On peut dire sans se tromper que c’est le point d’orgue de ces dernières semaines de violences subies sur la route par les automobilistes à Koungou. Des barrages quotidiens au niveau de Majikavo Dubaï, pas seulement nocturnes puisque dimanche après-midi la gendarmerie a dû intervenir avec force de grenades lacrymogènes. Visiblement, la méthode n’est pas la bonne, puisque les agressions sont quotidiennes contre les automobilistes, et que des faits de plus en plus graves sont commis.
Samedi soir, les engins de chantier de l’entreprise d’Eric Bugna sur les hauteurs de Majikavo Lamir étaient partis en fumée, alors qu’ils sont destinés à des chantiers menés par la commune, notamment par la société Colas.
Cette nuit, c’est la halle de pêche flambant neuve sise à Koropa qui est totalement partie en fumée. Appelés par un habitant, pompiers et gendarmes sont intervenus, vers 2 h du matin selon nos informations. Trop tard, elle est entièrement détruite. C’est un spectacle de désolation qui s’offre aux pêcheurs et aux représentants de la mairie ce mercredi matin.
Pas encore arrivé sur place, le maire Assani Saindou Bamcolo nous disait au téléphone son découragement, lui qui avait déjà vu sa mairie incendiée il y a deux ans : « Je suis écœuré. Cette halle a été pensée et financée pour encadrer la filière pêche de Koungou en permettant d’entrer dans les normes européennes. En auraient découlé la création d’emplois, le développement économique de la commune et du grand Nord ». Les groupements de pêcheurs des autres communes membres de la communauté d’agglomération du grand Nord étaient en effet invités à décharger sur ce point de distribution.
Pas encore assurée
Debout face au bâtiment, Abdou Moustoifa, Président de la coopérative des pêcheurs de Koungou, est complètement abattu : « C’est fichu, on ne peut plus lancer la filière. A l’intérieur, il y avait la chambre froide et tout ce qu’il fallait pour lancer l’activité. La halle n’attendait plus que l’arrivage de poissons. » Et d’être inaugurée.
Le bâtiment a été livré à la commune en juin, et avait déjà connu des déboires lors de sa construction lorsque les engins de chantier avaient été incendiés lors de la démolition de Talus 2 qui avait lancé l’opération Wuambushu. Depuis son achèvement, il n’y avait plus de gardien, et la halle n’était pas encore assurée, « nous attendions que le groupement de pêche qui avait été désigné prenne la main sur l’exploitation », nous explique quasiment en état de choc Mounirou Ahmed Boinahery, Directeur des affaires générales à la mairie de Koungou, je ne trouve pas les mots, je suis effondré. »
Initialement prévu à 1 million d’euros, dont un financement européen FEAMP, et une participation du Conseil départemental, l’investissement avoisinait au final les deux millions d’euros, en raison d’avenants au contrat.
La même bande
Déjà autour du sinistre, les langues se délient. « Ce sont les mêmes jeunes qui ont incendié les engins du parc d’Eric Bugna, des gamins de Majikavo qui habitent sur les hauteurs. Du coup, les chantiers Colas ne peuvent être menés, notamment celui du raccordement des écoles au chemin de l’eau ou aux cuves de stockage », nous glisse un ancien agent de la mairie.
L’enquête démarre avec les premières constatations ce mercredi matin sur les lieux du sinistre.
A peine élu sénateur, Saïd Omar Oili s’était rendu dans la commune dont le maire lui avait apporté son soutien. Il nous fait part de sa « condamnation avec la plus grande fermeté » quant à cet incendie : « Comme la mairie de Koungou en 2021, ce sont des bâtiments publics qui sont visés. Les auteurs doivent être recherchés et traduits devant la justice. Demain, je suis reçu au cabinet du premier ministre, et j’évoquerai bien évidemment ces sujets. J’apporte tout mon soutien à la municipalité de Koungou ».
Anne Perzo-Lafond