Les palettes s’entassent dans un camion benne, et à 19h, il n’y avait plus d’obstacles sur la route à Koungou. Les voitures ont aussitôt envahi la route, et, torses nus par cette chaude soirée, des passants chantaient, « on a gagné ! » Les « barragistes » nous expliquent la situation: « Les chefs de barrages nous ont demandé d’enlever les obstacles, ils vont nous détailler les avancées après. »
A la suite de la longue réunion de 7 heures ce dimanche où le préfet Dominique Sorain s’engageait sur plusieurs points dont l’application des décisions judiciaires d’expulsion, et la création d’un groupe d’enquête spécialisé dans la lutte contre les filières d’immigration clandestine, le Collectif des Citoyens de Mayotte et l’intersyndicale se sont réunis entre eux ce lundi à Dembéni, avec les chefs de barrages pour se concerter sur la suite à donner au mouvement social entamé depuis le 20 février 2018.
Dans un communiqué (Lire Compte rendu de la réunion Dembéni du 01 Avril 2018), ils se disent satisfaits de 5 premiers points : l’arrivée d’un délégué mandaté, la confirmation que l’outil de travail sera bien leur plateforme, l’élaboration d’un plan de développement pour Mayotte « engageant le gouvernement », la non-remise en cause du statut du département, et la mise en place d’un comité de suivi à l’issu des travaux thématiques.
Un travail serein
Des négociations ont donc commencé, et, comme ils s’y étaient engagés, bien qu’avec un jour de retard, les organisateurs du mouvement ont demandé la levée des barrages, « dès ce soir », « pour permettre la mise en œuvre des mesures d’urgences et favoriser un travail serein sur nos revendications avec la délégation interministérielle ». Mais tous les leaders ne sont pas sur la même longueur d’onde, puisque la demande de levée émane du Collectif des Citoyens de Mayotte et de « la majorité des syndicats ».
En effet, selon nos informations, les syndicats FO, et le SNUipp, n’étaient pas favorables à cette issue. En conséquence, c’était un peu le flou ce lundi soir puisqu’on apprenait que Tsararano était au contraire renforcé, ainsi que Longoni, point stratégique de passage pour la livraison des containers. Dembéni était ouvert.
Quand les Russes s’en mêlent
Il faut dire que le conflit avec les Comores sur le refus d’accueil des reconduites, continue de peser sur cette fin de mobilisation, puisqu’ils sont tous d’accord pour préciser « qu’en l’absence d’un signal fort adressé à la population sur la lutte contre l’immigration clandestine à ce jour, la grève reste maintenue ; toutefois elle pourra se manifester sous d’autres formes. Nous demeurons vigilants. »
Sur ce point, le préfet Dominique Sorain a confirmé à Mayotte la 1ère, la décision de ne pas délivrer de visas aux officiels comoriens, sans que l’on sache si c’est une mesure ponctuelle de leur délégation qui se rendait la semaine dernière à Bruxelles, ou s’il s’agit d’une décision de plus grande ampleur. « D’autres actions sont entreprises », rajoutait-il.
Le ministre des Affaires étrangères des Comores, Mohamed El-Amine Soeuf, dénonçait un « chantage » de la France. Il appelait la France à « supprimer immédiatement le visa Balladur », en menaçant de représailles, notamment de rompre « les accords monétaire et de défense », nous apprenait le site actu-comores.com. Les autorités comoriennes assurent qu’un autre pays semble plus empressé à collaborer, la Russie, notamment en terme d’autonomie monétaire ou de défense, « des accords seront prochainement signés entre les deux pays », a assuré le ministre.
Anne Perzo-Lafond
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