Une délégation de l’Assemblée des Départements de France est en visite à Mayotte pour deux jours afin de faire le point sur la reconstruction après le passage du cyclone Chido, le 14 décembre dernier. Ce lundi 29 septembre, après avoir inauguré la PMI de Mtsamboro, la délégation s’est rendue à 19 h au siège du Service départemental d’incendie et de secours (SDIS) à Kawéni. L’objectif de la visite est de faire remonter les besoins du département au niveau national, afin que des acteurs comme le SDIS puissent obtenir les moyens nécessaires et se projeter à moyen et long terme.
Une saison 2025 longue et éreintante pour le SDIS

Principalement financé par le Département de Mayotte, le SDIS fait face à des difficultés aussi bien matériel que financière, d’autant plus que les incendies sont nombreux après Chido et que les pompiers interviennent toujours autant pour aider les services du SAMU.
Avec ses 7 unités opérationnelles réparties sur le territoire, le SDIS traverse une saison des feux longue et éprouvante, avec près de 100 hectares déjà détruits. Les 70 pompiers de garde sont mobilisés sur tous les fronts, mais un empilement de phénomènes rend leur tâche particulièrement difficile. Outre le manque d’eau, le cyclone Chido a abattu de nombreux arbres, réduisant l’humidité et bloquant les pistes, ce qui complique l’accès aux zones sinistrées. Les branches et troncs morts constituent autant de combustible prêt à s’embraser au moindre incident.
« Les équipes mettent plus d’une heure et demie pour se rendre sur les incendies et restent deux à trois jours sur le terrain », explique le colonel Patrick Clerc, directeur du SDIS de Mayotte, à la délégation des Départements de France, représentée par Nicolas Lacroix (président du Groupe DCI et du Département de la Haute-Marne) et Christophe Ramond (président de la Commission Relations internationales et du Département du Tarn).
La nécessité d’un moyen d’intervention aérien

« Le SDIS de Mayotte a été créé en 2014, la première Taxe Spéciale sur les Contrats d’Assurance (dont une partie est reversée au SDIS) a été versée en 2024, à hauteur de 3,6 millions d’euros, nous demandons la reconnaissance de la rétroactivité pour le Département », ajoute Patrick Clerc. « Il nous manque un moyen aérien pour appuyer nos équipes comme un hélicoptère porteur d’eau pour la saison. Louer un appareil coûterait 400.000€ pour quatre mois, le SDIS n’a pas les moyens actuellement ».
Le colonel évoque aussi le manque de cadres au sein du service, avec 20 cadres pour 730 sapeurs-pompiers, et deux ans passés sans directeur adjoint.
« Le budget 2025 de 42 millions d’euros, ne suffit pas à assurer salaires et vacations en fin d’année. Nous demandons une rallonge pour pouvoir réparer notre bâtiment, faire fonctionner et maintenir nos véhicules », continue Patrick Clerc, « sans moyens, nous ne pouvons pas travailler correctement. Le travail est fait, mais dans des conditions difficiles ».
« Nous avons beaucoup de demandes, les jeunes veulent rejoindre le SDIS, on n’a pas de problèmes d’attractivité ici, mais il nous faut des moyens. Quelle est l’ambition du territoire derrière tout ça ? », demande le colonel.
Les Départements de France, un « rôle d’alerte » auprès de l’Etat

« Les SDIS sont financés par les départements et le bloc communal. Mais on arrive progressivement à un point de blocage les pompiers vont déjà bien au-delà de leur mission, avec un budget restreint », reconnaît Nicolas Lacroix.
« C’est l’asphyxie pour les Départements. À Mayotte, c’est encore plus terrible avec une pression démographique énorme et des besoins d’investissement à tous les niveaux. Il faut une vraie péréquation pour permettre au SDIS de se projeter à l’horizon 2030, 2040, 2050″, renchérit Christophe Ramond. « L’objectif de cette visite est d’écouter vos messages. Mais aujourd’hui, sans gouvernement, nous n’avons plus d’interlocuteurs. Notre rôle est aussi de faire passer un message de solidarité avec Mayotte. La semaine prochaine, au congrès national des pompiers, il faudra tenir compte de ces spécificités. L’État a un rôle essentiel à jouer. Face à l’exercice difficile qui est le vôtre, nous ne pouvons qu’exprimer admiration et solidarité ».
« Après Chido les départements se sont mobilisés à hauteur de 7 millions d’euros, le but de cette visite c’est de créer des passerelles, trouver des solutions, et de faire reporter les spécificités de Mayotte auprès du futur Gouvernement », relève Christophe Ramond, « il faut se battre pour que les collectivités territoriales puissent bénéficier de moyens suffisants pour vivre bien à Mayotte et partout en France ».
« Notre levier c’est de jouer le rôle d’alerte, on doit continuer de sensibiliser le Gouvernement, il faut de la justice sociale, de la justice fiscale et déployer les moyens là où on en a le plus besoin, et à Mayotte on se rend compte qu’il faut un soutien fort de l’Etat », insiste Christophe Ramond.
La délégation poursuivra sa visite ce mardi 30 septembre à Dembéni et Sada pour cette-fois ci soutenir les agriculteurs et les éleveurs.
Victor Diwisch