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Le CHM dévoile sa nouvelle organisation du service des Urgences 

Lors du dernier Conseil de surveillance, vendredi 28 juin, la nouvelle configuration du service des Urgences du CHM a été validée. 

Aux origines de la tempête 

En 2023, nous avions révélé que le service des Urgences du CHM était dans une tourmente extrême, dû à un manque criant de médecins, fragilisé par des guerres de chapelles et l’impossibilité de réaliser des plannings de travail, en raison des mi-temps annualisés cumulés par les professionnels. À la fin du mois de mai 2024, dans un contexte toujours très tendu, la cheffe du service des Urgences, Alimata Gravaillac, avait démissionné de ses fonctions, tout en restant médecin urgentiste au sein du service et « cheffe de pôle ». D’après Jean-Mathieu Defour, directeur général du CHM, l’urgentiste estimait subir « trop de pressions et de remises en cause ».

Dans ce contexte, la direction du CHM et la direction de l’ARS Mayotte avaient fait appel à François Braun, ancien Ministre de la Santé et de la Prévention, et Président du syndicat français de médecine d’urgence, SAMU – Urgences de France, de 2014 à 2022, pour répondre à la crise des urgences de l’hôpital mahorais. 

Une gouvernance à deux têtes 

François Braun, Santé, Mayotte, La Réunion
L’ancien ministre de la Santé s’était immergé au sein du service des urgences du CHM pendant plusieurs jours pour penser sa « restructuration »

Suite au départ du Dr. Gravaillac de la direction du service des Urgences du CHM, le service s’était retrouvé sans pilote pendant plusieurs semaines. Sur préconisation de François Braun, la direction du CHM a décidé de ne pas nommer un seul chef du nouveau service des Urgences, mais d’assurer sa gouvernance par un binôme médico-administratif constitué d’un médecin et d’un directeur chargé de gérer le service, et notamment le planning des médecins. Si la direction du CHM souhaite encore garder secret les noms des futurs chefs des urgences, d’après nos sources, ce n’est plus un médecin Urgentiste, mais un chirurgien, qui deviendrait responsable du service des urgences.

Une réorganisation basée sur un transfert d’activités

Dans l’objectif d’améliorer le système des urgences et « notamment le management » comme l’avait précisé le directeur du CHM, François Braun avait passé trois jours au sein du CHM, du dimanche 16 juin au mardi 18 juin derniers. À son retour à Paris, l’expert devait soumettre ses propositions d’organisation du service des urgences du CHM pour « retrouver de la sérénité dans le service » mais surtout « recentrer les médecins urgentistes sur leur coeur de métier avec l’aide des autres services, comme la réanimation, la médecine, la chirurgie, afin de décharger les médecins urgentistes de tout ce qui ne correspond pas à des urgences » pour reprendre les déclarations du directeur de l’hôpital mahorais. 

Les réanimateurs et les chirurgiens, au secours des urgentistes 

D’après le Dr. Plourdeau, « le secours organisé par les réanimateurs est plus puissant que ce que tout autre service peut proposer »

Désormais, dans cette nouvelle configuration, trois fonctions, auparavant assurées par les médecins urgentistes, vont être déléguées à d’autres professionnels de santé du CHM, tels qu’à des réanimateurs, actuellement au nombre de quatorze au CHM, et à des chirurgiens. Premièrement, la salle de déchocage du service des Urgences, aussi appelée SAUV, qui accueille des patients ayant une détresse vitale, va être gérée par des réanimateurs de l’hôpital. Par ailleurs, en raison de l’importance du nombre de patients arrivant aux urgences avec des affections traumatiques, un chirurgien orthopédique va être mobilisé spécifiquement, pour assurer ces prises en charge « matin, midi et soir », a commenté le directeur du CHM. Enfin, le service des évacuations sanitaires (EVASAN), consistant à évacuer un patient par transport médicalisé vers une autre structure hospitalière de La Réunion ou de la métropole, ainsi que le caisson hyperbare, utilisé par exemple pour des accidents de plongée sous-marine ou comme aide à la cicatrisation de plaies, seront dorénavant supervisés par des réanimateurs.

