C’est sous le préau du Conseil départemental qu’a été présenté l’Atlas de la ruralité mahoraise, par Ben Issa Ousseni, entouré par des conseillers départementaux, mais aussi et surtout des géographes du territoire et de l’Université Paul Valéry de Montpellier.
Valoriser le patrimoine matériel et immatériel de Mayotte
L’Atlas de la ruralité mahoraise est avant tout un état des connaissances actuelles sur le patrimoine matériel et immatériel de Mayotte, dans toute sa diversité. Mayotte est un territoire mouvant. Pour Ben Issa Ousseni, la croissance démographique, l’extrême jeunesse de sa population et la richesse de sa biodiversité, font de Mayotte un territoire unique de l’Océan indien. La croissance démographique qu’a connue le département ces dernières années, a notamment eu des impacts sur le monde rural, les habitats, l’alimentation et l’environnement, puisque « les besoins ont évolué« , a commenté Monique Gherardi, géographe à l’Université Paul Valéry de Montpellier 3 et coordinatrice de l’ouvrage. Face à ces changements, la société mahoraise a dû s’adapter : « Mayotte a innové et s’est transformée », a déclaré le Président du Conseil départemental de Mayotte.
À l’origine du projet
En décembre 2018, Conseil Départemental de Mayotte avait organisé la 7ème édition de l’Université Rurale de l’Océan Indien (UROI) sur le thème de « l’identité de la ruralité mahoraise », et plus spécifiquement, sur l’attachement des mahorais à leur terre nourricière. Lors de cet événement de trois jours, les participants, issus de différents secteurs professionnels, avaient suggéré l’idée de créer un Atlas sur la ruralité mahoraise pour valoriser le patrimoine matériel et immatériel de Mayotte, sous la forme d’un outil scientifique accessible à tous.
Un ouvrage au service du développement du territoire
Monique Gherardi, géographe à l’Université Paul Valéry Montpellier 3, ne s’attendait pas « à ce que la conférence de presse ait autant de succès ce matin. » Pour la géographe, le « laboratoire de géographie de Montpellier a mis tout son cœur pour permettre la création de cet ouvrage. » D’après elle, cet Atlas est le fruit d’un travail scientifique mais aussi artistique, « qui participe à faire de ce patrimoine, des oeuvres d’archives pour le territoire. »
En effet, l’Atlas est le fruit d’un travail collectif de longue haleine, entre des historiens, des géographes, des agronomes, des acteurs de la filière agricole, des acteurs du milieu maritime, des défenseurs de la biodiversité et de chercheurs locaux. D’un financement conjoint entre le Conseil départemental de Mayotte, l’Université Paul Valéry de Montpellier 3, notamment le Laboratoire de Géographie et d’Aménagement de Montpellier (LAGAM), de 284 680 euros, l’Atlas de la Ruralité mahoraise a pour ambition de s’inscrire comme une référence incontournable dans la connaissance de ce territoire, sous toutes ces dimensions.
Pour Abdoul Kamardine, « on a fini le temps de l’oralité »
L’ouvrage présente de nombreux sujets, offrant ainsi aux lecteurs un voyage tant à travers la tradition que l’innovation. Parmi ces enjeux, la valorisation de la brique de terre compressée pour des instruments de musique traditionnels, les traditions culturelles et culinaires, mais aussi la protection des forêts mahoraises, des mangroves, d’espèces menacées comme le crabier blanc, y sont intégrés.
La vocation de l’Atlas est ainsi historique, géographique, agricole, environnementale et culturelle, où les traditions ancestrales sont présentées, mais aussi la question de la transmission orale des savoirs, l’évolution de certains métiers, notamment artisanaux, mais aussi des moeurs. À ce sujet, Abdoul Kamardine, conseiller départemental de Mtsamboro, dira : « Cet Atlas retrace toute l’histoire de Mayotte. C’est un document très important car il dit qu’on a fini le temps de l’oralité, pour laisser une trace de notre passé pour l’avenir (…) Ce sont des photos historiques qui sont reprises aujourd’hui pour voir comment la société a évolué. »
Un outil d’aide à la décision : « Quelles solutions pour le monde de demain? »
L’objectif a également été de vulgariser les thématiques abordées, afin de les rendre accessibles au plus grand nombre, et notamment aux plus jeunes, pour permettre aux enseignants d’y trouver de la matière pédagogique, mais aussi aux politiques, pour le déploiement de projets sur le territoire. Comme l’a rappelé Monique Gherardi, cet ouvrage pourrait aussi devenir un « outil d’aide à la décision et à la gestion, pour des acteurs du territoire (…) pour des projets ou des politiques publiques, sur un sujet environnemental, rural, urbanistique ou social. » Les cinquante dernières pages de l’Atlas sont ainsi dédiées aux « constats d’un territoire aux contraintes multiples » mais aussi aux « solutions pour le monde de demain. » À titre d’exemple, la question des pressions démographiques sur les ressources est une composante intégrante de l’ouvrage, permettant ainsi aux lecteurs de comprendre les enjeux d’une zone mais aussi son potentiel, afin d’envisager des perspectives durables pour le territoire et la société mahoraise dans son ensemble.
En fin de matinée, les contributeurs de l’Atlas ont également annoncé fièrement l’organisation d’une « Fête de la Ruralité mahoraise« , qui se déroulera sur la plage de Mbouini, le 29 juin prochain à partir de 9h.
Mathilde Hangard