Un par un sous les applaudissements, les lauréats reçoivent leurs diplômes à l’hémicycle Younoussa Bamana du Conseil départemental, ce mercredi 28 mai. Tous formés à travers les cursus du Centre National des Arts et Métiers (CNAM), certains obtiennent le diplôme d’études universitaires scientifiques et techniques parcours conduite de travaux (DEUST, 2 ans), d’autres leur licence professionnelle Management et Conduite de Travaux (2 ans DEUST + 1). Après une formation en alternance, la majorité a déjà obtenu un emploi dans des entreprises mahoraises, et ont l’ambition de participer au développement de l’archipel.
Des formations ouvertes à tous

« Cette cérémonie a une signification particulière dans le contexte actuel de Mayotte qui fait face à un chômage de masse, notamment de la jeunesse, et qui en même temps connaît l’une des démographies les plus dynamiques de France », remarque Daoud Saindou-Malide, vice-président au Conseil départemental chargé de la formation professionnelle, de l’Éducation et de l’Insertion. « Il est primordial de continuer à développer et à diversifier les offres de formations qui profitent à tous et au territoire, nous avons besoin de vos compétences », ajoute l’élu en ouverture de cérémonie. Le Conseil départemental soutient le CNAM dans un partenariat visant à renforcer l’offre de formations professionnelles supérieures sur le territoire, en permettant l’ouverture de formations en présentiel et de locaux à Mayotte. Des formations qui sont ouvertes à tous, à condition d’être Français, et qui permettent à un grand nombre de profils de s’y retrouver, les étudiants, comme les personnes en réinsertion, ou bien celles qui souhaitent se professionnaliser. Les deux ou trois années s’opèrent en alternance, ce qui garantit un premier bagage professionnel et donne de la confiance.
« Avant j’étais intérimaire, je faisais des petites missions et un jour sur le chemin j’ai entendu à la radio qu’il y avait une formation qui allait s’ouvrir à Mayotte pour devenir conducteur de travaux », raconte Mourdi Abdou Oussene, 34 ans, fraichement diplômé de la licence professionnelle Management et Conduite de Travaux. « Depuis tout petit je voyais mon père faire de la maçonnerie, je voulais faire comme lui. Mais il m’a dit de faire mieux que lui, donc ça m’a motivé à devenir cadre », poursuit celui qui a désormais un CDI à Soliha Mayotte.

« Je m’occupe des aides de l’amélioration de l’habitat, depuis Chido beaucoup de personnes viennent nous voir pour être accompagnées. Mayotte souhaite se développer et cela passe par la construction, mais il n’y a pas assez de cadres voilà pourquoi ces formations sont importantes ».
Pallier le manque de cadres dans le BTP
« J’ai eu un parcours scolaire (diversifié), après un BTS maintenance des systèmes à Kahani, j’ai fait une année blanche pour des raisons administratives, j’ai ensuite fait mon DEUST en deux ans avant de poursuivre la licence », confie Soiouda Daoud Ali, 26 ans, qui a effectué les trois années en alternance au sein de l’entreprise Etanchéité Australe. « Il ne faut pas se dire que le BTP c’est un domaine de garçons et qu’on va être rabaissées. Il y a des hauts et des bas mais il faut y aller et on gagne sa place ». « Le CNAM a ouvert une voie dans un domaine où il y a peu de femmes. Mayotte est en construction on doit s’investir ! », renchérit Josiane Ali.

D’autant plus que le BTP est un secteur qui recrute. Le manque de cadres intermédiaires et supérieurs sur le territoire se fait sentir, et encore plus à l’heure de la reconstruction. Répondre à cette problématique est l’objectif de ces formations, qui sont habilitées par l’enseignement supérieur. « Le choix des formations dépend des besoins. On a fait une prospection auprès des professionnels du milieu du BTP, notamment la fédération et ils ont insisté sur le manque de cadres », explique Antufati Bacar, directrice du CNAM Mayotte, qui a ouvert la première promotion du DEUST en 2023. « Souvent les entreprises recrutent à l’extérieur et il y a un grand turnover, les personnes repartent et les chantiers restent en souffrance. Le but est donc de former des locaux dont on espère qu’ils restent sur le territoire ».
L’enjeu de ces formations est aussi de montrer aux jeunes que le BTP est un métier d’avenir, dans lequel il est possible d’évoluer. Un message que n’arrive pas forcément à faire passer directement les entreprises. Au-delà du BTP, le CNAM Mayotte espère pouvoir prochainement mettre en place des formations dans l’économie bleue, également un secteur d’avenir pour Mayotte.
Victor Diwisch