Carrière de Kangani : la quête du Saint Graal pour Vinci qui doit encore attendre

Ce n’est pas vraiment un rebondissement dans l’affaire de l’exploitation de la carrière de Kangani, tant on est habitué à du plus gros calibre. Mais un nouvel arrêté préfectoral repousse encore la date de sa mise exploitation par la Société des Carrières de Mayotte, filiale de Vinci Construction DOM-TOM.

Pour la 2ème fois, un vice de forme retoque l’enquête publique relative à la demande d’autorisation environnementale introduite par la Société des Carrières de Mayotte pour exploiter la carrière sise à Kangani. Depuis le 15 septembre 2015, date de la cession de la carrière par feu-Frédéric d’Achery, ancien maire et conseiller départemental de Koungou, à la filiale de Vinci, celle-ci a pu à peine y mettre les pieds, et même ça, ce fut compliqué. Huit ans émaillés de vives tensions avec celui qui exploitait jusqu’alors la carrière, Théophane Narayanin, patron d’IBS (Ingénierie Béton Système), dit « Guito ».

Des tensions qui sont la transposition de conflits déjà existants entre ce dernier et le propriétaire de la carrière, feu-Frédéric d’Achery, ancien maire et conseiller départemental de Koungou. L’ancien élu reprochant à son locataire des loyers impayés sur un périmètre d’exploitation grignoté. Le point d’orgue fut une bousculade entre les deux hommes en 2013 sur le site même de la carrière, dont l’issue fut une nouvelle fois, judiciaire.

Salariés et habitants affichent la couleur

Avant de décéder des suites d’une agression au marteau chez lui, l’ancien élu de Koungou, avait décidé de vendre sa carrière à Vinci, en 2015 donc. Acte de nombreuses fois contesté par Guito, mais débouté par le tribunal administratif qui demande au préfet en 2019 de faire intervenir la force publique pour déloger IBS de la carrière.

Des habitants en pare-feu

En 2020, les dirigeants de Vinci souhaitant se rendre sur le site dont ils sont désormais propriétaire sont empêchés par des habitants de Kangani et des salariés d’IBS, tout cela se finissant, après intervention des forces de l’ordre, devant la barre du tribunal avec ordre de libérer l’accès au propriétaire de la carrière.

Vrai coup de théâtre en juin 2022 quand une cohéritière de Frédéric d’Achery parvient à faire casser la vente de ce dernier en 2015, invoquant un prix de rachat « dérisoire », mais elle perd en 2ème instance.

Ces atermoiements sont ponctués de descente dans la rue d’habitants du village qui défendent systématiquement IBS, « en raison de travaux de maintenance que celle-ci opère à Kangani », nous avait expliqué un dirigeant de la société. Rebelote il y a deux semaines, le village a de nouveau été bloqué. Était principalement demandée la construction d’une route de contournement pour les camions dans la perspective d’une augmentation des rotations lors du proche début d’exploitation de la carrière par la Société des Carrières de Mayotte.

De la place pour deux

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De la matière première à sécuriser étant donné les nombreux chantiers en attente à Mayotte

Une date de nouveau repoussée suite à l’arrêté du préfet, alors que les carnets de commande du BTP sont remplis et que l’autonomie en matière première devient un vrai enjeu stratégique pour Mayotte, le président Macron l’avait souligné à propos de la piste longue.

Des délais à rallonge que déplore le directeur de Vinci Construction DOM-TOM Damien Riestch que nous avons joint au téléphone : « Bien que l’entreprise soit propriétaire de la carrière depuis 2015, nous n’avons toujours pas pu commencer l’exploiter. Et les faits montreront qu’il y a de la place pour deux puisque le directeur d’IBS a reconstruit son exploitation à côté, sur un site qui communique avec celui de Vallée III. Nous ne voulons pas qu’il arrête, mais que nous puissions travailler de concert. Ce nouvel arrêté du préfet est un énième rebondissement, nous espérons que c’est le dernier. »

De son côté, Théophane Narayanin s’apprête de nouveau à passer devant les tribunaux, pas contre Vinci cette fois, mais parce qu’accusé de « participation et association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un délit » dans le cadre de l’agression physique en 2016 de l’avocate de Frédéric d’Achery, ou plutôt de sa collègue, les 4 commandités s’étant trompé de cible.

On espère s’acheminer vers la fin d’une guerre de cailloux, du moins sur ce terrain là…

Anne Perzo-Lafond

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