Tribune – L’histoire est-elle en train de repasser les mêmes plats à Madagascar ?

Diplômé de l’ENES en gestion et de l’université Lumière Lyon 2 en droit constitutionnel comparé, et ancien directeur de cabinet du ministre de l’Éducation nationale des Comores en 1996, Abdourahamane Cheikh Ali met en garde contre la répétition des évènements malgaches de 1972… et dans un contexte de tensions mondiales avec la Russie.

La crise politique qui frappe Madagascar depuis le 25 septembre sur fond de contestations portées par les jeunes excédés par les coupures à répétition d’électricité et d’eau et d’une manière générale par la mauvaise gouvernance semble prendre la même tournure que les évènements qui ont conduit au renversement de Philibert Tsiranana, premier président de la Grande Île, par l’armée en mai 1972. Deux événements des 2 derniers jours me semblent constituer un tournant : la nomination d’un militaire, le général de division Ruphin Zafisambo, au poste de premier ministre le lundi 6 octobre et le déclenchement d’une grève par les étudiants en médecine ce mardi 7 octobre en solidarité au mouvement de contestation porté par les jeunes de la Gen Z.

Aujourd’hui, les étudiants en médecine viennent de monter dans le wagon d’un train conduit par d’autres jeunes qui manifestent depuis 2 semaines.

En mars 1972, ce sont eux qui avaient initié un mouvement de grève qui s’étendit rapidement à d’autres établissements d’enseignement. La grève prit vite une tournure politique, se transforma en une insurrection contre le régime et drainat le 15 mai une centaine de milliers de manifestants vers le palais présidentiel avec des slogans anti-français.

Mayotte, Madagascar
Le pays est plongé dans une crise politique depuis le 25 septembre 2025

Aujourd’hui, la Gen Z malgache ne se contente pas de réclamer une fourniture régulière de l’électricité et de l’eau. Elle exige désormais la démission du président Rajoelina et la nomination d’une personnalité neutre pour conduire un gouvernement de transition. Quelques manifestants demandent à la France de ramener à Paris son citoyen, le franco-malgache Rajoelina. On n’est pas loin des slogans anti-Français du 15 mai 1972. Le président Rajoelina risque-t-il d’être poussé vers la sortie par son nouveau premier ministre ?

Aujourd’hui, Rajoelina tente d’éteindre le feu de la contestation en nommant un général de division à la tête du gouvernement. Hier, dépassé par les évènements, Tsiranana, tout en restant officiellement Chef de l’État, confia les pleins pouvoirs à un autre… général de division, le chef d’état-major Gabriel Ramanantsoa. Comme quoi, général de division est un grade béni à Madagascar.

Tsiranana finira par être déchu officiellement de ses fonctions de président de la république de Madagascar le 11 octobre 1972.

Le gouvernement de transition militaire conduit par Ramanantsoa prit une orientation socialiste et se plaça sous l’orbite de l’Union soviétique.

Les événements risquent-ils aujourd’hui de propulser au-devant de la scène une junte militaire proche de la Russie ou plutôt de ramener au pouvoir le poulain des Américains, l’ancien président Ravalomanana ?

En tout cas, une chose est sûre : les 2 puissances ont juré de reléguer la France au second rang dans cette zone ô combien stratégique du canal de Mozambique.

Abdourahamane Cheikh Ali

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