Il aurait été tentant de titrer cet article en faisant le parallèle entre ce « retour des hajds » et le titre d’un célèbre film de science-fiction. Mais, la religion revêtant une importance fondamentale sur l’île au lagon, nous n’en ferons rien au risque de froisser les susceptibilités. Les 300 hadjs mahorais sont donc bien rentrés entre ce dimanche 30 juin et ce lundi 1er juillet dans une atmosphère extrêmement festive. Leurs familles sont venues les chercher dans des voitures ornées d’une décoration à mi-chemin entre les décorations de Noël et celles des fêtes d’anniversaires avec guirlandes et ballons. « Quand un Mahorais va accomplir le Hadj, c’est comme si tous les membres de sa famille l’accomplissaient avec lui. Ils fêtent donc leur retour avec ostentation car les Mahorais aiment les fêtes », explique Kassim Chadhouli, le secrétaire de l’association Djamou, l’une des 3 associations mahoraises chargées de faciliter le départ des pèlerins pour la Mecque.
Cette année, seuls 300 pèlerins sur les 600 prévus ont pu partir, l’Arabie Saoudite ayant réduit drastiquement les « visas hadj » accordés pour chaque pays. « C’est sans doute à cause des reproches que la communauté internationale ne cesse de faire à l’Arabie Saoudite arguant que beaucoup de gens décèdent lors du hadj à cause de la chaleur terrible qui règne dans cette région », explique le secrétaire de l’association Djamou. Cette dernière a donc dû faire une sélection drastique des candidats au hadj cette année et elle a logiquement privilégié ceux qui n’avaient encore jamais pu accomplir ce 5ème pilier de l’islam dans leur vie. En tout cas, les 300 Mahorais sont revenus sains et saufs. « Ceux qui décèdent là-bas sont ceux qui ne respectent pas les règles données par l’Arabie Saoudite. Désormais on est très encadrés avec des consignes précises pour toutes les étapes du pèlerinage qu’on reçoit aussi par sms sur nos téléphones portables », précise Kassim Chadhouli.
Un pèlerinage en plusieurs étapes
A cause de ces soucis de visas, les pèlerins ne sont partis que le 10 juin au lieu des 4 et 5. Ils ont cependant pu arriver à temps pour se trouver dans la plaine Arafat le jour J, un jour bien précis défini par le calendrier lunaire musulman. « Selon la tradition, quand Allah a chassé Adam et Eve de l’Eden, ils ont été séparés en arrivant sur la Terre. Ils ont erré seuls chacun de leur côté pendant plusieurs centaines d’années avant de se retrouver enfin sur la plaine Arafat en Arabie Saoudite. Ce lieu est comme « un vortex » où Allah pardonne aux fidèle tous ses péchés comme il a aussi pardonné à Adam et Eve », explique Kassim Chadhouli. Il développe en expliquant qu’en ce lieu « il n’y a rien de spécial à faire si ce n’est se connecter à Allah en répétant des incantations dans sa propre langue ». L’Arabie Saoudite a fait installer des stands climatisés pour assurer un minimum de confort aux pèlerins.
Ensuite pour rentrer dans la Mecque, qui est une « terre bénite », il faut se mettre en « état de sacralisation » en effectuant certains rituels comme se laver et revêtir 2 habits blancs. Le tout en se concentrant et en se en répétant « Je quitte ma vie d’avant pour discuter avec mon Seigneur ». Cette incantation est ensuite dite à haute voix, puis criée, sur le chemin menant à la Kaaba, édifice datant du 7ème et recouvert d’une étoffe de soie noire. Se trouvant presque au centre de la cour de la grande mosquée de la Mecque, elle est le lieu le plus sacré de l’islam. Dans son angle sud-est est enchâssé la « pierre noire », relique islamique qui remonterait à l’époque d’Adam et Eve selon la tradition.
Une fois arrivé devant la Kaaba, le pèlerin commence la circumambulation, c’est-à-dire ses 7 tours autour de l’édifice en continuant de réciter des incantations. « La pierre noire est semblable à un scanner vérifiant que le pèlerin a bien accompli son pèlerinage », explique avec humour Kassim Chadhouli. Le hadj doit encore accomplir « 2 unités de prières » puis boire « l’eau du zam-zam ». Cette dernière est une eau bénite dont la source se situe sous la mosquée de la Mecque et dont « le puit ne se tarit jamais » selon la légende. Il accomplit encore le rituel du « soifa et marwa », une référence à une épreuve qu’aurait subi la femme d’Abraham et son bébé sur ordre de Dieu. « Allah a demandé à Abraham de mener sa femme et son bébé dans ce désert brûlant et il est parti. La femme a cherché partout de l’eau. Désespérée, elle a fini par laisser son enfant à un endroit (le soifa) et a couru vers un autre endroit (le marwa) pour y chercher un signe. Et quand elle est revenue, une source jaillissait sous les pieds de son bébé », raconte le secrétaire de l’association Djamou. Le pèlerin doit donc lui aussi effectuer cet aller-retour 7 fois du Soifa au Marwa en récitant des prières. C’est la « Omra », mais elle n’est généralement pas considérée comme obligatoire contrairement au hadj.
Le pèlerin se coupe ensuite une mèche de cheveux pour signifier qu’il quitte l’espace de sacralisation, puis se rend ensuite à Mina, à 5 km de la Mecque pour y lapider des stèles représentant le diable. « C’est psychologique, cela signifie qu’on se débarrasse de toute chose mauvaise en nous », explique Kassim Chadhouli. Enfin, il y a la cérémonie de l’égorgement du mouton de l’Aïd-el-Kebir. Ce dernier rituel est désormais organisé par l’Etat d’Arabie Saoudite pour éviter tout débordement. La viande est ensuite envoyée dans les pays pauvres. En tout, le pèlerinage dure 5 jours.
N.G