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Conditions de travail, salaire, port du masque, vaccin… une rentrée chargée pour le rectorat de Mayotte

Pas de pass sanitaire mais le masque dès le CP. Pas d'obligation vaccinale mais une incitation claire. De nombreux élèves en plus à accueillir et des dizaines de postes d'enseignants... Qu'il reste à fidéliser. Une indexation alignée sur la Réunion (53%) est évoquée par le recteur, aux côtés d'autres mesures de confort de vie pour les professeurs de l'île. Les annonces du recteur sont légion en cette semaine de rentrée scolaire.

Tournée de rentrée pour le recteur Gilles Halbout qui est « allé à la rencontre des collègues, les nouveaux et ceux qui reviennent », en commençant ce lundi matin par le collège de Labattoir, un des plus grands de France avec 1946 élèves inscrits. Une petite ville.

L’occasion pour le capitaine du vaisseau « rectorat » de « donner les grandes lignes » de cette année scolaire qui commence.

En premier lieu, sur la situation sanitaire, le rectorat part sur un serrage de boulons préventif. « Sur le protocole sanitaire, nous allons l’aligner sur celui de la Réunion, un protocole renforcé de niveau 2, car même si Mayotte est en vert, nous sommes vigilants, donc le protocole est dans le jaune. Donc c’est le port du masque dès le CP, un renforcement des mesures de nettoyage dans les salles de classe, une vigilance pour les activités sportives, les gestes barrière, le lavage des mains et le brassage ». Un protocole qui tient compte des plus précaires et qui vise la sécurité. « Nous distribuerons des masques pour les familles qui n’auront pas pu faire les achats. Nous avons réactivé notre cellule sur les cas contacts. Dans le primaire dès qu’il y a un cas, on ferme la classe, et comme l’an dernier dans les collèges et les lycées, quand il y a un cas on étudie les cas contacts à risque, ces élèves là sont isolés ».

Dans ce « dispositif de prévention de l’expansion de l’épidémie, la vaccination est un élément à prendre en compte » poursuit le recteur qui, s’adressant à la centaine de professeurs du collège de Labattoir présents pour cette pré-rentrée, a dit croire en « l’intelligence collective » et au « bon sens » des enseignants. Le tout avec un esprit d’ouverture. « Il n’y a pas de passe sanitaire, il n’y a pas d’obligation d’être vacciné, mais on le sait aujourd’hui, la vaccination ralentit la diffusion du virus, elle limite aussi les cas graves, on a 10x moins de chance d’aller en réanimation quand on est vacciné, mais ce n’est pas le seul, donc on reste mesurés, prudents, la vaccination n’est pas tout mais c’est quand même un plus. On permettra aux familles qui le veulent, sur la base du volontariat, de faire vacciner leurs enfants. On enverra des courriers dans toutes les langues pour le rappeler, la vaccination n’est pas obligatoire, mais elle est possible, elle est recommandée, et on fera tout pour aider les autorités sanitaires à déployer des centres de vaccination. » Une prise de position claire qui « n’empêche pas le débat » sourit toutefois le recteur, invitant en substance les enseignants à se saisir de cette thématique d’actualité pour ouvrir la discussion avec les élèves.

Une pédagogie qui sort du seul cadre scolaire

Des élèves qui sont aussi bien sur au cœur du projet pédagogique, qui s’inscrit particulièrement à Mayotte dans une prise en compte des problématiques du territoire, aux premiers rangs desquels l’illettrisme et les violences.

« Pour la pédagogie, nous allons continuer à développer notre projet académique. A Mayotte, il y a trois points saillants. D’abord une réflexion sur l’éducation prioritaire, c’est donner plus à ceux qui en ont le plus besoin, avec à Mayotte une réflexion sur la convergence des dispositifs REP, REP+ et un alignement par le haut évidemment. Nous commençons aussi un certain nombre d’expérimentations dans des territoires qui ne sont pas REP+ mais dans lesquels nous voulons renforcer l’éducation prioritaire, avec des mesures nouvelles et un accompagnement spécifique. Le 2e point, c’est la différenciation, c’est traiter différemment les élèves qui sont en grave difficulté pour qu’ils ne cumulent pas ces difficultés d’années en années, car on a des élèves qui font toute leur scolarité sans avoir même les rudiments du français. En même temps il faut donner de l’appétence aux élèves qui veulent aller plus vite, aller plus loin, s’inscrire dans les cordées de la réussite, dans des parcours d’excellence, qui visent déjà des études supérieures de haut niveau. Il faut donc montrer à tous les élèves de Mayotte que tout est possible. Les chiffres le montrent, un élève de terminale à Mayotte a les mêmes chances que partout en France d’intégrer une très bonne école, encore faut il avoir la volonté d’aller jusqu’au bout, donc il faut accompagner dès le plus jeune âge.

