Mayotte… son lagon, ses plages de sable fin, sa mer translucide, sa végétation luxuriante, ses baobabs, une île aux parfums de paradis et pourtant à en croire le président de l’Union des Métiers et de l’Industrie Hôtelière de Mayotte (UMIH976), Charles-Henri Mandallaz, les touristes ne sont pas au rendez-vous. « Les mouvements sociaux du début d’année ont considérablement perturbé notre activité, alors qu’elle était déjà morose. Les hôtels et les entreprises du secteur du tourisme avaient investi pour faire face à la crise de l’eau et la crise sociale de début d’année n’a pas arrangé les choses », déplore-t-il. Pour lui, il ne faut pas se leurrer même si les taux de remplissage de plusieurs établissements de l’île peuvent sembler bons, cela est principalement dû à la présence des forces de l’ordre et à certains personnels administratifs. « Ce sont des mono-clients et heureusement qu’ils sont là car ils soutiennent notre activité. Sans eux, beaucoup d’établissements auraient de grosses difficultés ».
En effet, selon le président de l’UMIH976, il n’y a pas d’afflux massif de touristes dans l’île même si certains établissements semblent tirer leur épingle du jeu, à l’image du Jade Hôtel and Spa à Bandrélé, ou encore du Jardin Mahore à Ngouja. Ces établissements ont fait le choix de ne pas accueillir de forces de l’ordre, et malgré cela il affiche des taux de remplissage « satisfaisant » depuis la fin juin, notamment le week-end. Ce sont principalement des touristes qui viennent de la Région, de Mayotte, de La Réunion et un peu de métropole. « Chaque week-end nous sommes quasi complets », indiquent les deux établissements. Du côté des chambres d’hôtes Perle du Sud à Kani-Kéli, c’est un peu le même son de cloche, « Il n’y a pas vraiment de monde la semaine. En revanche, les week-ends sont relativement bien remplis, mais ce sont presque exclusivement des Mahorais qui viennent séjourner chez nous ».
Aussi, ce pourrait être un peu l’arbre qui cache la forêt car la crise de l’eau, l’insécurité, l’épidémie de choléra… n’ont pas joué en faveur de Mayotte pour la rendre attractive auprès des touristes. Certes il y en a, sans doute plus que l’année dernière à la même époque, mais ce n’est pas non plus la panacée. Pour le président de l’UMIH976, les difficultés rencontrées ces dernières années ont créé de l’incertitude sur la destination Mayotte. « Face à la crise de l’eau, beaucoup se sont équipés en cuves… mais malgré cela de nombreux professionnels doutent encore. Au-delà des problèmes structurels qui touchent notre département (eau, insécurité, …), il faut développer ce territoire et le rendre plus attractif ».
Mayotte, ce diamant brut…
Comme le rappelle Charles-Henri Mandallaz, « Mayotte a un potentiel énorme, une vraie pépite. C’est un diamant brut cette île ! Il y a des atouts formidables sur ce territoire : le lagon bien sûr, mais aussi sa culture, ses paysages, sa langue, sa population. Il y a une véritable identité culturelle ici. A Mayotte on vit une expérience hors du commun ». Et il sait de quoi il parle puisque ça fait près de 25 ans qu’il vit dans l’île. Toutefois, il regrette que l’activité touristique ne soit pas davantage mise en valeur, car d’après lui il n’y a pas foule de « vrais touristes ».
« Il y en a peu qui viennent en vacances à Mayotte. Il faut revoir l’attractivité touristique de notre territoire car il n’y a pas que les problèmes d’eau et d’insécurité qui freinent les gens. Le prix des billets d’avion est exorbitant durant cette période de l’année, sans compter le coût de la vie qui est relativement élevé. Les touristes préfèrent aller ailleurs, à La Réunion par exemple ». Le président de l’UMIH976 reconnait néanmoins que depuis ces dernières années les choses s’accélèrent et vont dans le bon sens. « Le développement de Mayotte est un enjeu colossal, il y a de nombreux défis à relever (…). Mayotte doit se regarder avec un œil empathique et mettre les bouchées doubles pour rattraper son retard ».
Aussi, les acteurs du tourisme de l’île ont décidé de se différencier des autres destinations en proposant des séjours « immersifs », au sein de la culture mahoraise, avec des activités touristiques en accord avec la nature et l’environnement. Il y a certes la plongée dans l’un des plus beaux lagons au monde, mais aussi des balades, de la rando, des visites d’exploitations agricoles… Bref, loin des activités du tourisme de masse. C’est d’ailleurs ce que ne veulent pas les professionnels : voir déferler des hordes de touristes comme sur la Côte d’Azur.
« Il faut proposer aux touristes une véritable expérience, quelque chose d’hors-sol. Ce ne doit pas être un séjour lambda. Mayotte ce n’est pas La Réunion, ni les Antilles, c’est quelque chose d’à part, insiste Charles-Henri Mandallaz. Il faut miser sur les produits locaux, le savoir-faire local, le tout estampillé Mayotte afin de mettre en avant une identité propre car cette île a un potentiel hors normes ».
B.J.