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Frédéric Valletoux : « C’est considérable », à propos de l’explosion de cas de VIH sur le territoire 

Vendredi midi, le ministre de la Santé et de la Prévention a rencontré les équipes sanitaires et sociales engagées dans la santé sexuelle, autour du camion de dépistage de l’association Nariké M’Sada. 

Alors que le programme du déplacement du ministre de la Santé était essentiellement articulé autour de la gestion des cas de choléra sur le territoire, Frédéric Valletoux a également rencontré des acteurs engagés pour la santé sexuelle, trois mois après le lancement du camion de dépistage Nariké M’Sada sur les infections sexuellement transmissibles. 

Plus d’un cas positif au VIH par jour à Mayotte 

À son arrivée sur la Place de la République, Frédéric Valletoux a salué l’ensemble des équipes mobilisées autour du camion de dépistage de Nariké M’Sada, dont le directeur de l’association, Moncef Mouhoudhoire, qui l’a alerté sur la hausse significative des cas de VIH diagnostiqués à Mayotte : « C’est considérable » a déclaré en retour le ministre. 

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Pour Moncef Mouhoudhoire, les crises successives à Mayotte ont fragilisé les politiques préventives en matière de santé sexuelle.

En effet, en l’espace de quatre ans, le nombre de personnes positives au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et suivies par l’Unité des maladies infectieuses et tropicales du Centre hospitalier de Mayotte (CHM) est passé de 324 en 2019 à 505 en 2023 et sur les 75 nouveaux patients séropositifs diagnostiqués entre janvier et avril 2024, 25 % d’entre eux étaient au stade « Sida ».

Une unité mobile de dépistage à plusieurs cordes 

Convaincus que ces chiffres sont encore largement sous-estimés, les acteurs sanitaires et sociaux, ont ainsi déployé un camion de dépistage aux maladies sexuellement transmissibles, permettant « d’aller vers » la population. Ainsi, depuis bientôt trois mois, ce camion de dépistage itinérant sillonne le territoire de Mayotte pour offrir des services de dépistage pour les maladies infectieuses transmissibles et notamment le VIH.

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Après avoir rempli un questionnaire médical, une habitante entre dans ce centre de dépistage itinérant.

Mais pour attirer davantage de personnes à venir se faire dépister, l’ARS et ses partenaires associatifs ont choisi d’élargir l’offre de dépistages proposés dans le cadre de la santé sexuelle, pour inclure des tests pour le diabète et l’hypertension : « Nous nous sommes aperçus que certaines personnes n’hésitaient pas à venir pour diagnostiquer un éventuel diabète ou une hypertension, mais n’osaient pas venir pour se faire dépister sur les maladies sexuellement transmissibles (…) En proposant plusieurs tests, les personnes sont souvent d’accord pour être testées sur un éventail assez large de maladies, dont les maladies à transmission sexuelle », a commenté la chargée de mission en santé sexuelle et reproductive de l’ARS Mayotte.

Ce camion de dépistage comporte ainsi « deux cabines », l’une dédiée aux infections sexuellement transmissibles et l’autre consacrée au diabète et à l’hypertension. À défaut de pouvoir compter sur des effectifs suffisants de médecins, les infirmiers ont reçu une formation certifiante pour réaliser ces dépistages rapides, aussi appelés tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) : « N’importe qui peut venir se faire dépister, c’est gratuit et en quelques minutes,  on peut avoir un résultat au sujet d’une infection au VIH, au virus de l’hépatite C ou de l’hépatite B, mesurer sa glycémie ou savoir si on a de l’hypertension, c’est pratique » a expliqué un des infirmiers. 

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Du lundi au vendredi, ce camion de dépistage se déplace dans l’ensemble des communes de Mayotte, 5 jours sur 7.

En complémentarité avec les activités pratiquées par le Centre gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD) situé à Jacaranda, ces dépistages itinérants permettent ainsi de « mutualiser des moyens de réponse  » pour reprendre les mots de  Nassim Guy, Responsable du service prévention et actions de santé à l’Agence Régionale de Santé de Mayotte. À l’écoute des professionnels de santé mobilisés, le ministre de la Santé a salué une initiative « deux en un » permettant d’adopter une démarche holistique de la santé.

« Il faut lutter contre une offre de soins hospitalo-centrée »

Mais pendant cette visite ministérielle, Moncef Mouhoudhoire a également exprimé son inquiétude sur cette « explosion des cas de VIH » sur le territoire : « Les chiffres sur les maladies sexuellement transmissibles, et notamment le VIH sont inquiétants », a-t-il déclaré.

D’après lui, cette hausse s’expliquerait en partie en raison d’un contexte global difficile sur le territoire, qui a connu différentes crises successives, où les actions en matière de prévention sexuelle n’auraient pas bénéficié d’une visibilité assez conséquente : « Les crises rendent invisibles ce sujet », a-t-il commenté. Moncef Mouhoudhoire a présenté ce camion de dépistage itinérant au ministre de la Santé comme un moyen de répondre directement aux problématiques de santé sexuelle des habitants, en leur enlevant la contrainte de se déplacer systématiquement à Mamoudzou : « Les acteurs de la santé sexuelle sont majoritairement à Mamoudzou, notamment le CeGIDD, le laboratoire privé et notre association (…) il faut lutter contre une offre de soins hospitalo-centrée car les gens ne peuvent pas toujours se déplacer, ni payer un taxi, pour se faire dépister et il n’y pas de transport en commun. »

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Pour l’ARS, ce camion permet également d’instaurer un espace d’échange sur ces sujets encore « tabous »

Et en dehors du dépistage, pour illustrer son propos sur la vulnérabilité de la population face aux maladies sexuellement transmissibles, le directeur de Nariké M’Sada a dénoncé un accès encore trop faible aux protections contre la plupart des infections sexuellement transmissibles (IST) : « L’accès aux préservatifs n’est pas garanti dans le 101ème département de France car les seuls endroits où on peut les trouver c’est en pharmacie ou auprès des associations qui sont souvent à Mamoudzou (…) Par exemple, si deux personnes se plaisent et décident d’avoir une relation sexuelle, dans une commune, où ils ne trouvent pas de préservatifs, ils ne pourront pas se protéger (…) Il n’y a pas des pharmacies et des associations dans tous les villages de Mayotte (…) d’où notre camion qui permet d’être dépisté mais aussi d’avoir des moyens pour se protéger. »

Les représentants de l’ARS ont également précisé que des antennes CeGIDD avaient été ouvertes à Sada et en Petite-Terre, et qu’une ligne d’écoute « Infos Santé Sexuelle » avait été déployée en français et en shimaoré.

À la question de Frédéric Valletoux de savoir si les dépistages réalisés grâce à ce camion itinérant rencontraient un succès auprès de la population, un infirmier a répondu que sur les dizaines de dépistages réalisés chaque jour, il n’était « pas rare de voir trois ou quatre tests positifs au VIH par jour en ce moment », faisant ainsi craindre une hausse manifeste à venir des cas séropositifs diagnostiqués, mais surtout une prise en charge au plus tôt de ces patients.  

Mathilde Hangard

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