Le troisième point, c’est la continuité éducative, c’est un travail que nous devons faire avec les associations de quartier : développer le tissus culturel, sportif, travailler avec les mairies et les élus pour que ce qui se fait à l’école continue à se faire ailleurs, avec des stages de remise à niveau, il qu’on permette aux parents d’apprendre le français, et qu’on ait encore plus d’écoles des parents, qu’on développe des lieux de culture, des lieux de sports, nous allons travailler avec la DAC pour accompagner l’émergence de nouveaux lieux culturels. Il est important qu’en dehors de l’école ces jeunes puissent continuer avec une vie associative, une vie de groupe, et qu’on en finisse avec ces guerres intervillages et l’errance des jeunes.

De « bonnes nouvelles » pour les profs ?

Bien sur, les élèves ont besoin du personnel qui fait vivre l’Education nationale. Or on le sait, Mayotte est soumise à un turn over important. Le manque d’offre de loisirs, le coût de la vie et l’insécurité ont raison de la motivation de nombreux professionnels qui désertent l’île. Les syndicats réclament depuis plusieurs années un certain nombre de mesures, et certaines ont été entendues.

Séquence selfie avant de partir dans une école de Pamandzi

« On a eu une grande réflexion sur les mesures à destination des personnels, sur l’enseignant du 21e siècle. Tous les ateliers du Grenelle de l’éducation ont débouché sur 12 propositions au niveau national, et au niveau local nous avons déployé ces propositions à travers notre feuille de route locale. Elle met en évidence un certain nombre de points qui étaient remontés par les organisations syndicales et sur lesquels nous voulons avancer » assure Gilles Halbout. « Je pense notamment à l’accompagnement des départ à la retraite, aux mesures d’attractivité, notamment l’ISG pour tous ceux qui viennent de métropole, mais aussi des mesures de stabilisation, on parle de l’alignement sur La Réunion pour l’indexation, on parle de mesures d’attractivité en termes de logement -des discussions seraient en cours avec la SIM sur ce volet NDLR-, on parle d’activité de loisirs et sportives, pour nos collègues, en lien avec le CD qui répond favorablement à cette proposition d’ouvrir aux personnels de l’Education national l’accès à des activités ludiques ou culturelles, et du coup les développer sur le territoire, et ainsi développer sur le territoire une nouvelle forme d’économie touristique, sportive et culturelle. C’est donnant-donnant. Ca fait partie des enjeux de la feuille de route. On a aussi des mesures sur les AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap), les AED (assistants d’éducation) et la revalorisation de la fonction de directeur d’école »
Autant de mesures d’attractivité mais aussi de fidélisation qui se faisaient urgentes, alors que le nombre d’élèves augmente d’année en année.

« Cette année on devrait avoir 2400 élèves en plus dans le premier degré, surtout avec le renforcement de la scolarisation des 3 à 6 ans, et environ 1500 élèves en plus dans le second degré, avec la lutte contre le décrochage scolaire, avec des places en plus en lycée, particulièrement sur les formations professionnelles, CAP et bac PRO » détaille le recteur.

Pour prendre en charge tous ces élèves, les professeurs titulaires manquent. « La part de contractuels reste la même, environ 20% dans le premier degré et 50% dans le second degré. En effet on a eu 155 postes en plus dans le premier degré, malheureusement le solde entre les entrants et ceux qui sont partis n’est pas de 155. Dans le 2nd degré, on a 110 postes en plus, et là encore le solde n’est pas de 110 donc le ratio reste le même, avec une 50aine de contractuels en plus. »

La pré-rentrée était aussi l’occasion de visiter les travaux du collège, métamorphosé au fil du temps

Parmi les solutions : former en local les contractuels, qui sont ainsi titularisés avec un engagement à Mayotte. La mesure existe déjà pour les professeurs des écoles et a vocation à s’élargir au second degré. « On espère à terme que les concours ouverts, spécifiques avec affectation à Mayotte (la seule chose qui change c’est que la 1e affectation est à Mayotte) porteront leurs fruits, la meilleure manière d’être attractifs c’est de former les personnels qui sont déjà sur place et espérer qu’ils vont rester pour lutter contre ce déficit d’attractivité ». Au moins, « les chiffres ne sont pas améliorés mais ils ne sont pas non plus dégradés cette année » conclut le recteur.

Le dernier grand volet de cette rentrée, c’est bien sur la sécurisation des établissements scolaires, de leurs abords et des transports en commun. Ce mardi le recteur a prévu une tournée des écoles, cette fois en présence du préfet. Nul doute que ce sujet brûlant tous les ans sera au coeur d’un certain nombre d’échanges.

Quelques chiffres clés :

Etablissements :

1er degré : 188 écoles publiques réparties dans 11 circonscriptions

11 lycées publics + 1 lycée sous contrat, 22 collèges publics

Effectifs d’élèves :

1er degré : +2391 élèves (+4,4%) il est prévu un rythme équivalent pour les trois années suivantes

2nd degré : +1483 élèves (+3,1%)

Emplois créés :

Enseignants : +155 dans le 1er degré et +110 dans le second degré soit 265 ETP.

Etablissements : +6 ETP (équivalents temps-plein) administratif dont 2 emplois de personnel de direction.

Infirmières : 48 ETP dont 20 CDD (4/5 CDD en cours de recrutement)

Assistantes sociales : 24 ETP dont 7 CDD.

Services civiques : dotation en augmentation forte 384 (rentrée 2021 contre 230 (2020)

Y.D.

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