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Rentrée scolaire : les propositions du recteur aux embolies des écoles

C’est dans une école 100% en rotation que le recteur Jacques Mikulovic a fait sa rentrée. Avec 117.226 élèves cette année dans l'académie, dont 5.000 supplémentaires tous niveaux confondus, il se démène pour combler les failles.

Il fait toujours frais les jours de rentrée scolaire où en plus du lever matinal, avec forte couverture nuageuse ce lundi, s’ajoute souvent pour les très jeunes enfants l’angoisse de quitter le cocon familial pour un espace inconnu, l’école. Ce 26 août n’a pas dérogé, ce fut cris et chougnements dans la plupart des maternelles de l’île. Dans une petite classe de Majikavo Lamir, certaines mamans sont restées, leur enfant de 3 ans pleurant toutes les larmes de leur corps sur leurs genoux, pendant que dans un coin de classe, d’autres découvraient avec bonheur, les jeux tout beaux tout propres qui donnaient le « la » à cette année scolaire.

Certains ont eu la chance d’être chouchoutés par des ATSEM* de luxe en la personne du recteur Jacques Mikulovic et du maire de Koungou, l’occasion pour nous d’évoquer les enjeux de cette nouvelle rentrée.

Premier pas à l’école en ce jour de rentrée scolaire

Les chiffres ne dérogent pas, le nombre d’inscrits est en hausse à Mayotte, renouvelant le casse-tête de chaque rentrée : trouver des salles de classe dans le primaire, et des enseignants dans le secondaire. « Nous avons 3.000 élèves supplémentaires dans le 1er degré et 2.000 supplémentaires dans le second degré, ce qui a impliqué de créer 350 postes dans l’académie de Mayotte, 190 dans le 1er degré, et 160 dans le second », égrène Thierry Denoyelle, Directeur Académique Adjoint des Services de l’Éducation Nationale (DAASEN).

Pour le 1er degré, la difficulté tient toujours dans le déficit de salles de classe, « nous avons des enseignants disponibles pour encadrer toutes les classes de primaire, il nous faut des écoles », une capacité qu’a permise la création en 2021 à Mayotte du Parcours Préparatoire au Professorat des Écoles (PPPE ou 3PE), l’équivalent d’une classe préparatoire au concours des MEEF, les Métiers de l’Enseignement, de l’Éducation et de la Formation. L’enseignante contractuelle de la classe de moyenne section visitée par le recteur, veut se professionnaliser après sa licence en Droit et 4 ans d’enseignement, « j’espère décrocher le concours pour intégrer la formation à l’université de Dembéni. »

En rotation sans scolariser 100% des Primaires

L’enjeu est quasiment hors d’atteinte à Mayotte où les parents de la région, les Comores, Madagascar et de plus en plus les Africains des Grands Lacs, rêvent de scolariser leurs enfants sur le territoire de 374 km2. Une mission que nous avions qualifiée d’humanitaire, et demanderait les fonds qui vont avec. Également, la décision politique de couvrir le territoire d’écoles. Les maires, tout en se sachant dans le viseur de la Chambre Régionale des Comptes, voient donc chaque année leur liste d’inscriptions s’allonger, ne pouvant accepter tous ces enfants arrivés des îles voisines de Mayotte qui, contrairement à elle, n’ont pas voulu rester françaises. Mathématiquement, il y a toujours plus d’élèves déscolarisés donc.

Les plus grands ont déjà leurs habitudes

« Étant donné les 10.000 naissances par an, nous devrions avoir 30.000 élèves en maternelle de 3 à 6 ans, or, nous n’en avons que 25.000, il en manque donc 5.000 », décompte le DAASEN. Une dérogation provisoire avait été accordée à Mayotte lors de la décision de l’ancien ministre de l’Éducation nationale, J-M Blanquer, de rendre la scolarité obligatoire dès 3 ans, mais elle reste d’actualité nous explique le recteur Jacques Mikulovic : « Nous n’accueillons toujours que 60% des moins de 6 ans, 50% des moins de 5 ans, et 40% des 3-4 ans ».

A Koungou, commune qu’a choisi le recteur pour sa rentrée en Primaire, nous verrons pourquoi, le maire Assani Saindou Bamcolo, assure avoir davantage accueilli : « Nous avons accentué les rotations, pour éviter que trop d’enfants soient déscolarisés, et je sais qu’au cours de cette semaine, nous allons encore avoir de nouvelles inscriptions. » L’école maternelle de Majikavo Lamir en est une illustration, « nous avons 6 salles de classes et 12 divisions », explique le directeur, une salle servant à deux classes, l’une le matin, l’autre l’après-midi.

Le DGS de la mairie, Alain Manteau, explique que les constructions scolaires se poursuivent, certaines sur les ruines de bâtiments vétustes : « Les travaux ont commencé pour une école de 24 classes à Trévani, à Kangani, ce sont des modulaires pour 15 classes, et également une prévision de modulaires sur Koropa 3. Sans oublier la sortie de terre de 4 réfectoires, à Longoni Bassin, à Koungou Plateau, à Koungou mairie et celui de Koungou Maraîcher en cours de finition. »

Poursuivre l’école « hors-les-murs »

Mais 3.000 élèves en plus, c’est 100 salles de classe supplémentaires qu’il faudrait construire sur l’ensemble des 17 communes. Donc tant que des élèves arrivent, on s’installe où on peut, « quand toutes les écoles de la commune sont en rotation, on installe des modulaires sur les parkings », explique un représentant du rectorat. Pour le DAASEN, ne faire que du quantitatif pose le problème du mode d’enseignement, « le vrai pari c’est de mettre en place un enseignement qualitatif, comment on permet à ces élèves d’apprendre au mieux. »

Cette année encore, tous les enfants n’ont pu être inscrits dans les établissements scolaires

C’est ce que cherche le recteur Jacques Mikulovic qui nous avait parlé de son idée d’allongement du temps d’apprentissage, en utilisant des structures existantes. Il nous précise les contours du projet : « Il s’agit d’avoir un temps éducatif partagé entre le temps scolaire et de périscolaire, au sein de lieux de délestage. Il s’agit de faire l’inventaire de toutes les structures qui pourraient être utilisées, la DRAJES a réalisé ce diagnostic. Il s’agit par exemple de bassins flottants ou d’espaces polyvalents où l’on pourrait déployer un écran. »

La journée d’un élève se décomposerait en trois temps : « Trois à quatre heures de savoirs fondamentaux et diversifiés, trois heures de périscolaire et un 3ème temps qui serait consacré aux langues et cultures mahoraises. La cuisine, la danse, la couture, la langue, seraient enseignées, ce temps pourrait être organisé par le Conseil départemental. » Les élèves retomberaient donc dans une semaine classique de leurs petits camarades métropolitains de 7h30-16h30 grâce à la mise à disposition de ces « lieux de délestage ». Une évolution qualitative de l’enseignement avec des dispositions originales et adaptées à Mayotte.

La commune de Koungou s’est portée volontaire pour expérimenter le dispositif qui pourrait ensuite être étendu. Cela sous-entend une formation des enseignants, qui vont à la fois retomber dans un rythme « normal » de présence scolaire et périscolaire, et qui devront proposer un contenu adapté à ces trois temps.

L’équipe du rectorat a poursuivi sa journée de rentrée par le collège de Dzoumogné, qui a pu rouvrir malgré l’incendie qui l’avait partiellement endommagé, et le LPO du même village.

Anne Perzo-Lafond

* Agent Territorial Spécialisé des Ecoles Maternelles

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