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Signature du contrat de progrès du SMEAM : plus de pénuries à l’horizon 2026 ?

Parmi les dernières séquences de la visite à Mayotte de Jean-François Carenco, l'on retiendra la signature du contrat de progrès du SMEAM. Une mutualisation des efforts qui permet une visibilité aussi bien financière que structurelle sur l’avenir des travaux menés sur le territoire. Vers une fin de la précarité hydrique mahoraise à l’horizon 2025 ?

« Depuis 2016 nous avons une crise de l’eau (…) Nous avons pour les dix prochaines années les enjeux de maintenir la permanence de la consommation, sa qualité, et maintenir le prix de l’eau » déclarait ce mardi Ibrahim Aboubacar, directeur Général des Services du Syndicat mixte d’Eau et d’Assainissement de Mayotte, récemment renommé Les Eaux de Mayotte. Une entrée en matière simple et sans surprise, la proposition quasi mathématique d’un problème auquel la signature du contrat de progrès – raison d’être de la présence du ministre Carenco- devrait remédier.

« On est sur le fil de l’eau »

Si c’est au compte-goutte que la population mahoraise mesure ses espoirs d’avoir un jour un accès illimité et sans restriction à l’eau potable, l’heure semble désormais à l’optimisme. « Beaucoup d’étapes ont été franchies pour aboutir aux résultats que nous nous proposons d’acter aujourd’hui » annonce ainsi Fahardine Ahamada, président du SMEAM. Il aura fallu «  en ce qui concerne le syndicat, d’abord un long et patient travail de transparence sur la réalité de la situation afin de mettre en confiance les partenaires ici présents dans nos capacités à nous engager. Plusieurs audits auront été nécessaires, nous y avons consenti ».

Jean-François Carenco et Fahardine Ahamada

Enfin, après un premier contrat ralenti par les années Covid, le bilan a été fait. Et des cendres de ce contrat sans guère de progrès, un autre est né, lequel aura « permis de tirer des leçons utiles sur la gouvernance ». Toutefois, « il aura fallu au préalable conduire un travail de redressement de la structure. Il est salué. Il doit se poursuivre et il se poursuivra et j’y veillerai personnellement Il aura fallu solder ou relancer toute une série d’opérations qui s’étaient enlisées en l’état à la suite de la crise traversée par le syndicat en 2018 jusqu’en 2020 ». Les fantômes de l’administration Bavi ont la vie dure, et les immersions de la Cour des Comptes n’auront pas facilité la tâche aux nouveaux élus.
Néanmoins pour le président Fahardine, « aujourd’hui s’ouvre une nouvelle étape. Mon objectif et celui de mes collègues élus depuis 2020, c’est qu’à l’issu de ce contrat de progrès 2022-2026 il n’y ait plus de pénurie d’eau pour la population mahoraise ».
Néanmoins pour le DGS du SMEAM, « on est sur le fil de l’eau ». Et face aux chiffres, le constat est flagrant.

Quelques chiffres

La production actuelle, selon les chiffres communiqués par Ibrahim Aboubacar, s’élève au maximum à 39 000 m3 par jour au travers des ouvrages existant. Et celui-ci de citer les deux retenues collinaires, les six unités de potabilisation, les 25 forages et plus de 800 km de canalisations. La production se divise ainsi à hauteur de 6% pour le dessalement, 32% pour les forages et 70% pour les eaux de surface. Pas moins de 48 000 abonnés, dont 94% d’abonnés domestiques et 6% d’abonnés non domestiques, une centaine de bornes fontaine (30% de la population n’a pas accès à l’eau courante). Enfin, la consommation s’élève en moyenne à 80L par jour et par habitant, contre 120L en moyenne nationale.
Des chiffres qui en disent long, d’autant plus si on y appose ceux des coupures et autres tours d’eaux, planifiés ou non. D’où l’intérêt de ce contrat de progrès, comme l’explique Ahamada Haribou, directeur général adjoint du SMEAM.

Ahamada Haribou, directeur général adjoint au SMEAM

« On a axé ce contrat sur les grands chantiers structurants pour le développement de l’eau à Mayotte de manière générale (…) On a envisagé les évolutions qui sont attendues à l’horizon 2032. L’idée c’est aussi d’anticiper sur les projections futures et ne pas uniquement se contenter de l’urgence du moment ». Le contrat de progrès est ainsi présenté en « une sorte de guide qui va nous permettre dans les 5-6 ans à venir de réaliser, et vu le retard qui a été pris, puisque si on est dans des pénuries d’eau à Mayotte c’est parce qu’il y a eu des infrastructures qui ne sont pas là, on va essayer de rattraper ce retard ».

Fin des coupures d’eau : « On nous a dit en 2025, donc attendons 2025 »

411 millions, c’est le budget annoncé pour ce contrat de progrès multi-partenarial. Sidevam, Feder, autofinancement du syndicat des eaux, OFB, Banque des Territoires, AFD… Les acteurs sont multiples. Mais même si selon Jean-François Carenco, il y a « 100 millions d’emprunt et 187 millions déjà acquis », « il nous manque 100 millions qu’on va essayer de trouver tranquillement, on a le temps, ça ne va pas se faire en un an, c’est un travail de 5 ans (…)  Je considère à ce stade que pendant deux trois ans je ne m’en occupe plus. Le président (ndlr Fahardine Ahamada) fait le boulot ». Un détachement qui semble propre à notre nouveau ministre délégué chargé des Outre-mer qui suscite tout de même quelques interrogations légitimes.

Jean-François Carenco et Olivier Kremer

Parmi celles-ci, une question semble véritablement légitime : depuis la promesse du préfet Jean-François Colombet l’an dernier de voir les coupures d’eau disparaître, grâce au Pacte de l’eau, à l’horizon 2025,

Interrogé par nos soins sur ces échéances préalablement promises, le ministre Carenco perdra temporairement de sa bonhomie habituelle pour figer sur ses traits bienfaisants l’expression d’une conviction aveugle : « On vous a promis 2025 ? Attendez 2025 ». Certes. Toutefois face aux effets d’annonces, la population mahoraise reste sceptique, mais garde l’eau à la bouche.

Mathieu Janvier

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