« Ce projet est dans la continuité de notre volonté politique et s’inscrit dans le cadre du schéma d’aménagement. Nous souhaitions valoriser ce lieu et faire en sorte que la population puisse s’alimenter avec des produits locaux ». Comme le rappelle le maire de Bandrélé, la genèse de cette aventure agricole inédite résulte d’une vision stratégique : mettre en œuvre un système alimentaire ancré dans le territoire et fournir les marchés locaux de produits issus de l’agriculture locale.
Valoriser les terres agricoles
Pour y parvenir, la municipalité a décidé, en partenariat avec l’Etablissement Public Foncier d’Aménagement de Mayotte, de valoriser les 19 hectares du site de Mro Mouhou – dont 13 appartiennent à la municipalité de Bandrélé et 6 au Conseil départemental. Suite aux études de faisabilité pour la constitution du pôle agricole en 2019, les institutionnels ont dû procéder à des négociations puisque « le terrain était occupé de manière illégale par des personnes », rappelle Ali Moussa Moussa Ben. Afin de pacifier les relations, de juillet 2021 à mai 2022, la municipalité a participé à des négociations et procédé à l’indemnisation des occupants illégaux. Une solution à l’amiable visant à s’assurer que les relations avec les agriculteurs puissent se développer sous le signe d’une entente cordiale.
Professionnaliser la filière agricole
Depuis mai 2022, les 11 agriculteurs professionnels sélectionnés par la commission d’attribution des parcelles ont débuté leurs installations sur le site. « Nous avons procédé à cette sélection avec les partenaires institutionnels au regard de la qualité de leur projet », informe Yves-Michel Daunar, directeur général de l’EPFAM. Publié en octobre 2019, l’appel à projet nourrissait l’ambition d’attirer des agriculteurs et éleveurs de tout Mayotte. Qu’il s’agisse de maraîchers, de pépiniéristes, d’éleveurs de volailles, de cultivateurs de vanille de cacao ou encore d’ananas, tous attendent désormais de pouvoir entrer dans la phase opérationnelle en développant leur activité.
De nombreux aménagements sont encore attendus par les nouveaux exploitants, tels que la création de
chemins pour accéder aux parcelles ou encore l’installation de clôtures pour sécuriser le lieu. Si pour certains agriculteurs, cette situation engendre d’ores et déjà des désagréments, le maire de Bandrélé n’a pas manqué de rappeler qu’il s’agit « d’un projet qui avance étape par étape », précisant que des communs sont notamment prévus pour stocker le matériel.
Un enjeu de sanitaire non négligeable pour Mayotte
Ce projet de pôle agricole représente au-delà de l’aspect économique, en professionnalisant la filière agricole de l’île, un véritable enjeu de santé publique. La population sera en mesure de pouvoir consommer des produits locaux dont la traçabilité sera assurée. Un gage de qualité au regard des produits consommés en bord de route dont l’origine est souvent inconnue. A ce titre, le représentant de la Direction régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt fait savoir que la DAAF « travaille actuellement à l’Agence Régionale de Santé pour mettre en place une étude sur la qualité des produits vendus en bordure de route et leur impact sur la santé de la population ».
La filière bio à développer sur l’île
Pour Hassani, agriculteur sur le site de Mro Mouhou, le choix de se lancer dans une production bio relevait de l’évidence : « beaucoup de monde demande ce type de produits, je voulais la certification car les gens sauront ce que je fais ». Actuellement en attente de cette certification, l’appellation bio oblige, en effet, outre des conditions de production particulière, à renforcer la traçabilité des aliments. « Avec le bio, il faut que tout soit tracé », informe-t-il. A juste titre, l’agriculteur en est conscient « il y a un vrai enjeu de santé publique que de développer la filière bio à Mayotte ».
Une aubaine pour l’île, à la fois pour sa filière agricole mais aussi pour la population, d’autant que les partenaires du pôle agricole de Mro Mouhou nourrissent encore d’autres projets. Une étude de faisabilité est bientôt attendue afin d’étudier l’implantation d’un abattoir sur le site.
Pierre Mouysset