Cette analyse de l’Institut national de la statistique qui se base sur l’étude des quatre départements d’outre-mer (DOM) dits « historiques », à savoir la Guadeloupe, la Martinique, La Réunion et la Guyane, révèle que « la grande pauvreté est 5 à 15 fois plus fréquente dans les départements d’outre-mer qu’en France métropolitaine ». Dit autrement, près de 18 % de ces Français résident dans ces DOM alors même que ces territoires ne représentent pourtant que 3 % de la population française.
Une pauvreté bien plus prégnante dans les DOM
Ce phénomène se caractérise « comme un cumul de très faibles revenus et de privation matérielle et sociale sévère » rappelle l’institut. Alors qu’en France métropolitaine, en 2018, la médiane des niveaux de vie de ces personnes vivant en logement ordinaire s’établit à moins de 790 euros, à La Réunion elle est inférieure à 690 euros et, en Guyane, le constat est sans appel avec moins de 470 euros. Les familles monoparentales sont fortement touchées par ce phénomène. Alors qu’en France métropolitaine, 5 % de ces familles sont touchées par cette pauvreté extrême, la proportion s’élève à 17 % en Guadeloupe et jusqu’à 32 % en Guyane.
En matière de privation matérielle et sociale, la Guyane, précise l’Insee « se distingue dans la mesure où près de la moitié des personnes en situation de grande pauvreté cumulent plus de 10 privations sur les 13 observées ». Ces privations atteignent des besoins fondamentaux tels que « ne pas pouvoir faire un repas contenant des protéines au moins tous les deux jours » ou encore « l’impossibilité d’acheter des vêtements neufs ». Sur ce dernier point, 6 à 8 personnes sur 10 dans les DOM sont concernés.
Chômeurs et retraités plus fréquemment touchés
Concernant l’île au lagon, l’Insee concède que « faute de pouvoir mesurer les privations matérielles et sociales, la grande pauvreté ne peut être appréciée de la même façon ». Néanmoins, l’institut précise qu’elle est très répandue : « 194 000 personnes vivent avec un niveau de vie inférieur à 50 % de la médiane nationale, soit 74 % de la population mahoraise ». Un constat à mettre en parallèle avec une autre étude qui révélait que Mayotte est « la région européenne au plus fort taux de chômage ».
Or, la grande pauvreté est en lien avec un marché du travail difficile. Si en France 9 % des chômeurs sont dans cette situation, la proportion s’élève à 22 % en Martinique et quasiment le double en Guyane. Même constat pour les retraités, leur proportion se situe à 9 % en Martinique, 15 % en Guyane, contre 1 % en métropole. Alors que le projet de loi de finances 2023 sera présenté en septembre à l’Assemblée nationale, ces chiffres seront vraisemblablement des arguments de poids afin de nourrir le débat et apporter des solutions concrètes pour essayer de résorber cette situation.
Pierre Mouysset