ne faut pas insister », note l’agent de médiation.
Observation et patience sont donc les maîtres mots pour espérer apercevoir l’animal.
Le non-respect des consignes est susceptible d’entraîner des sanctions
Et en cas d’infraction flagrante quels sont les risques encourus ? « Des inspecteurs assermentés sont en mesure de sanctionner les contrevenants. Les amendes vont de 750 euros pour une personne physique à 3 500 euros pour une personne morale », détaille Annabelle Djeribi. Néanmoins, tient-elle à préciser, « à ce stade, c’est un aveu d’échec car le rôle du Parc marin n’est pas d’arriver à cette extrémité compte tenu de notre travail de prévention et de sensibilisation », concède-t-elle, avant de conclure, « il est important de respecter le monde vivant. Respecter, c’est laisser le choix aux animaux d’accepter notre observation ou non. Il est essentiel que les gens comprennent que les mammifères marins ont une vie complète comme se reproduire, se reposer, s’alimenter ».
Pierre Mouysset