Une langue menacée de disparition
Langue discrète, parlée dans certains villages du nord et du sud de Mayotte, le kiboŝy n’a jamais bénéficié de politique linguistique forte. Sa vitalité repose encore aujourd’hui sur deux piliers fragiles : sa proximité avec Madagascar et sa territorialité unique à Mayotte. Mais pour ses défenseurs, cette situation ne peut durer. « Il est primordial de passer par les fondamentaux, à savoir l’écriture. Et pour cela, il nous faut un alphabet », insiste Boinali Toibib Toumbou le président de l’association Marovoanio, initiatrice du Programme de Validation Alphabétique Participative (PVAP).
Une démarche participative inédite

Plutôt qu’imposer une norme savante, le projet associe linguistes et locuteurs pour bâtir un alphabet réaliste et accepté par tous. « La science du terrain est essentielle, car c’est leur langue. La confrontation entre avis des experts et contributions de la population permet de rester au plus près de la pratique réelle du kiboŝy », explique le président.
Un enjeu générationnel et culturel
Au-delà de la question technique, l’enjeu est culturel et générationnel. Les locuteurs actuels du kiboŝy sont majoritairement âgés de plus de 40 ans. Pour l’association, il est urgent que la jeunesse se réapproprie cette langue, qu’elle considère comme un marqueur identitaire fort, un outil d’intégration régionale et même un levier de rayonnement culturel et économique pour Mayotte.
La menace du déclin
La menace est tangible : de Mamoudzou à Tsararano, là où le kiboŝy était largement parlé au XIXᵉ siècle, il est aujourd’hui presque inexistant. Plusieurs villages — de Mbouini à Hamjago, en passant par Ouangani, Bambo ou Chirongui — connaissent le même déclin. « Notre idée est de vitaliser et valoriser la langue, de sensibiliser, de protéger et, à terme, d’obtenir une reconnaissance politique. Nous espérons qu’un jour la population de Mayotte pourra s’exprimer avec dextérité à la fois en shimaoré et en kiboŝy », plaide l’association.
Un premier atelier à Acoua
C’est dans cette perspective qu’est lancé le Programme de Validation Alphabétique Participative. Le premier atelier se tiendra le dimanche 14 septembre à partir de 8h30 à la mairie d’Acoua. D’autres ateliers sont prévus à Mtsapéré, Poroani et Hamjago dans les mois à venir.
Nayar Said Omar