Certaines interventions qui sont sans rapport direct avec la médecine peuvent avoir un impact médical inattendu, parfois sévère. C’est le cas du lissage des cheveux à l’aide d’agents chimiques, technique de coiffure très répandue dans le monde, aussi appelée procédure « brésilienne ». Elle permet d’obtenir un aspect lisse et brillant des cheveux pouvant durer plusieurs mois.
À l’origine, la première formule qui était utilisée pour défriser les cheveux était du formaldéhyde. En 2013, cette substance a été classée cancérigène et a été remplacée par des dérivés de l’acide glycolique, notamment l’acide glyoxylique.
Pendant un lissage des cheveux, l’exposition à l’acide glyoxylique peut ainsi se produire par simple inhalation du produit, par contact cutané ou par contact oculaire. Des articles scientifiques récents ont alerté sur les risques pour la santé de l’utilisation cosmétique de cette molécule.
En 2023, suite à un lissage des cheveux « à la brésilienne », 26 jeunes patientes ont présenté des lésions d’insuffisance rénale aiguë régressive avec une présence de cristaux d’oxalate de calcium dans les biopsies rénales. Aussi, une observation récente a rapporté le cas d’une femme de 26 ans, sans antécédent médical, ayant présenté trois épisodes consécutifs d’insuffisance rénale aiguë régressifs après un défrisage des cheveux.
L’utilisation de ces produits cosmétiques est en nette augmentation chez les femmes, mais aussi chez l’homme, et en particulier dans les populations aux cheveux frisés. Récemment, un patient transplanté rénal depuis 4 ans a développé une insuffisance rénale aiguë après cinq « peelings » du visage à l’acide glycolique. La biopsie rénale a également révélé la présence de cristaux d’oxalate.
Dans ce contexte, l’Académie Nationale de Médecine :
1- « Recommande de diffuser des messages d’alerte et d’information auprès des professionnels de santé, des salons de coiffure et des commerces de produits cosmétiques à base de ces acides, afin de les sensibiliser à ces risques d’insuffisance rénale aiguë se manifestant dans les 24 à 48h après les gestes techniques ;
2- Insiste sur l’importance d’informer les utilisateurs sur les risques en cas d’usage fréquent de ces produits lissants, et sur les signes de l’insuffisance rénale aiguë, notamment douleurs abdominales aiguës, nausées, vomissements d’apparition rapide ;
3- Souligne l’importance de ne pas réaliser de lissage des cheveux ou de « peeling » en cas de lésions du cuir chevelu ou de la peau du visage, ce qui augmente la pénétration de l’acide glyoxylique et de l’acide glycolique ;
4. Recommande, compte tenu des premières alertes publiées, de développer une cosmé-tovigilance permettant d’évaluer la fréquence du risque lié à l’usage de produits à base d’acides glyoxylique et glycolique, et d’établir un profil des patients les plus à risques. »
Mathilde Hangard