Une liste à la main, Attoumami Assaandi, directeur de l’école élémentaire Cheikh Abdourahamane Ben Omar de M’Gombani à Mamoudzou, annonce aux écoliers et aux parents réunis devant le portail de l’établissement les classes qui pourront effectuer leur rentrée ce lundi 27 janvier aux alentours de 7h. Sur les 29 professeurs de l’établissement, 9 ne sont pas venus en raison d’une grève décidée suite à l’appel lancé par l’intersyndicale pour dénoncer les conditions d’accueil des élèves. D’après le Rectorat, près de 30% des établissements scolaires ravagés par le cyclone seraient inexploitables. L’école élémentaire de M’Gombani a de son côté plutôt été épargnée, et son directeur l’assure, elle est « en état d’accueillir« .
Sous les yeux du recteur Jacques Mikulovic et du maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaïla, des écoliers repartent déçus de ne pas pouvoir débuter leur rentrée tandis que d’autres se précipitent à l’intérieur de l’établissement le sourire aux lèvres avec leurs parents. « La rentrée est adaptée en fonction des moyens et il n’y a pas tous les professeurs, il faut faire preuve de patience et de solidarité », a demandé aux nombreuses familles présentes, le maire de Mamoudzou.
Signe de cette solidarité, l’établissement, peu touché par le cyclone, va accueillir tous les après-midi les enfants de l’école maternelle voisine, les écoliers seront donc accueillis dès 6h et jusqu’à 11h.
Faire le compte des élèves
Main dans la main, jusqu’à l’entrée de la salle de classe, avec son fils de 8 ans, Anli Saindou est soulagé de le voir retourner à l’école, en classe de CE1. « Il avait hâte de commencer, il me demandait tout le temps quand est-ce que l’école allait rouvrir », raconte-t-il. « A la maison il était devant les dessins animés et il pouvait apprendre quelques mots et expressions, j’essayais de l’aider avec un dictionnaire ».
A ses côtés, une enseignante qui n’a pas souhaité donner son identité, attend les quelques enfants retardataires. « Pour le moment il y a une dizaine d’élèves qui ne sont pas encore là sur ma classe de 24″, dit-elle accoudée contre la porte de la salle, le regard tourné vers le portail de l’école. L’objectif des prochains jours c’est de faire le compte des élèves pour savoir combien, sur les 459 écoliers, manquent à l’appel. Ensuite le but pour les enseignants est de connaître la situation de chacun pour qu’ils puissent bénéficier d’un suivi scolaire dans les meilleures conditions. « D’ici jeudi ou vendredi si les élèves ne viennent pas on appelle les parents », lance le directeur Attoumami Assaandi, sur tous les fronts pour répondre aux questions des parents et des enseignants. Pour le moment une demande de radiation lui a été adressée pour un écolier qui sera scolarisé hors de Mayotte.
« Je ne vais pas aborder Chido directement »
Les écoliers présents ont désormais un retard de deux semaines sur leur programme habituel mais le rythme ne va pas pour autant être infernal, bien au contraire. « Les premiers jours je vais beaucoup discuter avec eux, m’assurer qu’ils vont bien et repérer ceux qui ont éventuellement besoin d’aide psychologique. Je vais parler de leurs vacances, on va chanter ensemble et je vais raconter des contes. Je ne vais pas aborder Chido directement, je vais les laisser m’en parler ou m’interpeller eux-mêmes », ajoute l’enseignante, contente de retrouver ses élèves. « Les enseignants ont été formés pour accompagner les enfants et mettre des mots sur ce qu’ils ont vécu », continue Attoumami Assaandi, « concernant la reprise des programmes habituels, aucune date ne nous a été communiquée pour le moment ».
Dans les différents étages de l’école, Ambdilwahedou Soumaïla va à la rencontre des professeurs et des élèves. « N’hésitez pas à dire tout ce que vous avez dans la tête », insiste l’élu, devant les écoliers, toujours dans l’idée de détecter les élèves qui ont des traumatismes pour leur venir en aide.
Quelques minutes après s’être installés, les élèves sont déjà attentifs, prêts pour cette première journée. Très vite le bruit des crayons de couleur sur le papier et les échanges entre les élèves et les professeurs recommencent, loin du silence des salles vides aux chaises disposées sur les tables et aux plafonds cassés. Les écoliers affichent pour la plupart un large sourire, comme Jared et Jirati assis côte à côte, heureux de se retrouver. Les salles de classes reprennent vie.
Victor Diwisch