Devant initialement prendre effet dans le courant de l’année dernière, ce démarrage opérationnel s’est vu reporté quasiment d’un an, au lundi 1er mai 2023, histoire de laisser aux entreprises rattachées au secteur du bâtiment le temps de se préparer. Depuis le 1er janvier 2023, ces mêmes entreprises se devaient, dans un premier temps, d’adhérer obligatoirement auprès d’un des éco-organismes agréés par l’État français. Organismes qui se veulent spécialisés en fonction de la catégorie de déchets visées. En somme l’équation est simple : pollueur = payeur. Cette taxe est déjà en place depuis bien longtemps auprès de 15 filières pour d’autres produits de types chimiques, ameublement, produits électriques ou encore électroniques pour ne citer que cela. Visant de meilleures prévention et organisation quant à la gestion des matériaux en fin de vie, les filières REP misent aussi sur l’engagement des fabricants et/ou distributeurs de ces divers produits polluants. Pour les Pmcb, il existe 4 éco-organismes : Valdelia, Valobat, Écominero et Écomaison*.
Concrètement, qu’est-ce que cela va changer ?
Plus de conscience, d’implication et de responsabilité de la part des concernés; là est le légitime but initial escompté. Selon les ministères de la Transition écologique, de la Cohésion des territoires et de la Transition énergétique, rien que le secteur du bâtiment, c’est près de 19 % de la production de déchets du BTP; soit 46 millions de tonnes par an (pour donner un ordre d’idée comparatif annuel, les déchets ménagers c’est 30 millions de tonnes). Cette production de déchets est liée à hauteur de 13% aux constructions neuves, 49% à la démolition et 38% à la réhabilitation.
Cette éco taxe n’impactera pas directement les artisans et PME du secteur mais cela va sans dire qu’une ’’petite’’ partie de cette contribution sera injectée dans les prix de vente des produits concernés (qui elle même représentera une légère inflation sur la facture finale client. Effet domino qui ne sera pas forcément visible sur les devis établis, sachant la non obligation législative d’indiquer le détail de toutes les éco-contributions correspondant aux matériaux utilisés sur leurs chantiers). Une majoration qui se veut dans un premier temps minime. Cela implique donc les isolants, les cloisons, les charpentes, les revêtements, les colles, vernis, résines, les systèmes de réseaux chauffage, évacuation, alimentation… En gros, la quasi totalité des matériaux et produits relatifs aux larges panel BTP.
Chaque année, un barème est édité par les respectifs éco-organismes prenant en compte l’évolution des prix du marché, les matériaux concernés, leurs volumes, les critères de recyclage, la distance des points de reprises etc. mais également le profil et les contraintes rencontrées pour les entreprises en question.
Deux catégories de déchets BTP se distinguent : les déchets dits inertes, tels que le béton, les briques, les granulats…ainsi que les déchets non inertes (carton, bois, métaux, plâtre, verre, plastiques). Le tri distinctif de ces flux offrira paradoxalement une opportunité financière pour les précités concernés. En effet, les artisans et/ou TPE-PME qui s’engageront à trier leurs déchets chantier, et à les déposer dans les points de collecte identifiés, pourront bénéficier d’une reprise sans coût supplémentaire. La reprise des matériaux non triés continuera en revanche d’être facturée au prix fort. Il est à noter que les emballages de matériaux ne sont pas dans l’immédiat intégrés à la filière; cela concernera une autre REP qui prendra effet d’ici 2025.
Une taxe qui n’en est pas vraiment une…
Dans les grandes lignes, une taxe est plus ou moins liée au Gouvernement, au regard de ses valorisation et perception. Hors, dans ce cas précis, aucun encaissement ni re-distribution de la part étatique; tout se centralise au niveau de la responsabilité des 4 éco-organismes agréés.
Le but étant, appuyé de ces efficientes gestion et traçabilité des déchets, de soutenir les collectivités locales et opérateurs privés concernés en les soulageant financièrement dans leurs missions de collecte et de recyclage. C’est plutôt mathématique : moins de volumes déchets à traiter = moins de frais de gestion = moins d’impôts locaux relatifs à la taxe d’enlèvement des ordures : « À travers cette initiale perspective d’une énième taxe supplémentaire, il faut bien entendre que cela va permettre la mise en place d’un système vertueux de recyclage » nous indique Frédéric Polenne, directeur d’ETPC Mayotte, avant de poursuivre : « notre groupe présente déjà l’avantage d’avoir un réseau en place permettant de ramener, à même le site d’achat, les matériaux déchets concernés. La réutilisation possible de ces matériaux triés permettra d’économiser les ressources naturelles limitées, surtout sur notre île ».
Une nouvelle notion de déconstruction et de recyclage qu’il faut donc intégrer pour ces professionnels de la construction permettant ainsi de repenser la conception de leurs produits. Concernant les entreprises de travaux, il leur est offert la possibilité de s’acquitter enfin de ces frais liés au traitement de leurs déchets, dans le cas où elles joueraient pleinement le jeu de leurs responsabilité et implication environnementales. Un jeu gagnant-gagnant qui permettra à l’issue la baisse globale du coût du traitement des déchets dans ce secteur d’activité.
MLG
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- Écominéro: déchets inertes (béton, granulats, céramique, etc.),
- Écomaison: déchets non inertes (bois, métal, plastique, menuiseries, plâtres…),
- Valdelia: déchets non inertes,
- Valobat: déchets inertes et non inertes.