Les urgentistes se recentrent sur la régulation et le SMUR 

En étant déchargés des activités éloignées de leur cœur de métier, le directeur du CHM espère que les médecins urgentistes pourront « se recentrer sur la régulation, la prise en charge des box et le SMUR. » En effet, l’objectif de l’hôpital est de centraliser les urgentistes sur la régulation médicale du SAMU (centre 15), afin d’apporter une réponse médicale adaptée à tous les appels venant d’une personne en détresse sur le territoire, mais aussi de prendre en charge et surveiller les patients aux urgences installés dans des box, et d’intervenir au sein de la structure mobile d’urgence et de réanimation (SMUR). Pour assurer leurs fonctions, des médecins généralistes seront également déployés aux côtés des urgentistes. 

Une unité mobile hospitalière paramédicale pour préserver les médecins urgentistes 

Héli-SMUR, Mayotte, EVASAN,Dominique Voynet, ARS, ministère de la Santé
Désormais, le SMUR médicalisé ne sera déployé qu’en cas de nécessité médicale, sur décision de la régulation du centre 15

À l’avenir, afin de préserver les ressources médicales sur des « vraies » urgences, une unité mobile hospitalière paramédicale (UMHP) pourra être officiellement déployée. Concrètement, en fonction de la gravité de la situation, le médecin régulateur déterminera s’il y a nécessité d’envoyer un SMUR médicalisé ou seulement para-médicalisé. Cette stratégie est née d’un constat chiffré où « 80% des interventions du SMUR ne nécessitaient pas de médecin », « mais si l’équipage d’infirmiers estiment que l’intervention nécessite la présence d’un médecin, le SMUR médicalisé sera déployé le plus vite possible », a nuancé le directeur du CHM. 

Les pédiatres s’accélèrent pour s’insérer dans cette reconfiguration

Alors qu’une personne sur deux dans le département a moins de 18 ans, les patients des urgences ne sont guère plus âgés. Dans ces nouvelles urgences reconfigurées, se pose la question de la prise en charge des urgences pédiatriques. Le Dr. Pelourdeau, chef du pôle médico-technique et du service de radiologie du CHM et président de la commission médicale d’établissement (CME), nous a confié : « Le secours organisé par les réanimateurs est plus puissant que ce que tout autre service peut proposer. Il y a du monde en pédiatrie mais ils ne pourront pas autant secourir les urgences comme ce que pourront faire les réanimateurs réanimateurs. » Grâce au puissant service de réanimation du CHM, le président de CME a assuré que « les réanimateurs-pédiatres pourront prendre en charge les cas les plus lourds » et qu’une « première ligne »  de médecine générale sera organisée aux urgences pour les enfants, en précisant que tous les médecins généralistes ne sont pas toujours familiers de la pédiatrie, « il y a des médecins généralistes formés pédiatrie et d’autres non. » 

maternité, sage-femme, parturiente, effectifs, grossesse, bébé
Sur le plus jeune département français, seuls 4 pédiatres sont en poste au CHM

Le Dr. Laplace, chirurgien orthopédique, prendra en charge « les box des traumatisés », mais aussi « la traumatologie infantile ». Dans ce contexte de transformation du service des Urgences, le président de la CME a demandé aux pédiatres de réaliser ce qu’il appelle « un projet de réinvestissement des urgences pédiatriques pour le moyen-long terme. » Si les pédiatres travaillent sur ledit projet depuis plusieurs semaines, les délais sont néanmoins assez courts : « On a changé la gouvernance du service des urgences qui posait problème. Les conditions se mettent petit à petit au vert mais on va mettre du temps avant de créer un service complet, notamment pour la partie pédiatrique. On va recourir à des expédiants pendant quelques temps (…) On est obligés de faire un service dans l’urgence, sans mauvais jeu de mots », nous a confié le radiologue.

Cette nouvelle configuration du service des urgences du CHM, sera présentée au mois de septembre 2024, en conseil de surveillance, avec l’ensemble des représentants des usagers, et en présence de l’ARS. D’ici la rentrée scolaire, on peut espérer que le « projet de réinvestissement des urgences pédiatriques » sera étoffé et que la stratégie globale de reconfiguration du service des urgences aura été un succès après deux mois de test pendant l’hiver austral.

Mathilde Hangard 

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