Les faits remontent au 24 juin 2018 et avaient alors défrayé la chronique jusque dans les médias nationaux. Une opération de l’antenne GIGN de Mayotte s’était soldée par un terrible bilan pour la gendarmerie, avec deux militaires grièvement blessés.
Ces derniers intervenaient dans le village de Mnambani, sur la commune de Bandrélé, dans le cadre d’un mandat d’amener visant Abdou Mirhane, alias M’Combé, recherché par le juge d’instruction pour des faits de vol à main armée. Les militaires ont alors monté deux équipes pour surprendre et embarquer le braqueur présumé. Mais l’opération s’est mal passée.
Lorsque la première équipe, composée de deux gendarmes, a repéré leur cible, les communications téléphoniques étaient mauvaises, et la deuxième équipe a pris du retard pour les rejoindre. Le suspect, malgré un tir de taser, s’est violemment débattu, et a sorti un couteau alors que les deux gendarmes tentaient de le maîtriser. Alors qu’il les menaçait, deux autres individus sont arrivés pour le libérer : Soihan Soibouran, dit Pano, et Assani Mirhane, le frère d’Abdou Mirhane. Dans la cohue, les deux gendarmes roulent au sol et sont tabassés par les trois agresseurs, qui usent de toutes les armes à leur portée, notamment des pierres et une branche de baobab. L’un des militaires perd connaissance, l’autre saigne abondamment de la tête, et tente de s’éloigner en rampant, mais les coups continuent à pleuvoir, jusqu’à l’arrivée de leurs collègues qui leur sauvent la vie malgré de nouveaux jets de pierres. Le gendarme le plus gravement atteint est admis au dispensaire de Chirongui, puis évasané à Saint-Denis où il est pris en charge en neurochirurgie. Deux mois plus tard, il y retournera pour une nouvelle opération suite à des complications.
Trois ans après les faits, leur état de santé n’est « toujours pas stabilisé » a pointé l’avocate générale Denise Lacroix, qui a requis 20 ans de réclusion à l’encontre des trois accusés.
Interdiction définitive du territoire français
Les faits étaient globalement reconnus. Lors de l’enquête, les trois accusés ont reconnus qu’ils étaient ivres et qu’ils avaient fumé du bangué le jour de l’opération de gendarmerie, et Pano s’est dit « prêt à tout » pour défendre son ami M’Combé. Ces derniers niaient cependant avoir eu connaissance de la qualité de gendarmes des deux militaires qui intervenaient en civil mais qui s’étaient dûment identifiés. C’est d’ailleurs parce qu’ils étaient « incognito », leur arme de service dissimulée dans leurs sacs à dos, qu’ils n’ont pu se défendre une fois le taser utilisé et dépassés par le nombre d’assaillants. En effet, l’usage du taser avait amené la plupart des personnes attroupées à s’éloigner de la scène, ayant pris conscience qu’il s’agissait bien de la gendarmerie, mais quatre ou cinq individus ont continuer le lynchage, dont les trois accusés.
D’abord poursuivis pour violences aggravées, ils ont rapidement été mis en cause pour tentative d’homicide, des témoins ayant entendu Assani et Pano crier en shimaore » Si vous ne relâchez pas Mcombé, on va vous tuer avec les pierres »
Reconnus tous les trois coupables de tentative de meurtre, ils encouraient la perpétuité. La Cour d’Assises les a condamnés à respectivement 18 ans de réclusion pour Assani Bourhane et 20 ans de réclusion pour les deux autres, aux antécédents plus lourds. Tous ont en outre une interdiction définitive du territoire français, qui s’appliquera dès leur sortie de détention.
YD