On est loin des quelques artistes exposés il y a quelques années par Zangoma, association mue par l’infaillible couple Fatima Ousseni/Denis Balthazar. Ils sont nombreux, peintres ou photographes, à avoir répondu présents. Et ce n’est pas toujours évident comme le rappelait Denis Balthazar, « tout est dans le titre ‘Les artistes s’exposent’, c’est à dire eux-mêmes, et au regard des autres ».
Un bonheur de voir la somme toute récente MJC de Kawéni qui semblait déjà laissée à l’abandon, nettoyée de ses tags et graffitis à l’intérieur, embellie pour accueillir le public. « L’objectif c’est de capter le plus possible de monde pour que les jeunes soient rassurés sur leurs pratiques artistiques, il faut se lancer », incitait Denis Balthazar.
Et beaucoup y ont plongé avec bonheur. C’est le cas de Saïd Ali Sola, dont on ne peut manquer les deux immenses tableaux. De loin, on jurerait du pointillisme, qui s’avère en réalité être une succession de pixels peints à la main. Nous nous approchons avec lui du tableau de la jeune fille dont le regard se rapproche follement de celui de la photo de Une du National Geographic, « l’Afghane aux yeux verts » : « C’est la juxtaposition de deux personnes différentes. J’utilise 4 supports avant l’œuvre finale, une esquisse, puis en peignant, je détermine quelles sont les 5 couleurs que je vais utiliser. Je trace alors des carrés de 5mm sur la toile et je la pixellise. » Et à 26 ans, il a déjà sous le coude 400 tableaux ! Il a suivi des études à la faculté d’arts de Rennes, puis a décroché un master de littérature. Et s’est donc lancé dans l’écriture. « J’aimerais vivre de mon art, mais pour l’instant, je suis professeur d’arts plastiques ».
La vie en « Afrorose »
Comme les écrivains, certains artistes peintres ont besoin de vider leur désarroi, de coucher sur la toile la violence du quotidien à Mayotte, ainsi le naufrage de kwassa de Béatrice Edouard ou « Bass Ivo » de Boaz. D’autres en revanche nous offrent des éclats de couleurs, comme le triptyque « Afrorose » d’Okra.
Et les artistes ont décidé de faire une toilette du bâtiment en façade. Ainsi, la moue d’un petit garçon dominera désormais la foule des curieux, c’est l’œuvre du graffeur Socrone, qui poursuit, pinceau à la main et échafaudage à poste.
Pour le vernissage le préfet Thierry Suquet avait répondu présent ainsi que la toujours très présente vice-présidente du CD Zouhouria Mouayad Ben, chargée de la Culture et des Sports, Hugues Makengo, directeur de la PJJ, le rectorat, Aminat Hariti, VP du SMEAM, Mlézi Maore, etc., et bien sûr la mairie de Mamoudzou, co-organisateur. « Les artistes s’exposent » jusqu’au 27 mars 2022.
Zangoma reprend donc le rythme de ses expositions, avec une quête de Fatima Ousseni aux institutionnels présents, « il faudrait ouvrir à Mayotte un musée d’arts contemporains ! »
Anne Perzo-Lafond
Liste des artistes de l’exposition à la MJC de Kawéni 17 mars 2022
1. Bad COFY
2. BOAZ
3. Baba MBAYE
4. BALTHAZAR
5. CONFLIT
6. O K R A (Nathalie Bordier)
7. Sylvie PIACENTINO
8. Saïd ALI SOLA
9. Sylvie PIACENTINO
10. Yasmine THANY
11. Daniel MADANI
12. Nayl MTOUBANI
13. Jean Van der HOEVEN (Papajan)
14. Asmir HASSANE ALI
15. Béatrice EDOUAR
16. Emmanuel COLINET (Mégot, graffeur)
17. ADAÏNE
18. SOCROME (Graffeur)