Comme pour illustrer leur démarche dès le départ par un symbole fort, c’est devant la mairie de Koungou incendiée lors de la destruction du quartier insalubre de Carobole que le cortège s’est élancé. En septembre 2021, ces opérations de destruction ne s’appelaient pas encore Wuambushu, et pourtant, elles furent menées sur des surfaces de grande ampleur en s’appuyant sur la loi Elan. Ainsi, sur ce site au cœur du village de Koungou qui jouxte la mairie, ce sont 350 cases qui ont été détruites.
Une opération « douloureuse » rappelle Mélanie Guilbaud, DGA développement urbain, puisque des menaces avaient été proférées à l’encontre du maire, de sa famille, et de plusieurs élus à l’époque. Allant donc jusqu’à l’incendie de la mairie de Koungou.
Un espace sur lequel la végétation a depuis repris le dessus, et où doivent s’ériger 420 logements. C’est pour fêter cette phase de reconstruction que le service aménagement urbain de la mairie a initié une action originale : défiler en voiture sur l’ensemble de Grande Terre, en annonçant au micro que « Koungou construit les logements de demain ».
« L’idée d’un cortège festif est davantage anglo-saxonne, en France, c’est le plus souvent une forme de manifestation contre des violences ou des injustices. Nous avons voulu marquer la joie de voir ce projet aboutir un an et demi après sa destruction, pour les habitants dont 200 ont signé une convention de relogement, et pour les élus qui ont souffert pendant cette période. La commune a été secouée pendant un moment par les violences », souligne Mélanie Guilbaud.
Rassurer les habitants
A ses côtés, Yasmine Nidhoire, l’adjointe au maire chargée de l’aménagement qui prendra la tête du cortège : « Par cette action, nous voulons rassurer les habitants en leur disant c’est bon, on y est, on va pouvoir lancer la construction. Il faut aussi comprendre que 420 logements à sortir de terre, cela ne se fait pas en quelques semaines. »
Pas question de reproduire des erreurs de densification d’habitat qui ont été faite sur la commune, et les immeubles érigés au-dessus de nos têtes en sont la preuve, soutient Mélanie Guilbaud : « Les modalités d’aménagement ne seront pas les mêmes que sur l’ensemble d’immeubles en Petite Terre ou qu’à Cavani. Nous aurons des vastes espaces publics où la nature doit avoir sa place. Sinon, on va faire comme en métropole, avec des quartiers ramassés sur eux-mêmes où sévit la délinquance. Nous sommes plus sur un mode de ZAC Hamaha. »
Un choix pas toujours facile, étant donné le différentiel de coût entre un ensemble d’immeuble, et un vrai aménagement de villages. « Ce n’était pas simple, car le code des marché publics est strict. Et c’était nouveau pour les élus qui ont emmagasiné ainsi de l’expérience. »
Le modèle retenu est la concession aménagement où les études et l’aménagement sont réalisés par le même groupement. Ici c’est l’union « SIM-Colas » qui a décroché le marché, « à travers ce projet, ils vont chercher à décrocher ensuite le label ‘Ecoquartier’ ». C’est à dire un projet d’aménagement urbain visant à intégrer des objectifs de développement durable et réduire son empreinte écologique. La concession d’aménagement du quartier de Carobolé sera signée ce vendredi 23 juin à Koungou.
C’est aussi ce message que l’équipe veut faire passer : « Nous voulons transmettre cette vision aux autres communes de l’île ».
Sono à poste fixe et pancarte en vue, top départ du cortège de la reconstruction ce mardi à 8h30, qui s’élançait vers le Nord, a fait le tour par l’ouest, le Sud, l’Est, Mamoudzou… avec trois voitures aux plaques impaires un mardi de banissement, « mais la cause est juste ! », lançait l’un des agents, puis retour à Koungou. Mercredi et jeudi, ils sillonneront les 6 villages de la commune.
Anne Perzo-Lafond