L’amphithéâtre du collège de Kwalé accueille depuis lundi des enseignants néo contractuels pour le 1er et le 2nd degré. Ils ont été recrutés par le rectorat de Mayotte et vont effectuer leur tout premier cours face à des enfants allant du primaire (1er degré) jusqu’au collège et lycée (2nd degré) avec des élèves de terminale. En tout, ils sont près de 340 néo contractuels, dont 140 pour le 1er degré et environ 200 pour le second. Selon le recteur, Jacques Mikulovic, la grande majorité des élèves de l’île aura un enseignant dans leur classe d’ici la semaine prochaine.
« Mi-juillet il ne manquait que 95 enseignants, toutes disciplines confondues, dans le secondaire sur près de 4.000, ce qui équivaut grosso modo à la situation de 2023. Aussi, tous les postes devraient être satisfaits d’ici la semaine prochaine, explique-t-il. Toutefois, nous ne pouvons pas garantir totalement à 100 % car cela dépend de certains facteurs. En effet, certains nous ont dit qu’ils viendraient mais peut-être qu’au dernier moment ils vont finalement renoncer ou ils n’auront pas trouvé de quoi se loger. Il y a aussi les arrêts maladies de dernière minute…mais je pense qu’on devrait être pas mal. Concernant le 1er degré, le problème n’est pas le nombre d’enseignants, qui est suffisant, mais le nombre de salles de classe disponibles… ».
Des recrutements au plus près des enjeux éducatifs mahorais
Comme le rappelle le recteur, l’ensemble des néo contractuels recrutés pour le 1er degré l’ont été à Mayotte ou ont fait le choix de venir s’installer dans le 101e département. « Pour le 1er degré, en plus du niveau de diplôme nécessaire pour enseigner, nous leur avons fait passer une épreuve de français et une de mathématiques, ainsi qu’un entretien au sein du rectorat. Concernant le second degré, les néo contractuels ont été recrutés en majorité en métropole par nos inspecteurs académiques avec lesquels ils ont passé des entretiens ». Jacques Mikulovic reconnait que certaines disciplines du secondaire peinent à recruter plus que d’autres des enseignants. « En Lettres et en Philosophie on est juste…En Mathématiques ça va, mais en Physique nous sommes malheureusement à la peine, ainsi que dans certaines matières d’enseignement professionnel comme la Couture par exemple ».
Aussi, cette semaine de formation a essentiellement pour but de familiariser les enseignants avec leur futur environnement, notamment savoir comment tenir une classe, faire l’appel, préparer une séance de cours, acquérir les outils et la méthodologie nécessaires pour enseigner correctement. En outre, face au succès du « mois de l’écriture » mis en place l’année dernière, Jacques Mikulovic compte renouveler l’expérience au mois de septembre. « Nous avions demandé à chaque professeur, qu’elle que soit sa discipline, de consacrer tous les jours pendant un mois 15 minutes pour un temps de lecture et/ou d’écriture. À Mayotte il y a une difficulté dans la maitrise des savoirs fondamentaux…d’où la nécessité de consacrer davantage de temps à l’acquisition des savoirs afin de donner aux élèves les outils d’accès à la pensée et à l’autonomie. De plus, l’an dernier nous avons eu de très belles dissertations écrites par des lycéennes notamment », se félicite le recteur.
Devant un amphi rempli, le chancelier des universités a également rappelé au néo contractuels la nécessité de faire appliquer les valeurs de la Républiques et le principe de laïcité. « Le kichali, oui. Le foulard, non ! L’école doit garantir le respect des lois et des principes ». Puis il a insisté sur la pratique de la langue française en classe dès le plus jeune âge. « Nous devons donner la priorité au français…même s’il y a la possibilité de parler en shimaore ou en kibushi au cycle 1 (ndlr, maternelle). Mais à partir du CP et jusqu’en terminale le français doit être la seule langue utilisée ».
Des néo contractuels motivés pour enseigner dans l’île aux parfums
On pourrait croire qu’enseigner à Mayotte en rebuterai plus d’un, et pourtant non ! Orlane et Mathieu, respectivement 25 et 26 ans, originaires de La Réunion ont décidé de venir s’installer dans notre territoire. Titulaire d’une licence de notariat, Orlane s’est convaincue de se lancer dans le métier d’enseignant. « Je me destinais à suivre une voie pour être notaire, mais cela ne m’a pas plu. Cela manquait à la fois de pratique mais aussi et surtout d’interaction avec les autres », explique-t-elle. Avant de confier qu’être enseignante l’a toujours intéressée, qui plus est dans l’île au lagon. « J’ai vécu à Mayotte pendant 3 ans, quand j’étais au collège en Petite-Terre. J’ai envie de transmettre les savoirs…Ici les enjeux éducatifs sont différents de ceux de La Réunion. Il y a comme de la gratitude, on a le sentiment de réellement servir à quelque chose ».
Dans une semaine elle sera devant une classe et même si cela lui occasionne un peu d’angoisse, elle n’en demeure pas moins impatiente. « On découvre un nouveau métier, c’est excitant ». C’est ce que pense également son conjoint, Mathieu, qui lui aussi va devenir enseignant. « C’est Orlane qui m’a fait découvrir Mayotte. La première fois que suis venu ici je suis tombé fan, c’est vraiment magnifique ! raconte-t-il. Je me projette sur le moyen /long terme ». Au-delà du fait de développer ses compétences et mettre plusieurs cordes à son arc, Mathieu est aussi venu chercher une nouvelle expérience. « J’ai une licence STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives) et je suis spécialisé dans l’éducation physique adaptée. J’ai notamment travaillé avec des personnes en situation de handicap, certaines avec de lourds antécédents et des traumatismes ». En venant enseigner à Mayotte, Mathieu a conscience des difficultés et des enjeux du territoire. « C’est un contexte différent ici… J’aime bien l’aventure, le changement, découvrir différentes cultures. C’est une autre manière de fonctionner, de pouvoir partager mes méthodes d’enseignement par exemple. J’ai le sentiment que je serai utile ici, d’autant plus que les enfants sont, paraît-il, adorables et ont envie d’apprendre ».
Avec de tels néo contractuels, nul doute que nos écoliers mahorais seront entre de bonnes mains !
B.J.