Gérant de Maoré Assainissement Propreté (MAP) et de l’hôtel Trévani, Tanchiki Maoré poursuit un même combat : créer de l’emploi, offrir des repères et retisser la paix sociale. Pour les fêtes, il a lancé une tournée inédite : Minnie et Mickey sillonnent l’île pour aller à la rencontre des enfants, jusque dans les zones les plus enclavées.
Un entrepreneur qui refuse de tourner le dos à la jeunesse

À Mayotte, son nom revient souvent lorsqu’on parle d’insertion ou d’initiatives locales. Tanchiki Maoré dirige une société d’assainissement et un hôtel, mais il se présente d’abord comme un homme qui « depuis seize ans se bat pour la paix sociale et la jeunesse de Mayotte ».
Pour lui, pas besoin de grands discours, seulement une conviction : « On a une jeunesse défavorisée, donc j’essaye de faire ce que je peux pour accompagner et aider ». Très tôt, il s’investit auprès des adolescents du voisinage, d’abord ceux de 15 à 20 ans, puis de jeunes adultes en quête d’un emploi.
« Créer de l’emploi, c’est le vrai médicament de la paix sociale », insiste-t-il. Il raconte avoir financé des formations « de sa poche » pour donner une chance à ceux qui n’en avaient aucune. Il le dit simplement : « Je n’oublie pas d’où je viens. Je veux donner du rêve et de l’espoir… mais du rêve concret ». Un engagement patient, têtu, souvent solitaire.
Minnie, Mickey et le bus Rose : une tournée pour guérir par des sourires

L’initiative a surpris, puis enthousiasmé. Depuis quelques jours, un bus rose traverse Mayotte avec à son bord… Minnie et Mickey, qui débarquent dans les écoles, les centres spécialisés ou certains quartiers très défavorisés. « C’est parti d’une idée de deux jeunes filles de Dzoumogné », raconte Tanchiki. « J’ai signé un partenariat avec MAYMascotte, parce que 2024 a été catastrophique, et qu’on avait besoin d’apporter un peu de lumière ».
La tournée a commencé le 15 novembre et courra jusqu’au 28 décembre 2025. Objectif : 90 % des écoles et des structures de l’île. Les mascottes dansent, jouent, posent pour des photos. Dans le bus, des sacs de doudous attendent les enfants malades. « Je veux qu’ils aient le courage de guérir », dit-il.
Et pour ceux qui vivent dans des zones isolées, c’est le bus qui se déplace jusqu’à eux. « Certains enfants n’ont pas les moyens d’aller à Disney, d’autres n’ont même pas les papiers pour quitter l’île. Alors je me suis dit : on va leur offrir leur photo de Disneyland à Mayotte dont ils se souviendront toute leur vie ».
Tout est déjà planifié : l’école maternelle de Bambo, le centre de Nayma, le CHM, Dembéni… Jusqu’à la grande cérémonie de clôture à l’hôtel de Trévani, le 28 décembre, où les participants seront réunis une dernière fois. « Les écoles nous appellent spontanément maintenant. On a un numéro commun, un agenda, et on enchaîne », dit-il en souriant.
« La paix sociale, c’est l’affaire de tous »

Derrière l’événement festif, Tanchiki porte une inquiétude plus profonde. Mayotte traverse une crise sociale, sécuritaire et économique qui abîme l’île et son avenir. « Ce qui me tient à cœur, c’est la paix sociale, le climat social. Il faut qu’on soit ensemble, soudés, solidaires », plaide-t-il.
Son message vise autant les institutions que les habitants. « Si on ne s’occupe pas de la jeunesse, elle va grandir sans repères. Et ensuite, elle sera tentée de nous voler ou de nous agresser. C’est à nous de lui donner des clés, pour qu’elle grandisse avec un esprit positif ».
À travers un bus rose et deux mascottes géantes, il tente d’ouvrir une brèche contre la fatalité. D’offrir quelques minutes de joie à des enfants qui n’en ont pas souvent l’occasion. Et peut-être, au passage, de réparer quelque chose de plus grand : le lien entre une île et sa jeunesse.
Mathilde Hangard


