Ce lundi 7 avril, la préfecture de Mayotte a annoncé la destruction de soixante-treize habitations jugées « insalubres » à Dzoumogné, dans le cadre d’une opération de décasage. Si cette mesure s’inscrit dans un objectif de lutte contre l’insalubrité et la libération de terrains pour la construction d’une école, elle met en lumière la question cruciale du logement à Mayotte, un territoire où le déficit de logements sociaux est particulièrement marqué. Cette situation soulève des interrogations sur les solutions proposées pour reloger les habitants concernés et sur la gestion de cette crise du logement.
Un déficit de logements sociaux accentué par l’urbanisation rapide

Mayotte, à la fois île et département français, connaît une forte pression démographique et une urbanisation rapide. Ce phénomène, combiné à un manque d’infrastructures adaptées, entraîne un déficit de logements sociaux important. Selon certaines estimations, une large proportion de la population vit dans des conditions précaires, souvent dans des « bangas », des habitations informelles en tôle. Les autorités, dans un contexte d’insalubrité croissante, justifient ces opérations de démolition par la nécessité d’assainir certains quartiers et d’améliorer les conditions de vie.
Des solutions de relogement insuffisantes

Cependant, si l’objectif affiché de ces démolitions est de lutter contre l’insalubrité et de réhabiliter certains espaces, la réalité sur le terrain est plus complexe. Les familles qui se retrouvent sans logement après ces démantèlements sont souvent confrontées à une situation d’urgence, dans une île où les places d’hébergement d’urgence sont limitées et où les projets de logements sociaux peinent à répondre aux besoins. L’association Solidarité Mayotte, qui accompagne les demandeurs et les personnes en situation d’exclusion, ne disposait avant le passage du cyclone Chido, que de 524 places réparties dans différents logements, souvent saturés, où les places disponibles sont attribuées prioritairement aux femmes avec enfants et pour de courtes périodes, 21 jours en moyenne, dans des conditions spartiates, jusqu’à cinq par chambre.
L’absence de chiffres précis
Lundi matin, sur le terrain, à Hacomba, la question du nombre exact de personnes impactées par ce décasage a été soulevée par les journalistes présents. Le préfet a répondu que, compte tenu du caractère informel de ces logements, il était difficile de fournir un chiffre précis. Le manque de chiffres fiables sur la population vivant dans ces habitats informels semble indiquer une difficulté à évaluer correctement l’ampleur du problème et à anticiper les besoins en matière de relogement. Bien que déclarées comme « légitimes » par le préfet de Mayotte, ces opérations révèlent un manque global de préparation en matière de relogement durable sur l’île pour les habitants des quartiers décasés.
Mathilde Hangard