« J’avais besoin de sortir, de rencontrer du monde. Ici, je parle avec des mamans de La Vigie, de Pamandzi, même parfois des épouses de militaires. C’est un endroit où les gens se mélangent », explique une mère de famille, qui a participé à la matinée de partage pour célébrer la première année d’activité du Lieu d’Accueil Parents-Enfants (LAEP) de Petite-Terre, vendredi 11 juillet.

Inaugurée le 8 juillet 2024, la « Maison Jaune », située au 8 rue Jeanne d’Arc à Pamandzi, aux abords du quartier de La Vigie, est rapidement devenue un véritable « point de repère confortable et bienveillant », selon les mots d’Adrien Michon, directeur de la politique de la Ville et de la cohésion sociale au sein de la Communauté de Communes de Petite-Terre. Pour de nombreuses familles et enfants, ce lieu est devenu une seconde maison, où se tissent des liens et naissent des amitiés.
145 enfants et 107 familles accueillis en un an
« Je suis venue ici pour que ma fille, qui est fille unique, voir d’autres enfants avant de rentrer à l’école », témoigne une autre maman, « ici c’est calme, adapté, et elle apprend à se comporter avec les autres ». « Après Chido nos maisons étaient détruites, il n’y avait plus de jouets. Le seul endroit où c’était presque normal, c’était ici », ajoute une autre, signe de l’ancrage du lieu dans le quartier, seulement quelques mois après son inauguration. Signe aussi que la formule fonctionne pour la population qui a progressivement « découvert le lieu via les orientations de la PMI (Protection Maternelle et Infantile) ou par le bouche-à-oreille », précise la Communauté de Communes de Petite-Terre, qui a porté le projet de création d’un tel lieu.

Gratuite et sans conditions, la maison est ouverte quatre jours par semaine, de 9 h à 11 h puis de 14 h à 16 h, pour accueillir parents et enfants de 0 à 6 ans, désireux de mieux se connaître et de construire leurs relations en dehors des domiciles parfois précaires. Elle propose également un soutien scolaire aux jeunes, ainsi que divers ateliers de cuisine et de couture, afin de permettre ensuite aux parents de développer une activité économique.
En l’espace d’un an, le LAEP de Petite-Terre a accueilli 107 familles, avec 145 enfants inscrits. La fréquentation s’est révélée particulièrement élevée les mercredis et les vendredis, avec un pic notable pendant les vacances scolaires. Conscient du manque d’alternatives disponibles pour les familles durant ces périodes, le LAEP a fait le choix de maintenir ses activités pendant les vacances, afin de continuer à offrir un espace d’accueil, d’échange et de soutien adapté aux besoins des parents et de leurs enfants. Le LAEP va également proposer une « ouverture test » le samedi matin de 9 h à 12 h d’août à décembre 2025, et le premier et le dernier samedi de chaque mois, pour continuer à s’adapter aux familles, notamment les parents actifs pour partager des moments avec leurs enfants malgré leurs contraintes professionnelles.
Un rôle primordial sur un territoire en manque de structures et au taux de fécondité élevé

Les données démographiques soulignent l’ampleur des besoins sociaux à Mayotte. En 2024, l’île compte environ 321.000 habitants dont 67.400 enfants âgés de 0 à 6 ans, un chiffre élevé lié à un taux de fécondité de 4,4 enfants par femme (contre 1,8 en métropole). Pourtant, Mayotte ne dispose que de 2 LAEP soit 1 pour 160.500 habitants et 33.700 enfants. À titre de comparaison La Réunion compte 20 LAEP, soit 1 pour 43.558 habitants, et par exemple l’Ille-et-Vilaine en métropole dispose de 28 LAEP, soit 1 pour 39.615 habitants.
« Même si les contextes familiaux varient, ces chiffres mettent en évidence un important déficit d’équipements à Mayotte, comparé à d’autres territoires ultramarins ou métropolitains », relève la CCPT, qui insiste sur le rôle d’autant plus important du LAEP.
Et pour renforcer et développer ses actions le LAEP a prévu différents projets pour sa deuxième année. Vendredi, la CCPT et la bibliothèque de Pamandzi ont signé une convention de partenariat, pour pérenniser les séances « Bébés Lecteurs », des animations autour de la lecture pensées pour les tout-petits qui ont déjà trouvé leur public et seront désormais proposées chaque mois.
Développer ses activités pour toucher encore plus de familles

Le LAEP prévoit également de créer des ateliers massage pour les 0–3 ans, des ateliers jeux d’éveil pour les tout-petits, des groupes de parole autour de sujets de société comme la malnutrition, l’utilisation des écrans, mais aussi de créer un service itinérant pour aller à la rencontre d’autres quartiers. « Notre souhait est de pouvoir, à moyen terme, se rapprocher encore davantage des familles en développant l’itinérance », confie Adrien Michon, « la montée en compétences des équipes est également souhaitée et augure de belles perspectives ».
« Ce lieu n’est ni une crèche, ni un centre de soins. Il est plus profond, plus fondamental », souligne Chamssia Mohamed, première Vice-Présidente de la CCPT, « c’est un refuge pour les liens familiaux, un espace de parole, de jeu, de présence. Le LAEP n’est pas qu’un lieu, c’est une communauté, un lien vivant, une maison du possible ».
Victor Diwisch