En Petite-Terre, les déchets envahissent les rues et les trottoirs

Dans certains quartiers de Petite-Terre, les trottoirs et caniveaux débordent d’ordures, de plastiques et de pneus depuis le passage du cyclone Chido. Les habitants dénoncent l’ampleur des dépôts sauvages et le manque de sanctions. Les services municipaux et le Sidevam, confrontés aux problèmes de barges et à la logistique, peinent à suivre. Une situation qui impacte l’environnement, la santé et le quotidien.

Dans plusieurs endroits en Petite-Terre, les sacs d’ordures s’entassent les uns sur les autres. Plastiques, pneus, débris de matériaux, restes de repas, couches pour bébé…tout se mélange. L’odeur pique le nez avant même qu’on ne s’approche. Dans certains quartiers, les caniveaux débordent de canettes, de bouteilles d’eau et de sachets en plastique. Le problème ne date pas d’hier, déjà avant le cyclone Chido, certains trottoirs étaient régulièrement encombrés. Mais depuis le passage du cyclone, la situation a empiré. Les tas d’ordures se multiplient, les collectes peinent à suivre et les problèmes de barges viennent ralentir le travail des services municipaux et du Sidevam. Les mini décharges s’installent un peu partout rendant certains passages impossibles et obligeant les habitants à contourner les déchets juste pour passer.

La vie au milieu des ordures : la colère et la fatigue des habitants

À Labattoir, le chemin à côté de la rue du Manguier, récemment nettoyé, se remplit à nouveau de déchets. Halima Madany, habitante du quartier, fait part de son mécontentement. « Ça sentait vraiment mauvais, on n’en pouvait plus des odeurs. Il faut vraiment que la mairie fasse son travail et sanctionne pour de vrai les gens qui font ça parce que ça donne une mauvaise image de notre commune ».

Des déchets sur le trottoir dans la rue Mari Oili Manga.

Un peu plus loin, en face de la rue Mari Oili Manga, le sol est jonché de couches pour bébé, de sacs-poubelle, de déchets verts et de canettes. Un panneau « Interdiction de déposer des ordures ici. Merci de garder vos poubelles devant votre habitation » trône en arrière-plan, posé par la municipalité de Dzaoudzi-Labattoir. Mais la plupart des passants l’ignorent. Une mère jette même la brique de jus vide de son enfant directement sur le tas, sans s’en soucier. Pendant que certains passent à côté sans même y prêter attention, d’autres se retrouvent à devoir gérer les déchets qui s’accumulent juste devant leur maison. Dans le quartier des Badamiers, une riveraine raconte : « À chaque fois que je les surprends, je leur dis d’arrêter. Des fois, les odeurs remontent jusque dans ma cour. C’est invivable et c’est pas bon pour la santé. Une fois, ils ont même déposé un animal mort. Je me suis plainte à la municipalité mais rien a changé ».

Une population partagée entre ras-le-bol et volonté d’agir

Dépôts sauvages à côté du Doukabé de Pamandzi.

À quelques pas du magasin Doukabé à Pamandzi, la scène est la même : les poubelles sont là, alignées, vides ou à moitié pleines, mais les déchets continuent de joncher le sol. Fouad Bacar, qui vient souvent faire ses courses, secoue la tête. « C’est désolant. La mairie a dû nettoyer un peu, mais ça suffit pas  ». Sur place, des déchets recyclables, des déchets verts, et même des objets encombrants comme une gazinière ou un robinet. « On pourrait s’y mettre nous aussi, mais certains ne comprennent pas toutes les conséquences », soupire-t-il. Pour Siti Massoundi, le problème dépasse le quotidien et touche au respect de la nature. « Avant, nos ancêtres respectaient beaucoup la nature, ils cohabitaient avec elle  ». Elle ajoute : « Nous, la nouvelle génération, on n’a plus ce lien-là et on ne respecte plus les plages, les mangroves et les forêts. Les poubelles mises à disposition, soit elles se font brûler, soit elles servent de décoration  ».

Derrière les tas de déchets, un réseau dépassé

Derrière ces tas de déchets qui envahissent les trottoirs, il y a aussi des raisons bien concrètes qui échappent aux habitants. Camille Bildestein, chargée de communication de la commune de Petite-Terre, admet que l’ampleur du problème est grande et que le cyclone Chido n’a rien arrangé. « En effet, il y a beaucoup de déchets, mais c’est aussi parce qu’il y a des déchets post-cyclone, nous travaillons en collaboration avec le Sidevam, il y a une cellule environnement qui a été créée pour faire un vrai travail de fond sur tous ces déchets  ». Elle explique que ce travail prend du temps et que chaque perturbation, chaque problème de barge, ralentit forcément le rythme.

Du côté du Sidevam, Chanoor Cassam, directeur général, détaille un peu plus les contraintes matérielles qui compliquent la gestion. « Chido a touché le quai de transfert, la toiture a été endommagée et le site est saturé de tous types de déchets, entre ceux du cyclone et ceux du quotidien. La collecte des ordures dépend énormément du service des barges. De plus, il y’a eu beaucoup de grèves des barges et les camions de ramassages ne font pas partie des véhicules prioritaires, du coup ça retarde tout ». Le directeur général a aussi souligné le fait que les dépôts sauvages, ne sont pas gérés par eux directement, c’est les communes qui sanctionnent avec des amendes et celles-ci permettent de financer l’enlèvement des détritus avec le soutient du service du Sidevam.

Un caniveau rempli de déchets plastique.

Et au milieu de tout ça, ce sont souvent les déchets recyclables qui payent le prix fort. Les caniveaux débordent de bouteilles d’eau, de canettes et de sachets plastique, et il suffit d’un coup d’œil pour comprendre que ces déchets finissent presque tous dans la nature. Au tout début des coupures d’eau, les mairies avaient mis en place des campagnes de récupération des bouteilles, mais aujourd’hui, elles ont cessé. Les poubelles de tri sont installées un peu partout, mais les ordures finissent toujours par se retrouver sur les trottoirs, dans les caniveaux et  dans la mer.

Shanyce MATHIAS ALI.

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